Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
manoeuvre enveloppante. Au signal d'Alexandre, les archers agrianes poussèrent leurs chevaux vers les cavaliers adverses, déco chant des nuées de flèches, puis un escadron d'hétairoi se jeta en avant pour freiner l'ennemi. Incroyablement calme, le roi poursuivait sa route au pas, à la tête de la Pointe. Seuls les cavaliers de son entourage remarquèrent le battement irrégu lier de ses cils et les rigoles de sueur qui coulaient sur ses tempes.
Les hétairoÔ éperonnèrent leurs montures, dévorant rapide ment l'espace qui les séparait de la vague impétueuse des cavaliers asiatiques. L'impact fut effroyable: des centaines de chevaux roulèrent au sol et autant de cavaliers se retrou vèrent à terre. Mais, bien que blessés et meurtris, ceux-ci se relevèrent aussitôt et se livrèrent des duels mortels dans un enfer de poussière, de hennissements et de hurlements. On it s'élever un nuage de poussière qui couvrit presque entièrement le thé‚tre de la bataille, si bien qu'il fut impos sible de distinguer ce qui se passait et comment ce premier combat se déroulait. Après avoir utilisé toutes leurs flèche~, m certain nombre d'Agrianes saisirent leurs poignards et sie lancèrent dans la mêlée, entraînés par leur fureur bar ~are, engageant de sauvages corps à corps avec les cavaliers memis, qui filaient comme des fantômes dans la brume aisse.
Des sonneries de trompette retentirent avec insistance r la gauche.
Léonnatos posa la main sur l'épaule d'Alex dre: " Dieux du ciel, regarde !
s'écria-t-il. Les chars, les ars à faux ! " Mais le roi ne prit même pas la peine de lui
Au centre de la formation perse, les épouvantables machines élançaient vers le flanc gauche formé par les Macédoniens. erdiccas, qui les avait aussitôt remarquées, s'écria: " Atten on, soldats, attention ! Tenez-vous prêts ! "
Mais au même moment, un groupe de cavaliers ennemis se ropulsa de biais, traînant derrière lui des fagots qui soule vèrent un rideau impénétrable de poussière, dissimulant les chars aux yeux des Macédoniens. Seul le soleil parvenait de temps à autre à faire briller d'éclats funestes les faux qui tour noyaient sur les essieux des roues ou fendaient l'air des deux côtés de la caisse et aux extrémités des jougs.
Perdiccas et les autres commandants ordonnèrent aux trompettes de sonner l'alarme afin que les fantassins se tiennent prêts à ouvrir leurs rangs dès que les chars surgi raient de la poussière. Mais ceux-ci débouchant à moins d'un stade de distance, ils ne purent tous réagir en temps voulu aux signaux hissés sur les étendards des chefs de subdi visions. En certains endroits, les rangs s'ouvrirent et les chars les traversèrent sans dommage, mais ailleurs, ces sinistres véhicules fondirent sur les Macédoniens à
toute allure, fau chant les soldats comme des épis de blé, tranchant leurs têtes I aux yeux encore écarquillés et stupéfaits. Nombre d'entre eux I furent touchés aux jambes par les faux tournoyantes qul | jaillissaient des essieux, et horriblement mutilés, d'autres | emportés en pleine course par les attelages, piétinés par les
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ALEXANDRE IE GRA~D ~ S CONFINS DU MONDE 725
sabots des chevaux et déchiquetés par les pointes ferrées que les Perses avaient fixées sous les caisses. Pourtant, l~arrnée continua d'avancer derrière Alexandre selon le diSpositif oblique qu'il avait établi. Les Macédoniens avaient désormais couvert plus d'un tiers de la vaste zone que Darius avait apla nie pour donner le champ libre à ses chars et ses chevaux, et ils marchaient encore au pas cadencé, au rythme des roule ments de tambours.
Le deuxième détachement d'archers agrianes se jeta sur les auriges, qu'ils décimèrent. D'autres, à cheval, poursuivirent ceux qui avaient traversé les rangs macédoniens pour les abattre dans le dos à coups de javelots. Mais déjà, la cavalerie lourde des Scythes et des Bactriens, aux ordres de Bessos repoussait les escadrons d'hétairoi, numériquement infé
rieurs, et commençait à effectuer une vaste manoeuvre enve loppante vers l'extrémité droite, o˘ avançaient les alliés grecs. Dès qu'ils virent les cavaliers barbares fondre sur eux à bride abattue, ceux-ci s'écrièrent: AlalalàÔ !
Puis ils resserrèrent les rangs et leur opposèrent un mur de boucliers et de lances. Dans le vacarme des cris et des hennis sements, Alexandre poussa Bucéphale à une allure moyenne, caracolant à travers la
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