Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
criant: "
Non, Alexandre ! Arrête-toi ! Attends ! " Mais le vacarme de la bataille était tel que le roi ne l'entendit pas. Il sauta de l'autre côté.
Léonnatos vola à son secours, à la tête de ses hommes. Mais les ennemis, qui avaient assisté à la scène, essayèrent de lui faire barrage pour permettre à leurs compagnons, de l'autre côté, de tuer le souverain macédonien.
C'est alors qu'Alexandre comprit la situation. Se voyant seul et encerclé, il se mit à reculer vers un énorrne figuier en se défendant désespérément contre une nuée d'adversaires. Pendant ce temps, Léonnatos se frayait un chemin à coups de hache, précipitant les ennemis au bas de la rampe et hurlant: " Alexandre, résiste ! Résiste, nous arrivons ! ", le coeur rempli d'angoisse à l'idée que le roi pouvait être écrasé à chaque ins tant. Soudain, il entendit un aboiement dans son dos. Sans 974 ALEXANDR~ LE GRAND LES CONFINS DU MONDE y75
même se retourner, il s'écria: " Péritas ! Va, Péritas ! Va ! Cours vers Alexandre ! "
Le molosse gravit la rampe- comme une furie. Au moment o˘ il atteignait le sommet, son maître s'effondrait, victime d'un javelot, même s'il luttait encore avec l'énergie qui lui res tait et se protégeait derrière son bouclier. En un instant Péritas bondit du haut des murs et s'abattit comme la foudré au milieu des ennemis. Il mordit la main d'un adversaire et la brisa dans un craquement d'os, il en égorgea un autre, en éventra un troisième. Il se battait comme un lion en grognant, en montrant ses crocs ensanglantés, les yeux aussi enflammés que ceux d'une bête sauvage.
Alexandre en profitait pour reculer en rampant sur le sol. C'est alors que Léonnatos, enfin parvenu au sommet avec ses hommes, se jeta sur l'ennemi dans des cris de possédé. D'un coup de hache il découpa en deux un adversaire, de la tête à l'aine. Terrorisés par cette incroyable puissance, les autres reculèrent. En quelques instants, des centaines d'attaquants et d'" écuyers " macédoniens franchirent l'enceinte et se répan dirent à
l'intérieur de la ville, qui se remplit bientôt de cris désespérés, de hurlements féroces, du vacarme des armes qui se heurtaient dans la mêlée furieuse.
Léonnatos s'agenouilla devant le roi et lui dégrafa sa cui rasse. Mais il vit ses yeux se remplir soudain de larmes et de désespoir. " Péritas, s'écria Alexandre. Non ! que t'ont-ils fait, Péritas ! "
Couvert de sang et de sueur, le molosse se traînait pénible ment vers son maître en geignant, un javelot planté dans le côté.
" Appelez Philippe ! hurlait Léonnatos. Le roi est blessé, le roi est blessé ! "
Péritas réussit à atteindre la main d'Alexandre et à la lécher une dernière fois, puis il s'effondra, inanimé.
" Péritas, non ! ", gémissait le roi en sanglotant et en serrant sur sa poitrine l'ami qui était tombé pour lui sauver la vie.
Perdiccas survint alors, épuisé et ensanglanté. " Je n'arrive pas à
trouver Philippe. Dans le désordre de la bataille, per sonne n'a pensé à
lui donner un cheval.
-- que faisons-nous ? s'écria Léonnatos la voix brisée par l'angoisse.
--Nous ne pouvons pas le transporter dans cet état. Il faut extraire la pointe. Tiens-le: il va souffrir horriblement. "
Léonnatos replia les bras d'Alexandre derrière son dos et les maintint fermement tandis que Perdiccas déchirait le chiton du roi pour dénuder la blessure. Puis, posant la main sur la poitrine d'Alexandre, il essaya, de l'autre, d'arracher la pointe du javelot. En vain: elle était encastrée entre la clavicule et l'omoplate.
" Il faut que je prenne appui sur l'omoplate avec la pointe de l'épée, dit-il. Crie, Alexandre, crie aussi fort que tu le peux, je n'ai rien pour atténuer la douleur ! "
Il dégaina son épée et la glissa dans la blessure. Tandis qu'Alexandre hurlait, Perdiccas chercha l'omoplate de la pointe de son arme. L'ayant trouvée, il prit appui dessus, ce qui lui permit de dégager le javelot, qui libéra un flot de sang. Le roi s'évanouit dans un dernier cri.
" Un tison, Léonnatos, vite ! Nous devons cautériser la plaie, sinon il mourra d'hémorragie. "
Léonnatos partit en courant. Il revint bientôt avec un mor ceau de poutre qu'il avait déniché dans une maison en flammes, et il l'appliqua sur la blessure. Il y eut une odeur nau séabonde de chair br˚lée, mais le flot de sang fut enrayé. Pendant ce temps, les hommes de Perdiccas, qui avaient
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