Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
DU SONGE 125
Puis, les appelant l'un après l'autre:
" Héphestion ! Séleucos ! Lysimaque ! Ptolémée ! Cratère ! Perdiccas !
Léonnatos ! Philotas ! "
Ses amis !
A la fin de l'appel, ils brandirent leurs javelots et s'écrièrent: "
Salut à toi, Alexandre ! " Puis, enfreignant le protocole, ils l'entourèrent, le faisant presque tomber, et l'embrassèrent dans une étreinte sans fin sous les yeux du roi et de ses soldats, immobiles dans leurs rangs.
Ils se pressaient autour de leur prince en criant de joie, lan çant leurs armes en l'air, bondissant et dansant comme des fous.
quand la parade fut terminée, le groupe accueillit Eumène qui, en raison de sa nationalité, ne pouvait pas appartenir à l'armée. Il était devenu entre-temps le secrétaire personnel de Philippe et occupait à la cour un poste de grande importance.
Ce soir-là, Alexandre dut présider le banquet que ses amis avaient organisé pour lui dans la demeure de Ptolémée. La salle avait été
soigneusement et richement décorée: on pou vait y admirer des lits et des tables de bois marqueté aux appli cations de bronze doré, des chandeliers qui n'étaient autres que de spectaculaires bronzes de Corinthe en forme de jeunes filles tenant des lantemes, d'autres lanternes encore, compo sées de vases découpés qui pendaient du plafond en projetant sur les murs un étrange jeu d'ombres et de lumières. Les plats étaient en argent massif finement ciselé, les mets avaient été confectionnés par des cuisiniers de Smyrne et de Samos, qui avaient le go˚t grec et connaissaient parfaitement la cuisine asiatique.
quant aux vins, ils provenaient de Chypre, de Rhodes, de Corinthe et même de la lointaine Sicile, o˘ les agriculteurs coloniaux surpassaient désormais, par la qualité et l'excel lence de leurs produits, leurs collègues de la mère patrie.
Ils étaient servis dans un gigantesque cratère attique datant de près d'un siècle, orné d'une danse de satyres poursuivant des ménades à moitié
nues. Sur chaque table se trouvait une coupe du même service, o˘ les mêmes artistes avaient repré senté de piquantes scènes de banquet: des joueuses de fl˚te nues, dans les bras de jeunes gens couronnés de lierre, qui buvaient, offrant comme un avant-go˚t de ce que la soirée réservait.
Alexandre fut accueilli par une ovation, et le maître de mai son vint à
sa rencontre en lui tendant une magnifique coupe à deux anses, remplie de vin de Chypre. " Alors, Alexandre ! Après trois ans à l'eau fraîche, tu dois avoir des grenouilles dans l'estomac ! Nous, au moins, nous sommes partis avant toi ! Bois un peu de ce breuvage qui te revigorera !
-- Alors, que t'a appris Aristote au cours de ses leçons secrètes ?
demanda Eumène.
--Et o˘ as-tu pris ce cheval ? enchaîna Héphestion. Je n'ai jamais rien vu de la sorte.
--Je veux bien le croire ! commenta Eumène sans attendre la réponse. Il a co˚té treize talents. C'est moi qui ai signé l'o~dre de paiement.
--Oui, confirma Alexandre. C'est un cadeau de mon père. Mais j'en ai gagné autant en pariant que je l'apprivoiserais. Vous auriez d˚ voir ça !
poursuivit-il en s'animant. Le pauvre animal était terrorisé: cinq hommes le tenaient, ils tiraient sur son mors au point de le blesser.
--Et toi ? demanda Perdiccas.
--Moi ? J'ai seulement ordonné à ces misérables de le l‚cher et je lui ai couru après.
--Assez parlé de chevaux ! cria Ptolémée pour couvrir le vacarme que produisaient ses amis en se pressant autour d'Alexandre.
Parlons de femmes ! Et prenez place, le dîner est prêt !
--De femmes? intervint Séleucos. Sais-tu que Perdiccas est amoureux de ta soeur ? "
Perdiccas rougit et poussa son camarade si violemment qu'il le projeta au sol.
" Vraiment ! insista Séleucos. Je l'ai vu lui faire les yeux doux au cours d'une cérémonie officielle. Un garde du corps qui fait les yeux doux ! Ah, ah !
-- Et vous ne savez pas tout, ajouta Ptolémée. Demain, il doit commander l'escorte qui conduira la princesse au temple de la déesse Artémisia, o˘
elle ira offrir son premier sacrifice d~initiation. Si j'étais toi, je ne me fierais pas à lui ! "
Notant le visage cramoisi de Perdiccas, Alexandre tenta I ~f~ IRY NlÌVR I R f ~ rLE FILS Dl, SONGE 127
de changer de conversation. Il réclama un peu de silence. " Dites, jeunes gens ! Juste une chose. Je voudrais vous dire que je suis content de vous retrouver et que je suis fier que rnes amis et
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