Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
nombreuses années de distance, des situations sem blables à celles qui donnèrent lieu à des exploits grandioses.
Mais rien ne se répète jamais de la même façon.
--Tu crois ? ", demanda Alexandre.
Un instant, son front se plissa comme s'il poursuivait des images lointaines, évanescentes. Héphestion posa la main sur son épaule. " Je sais à quoi tu penses. Et quoi que tu décides de faire, o˘ que tu décides d'aller, je te suivrai. Même aux enfers. Même au bout du monde. "
Alexandre se tourna vers lui et plongea son regard dans le sien.
" Je le sais ", dit-il.
Ils atteignirent leur d~stination à la tombée du soir, et Alexandre reçut les honneurs qui revenaient à l'héritier du trône de Macédoine. Puis il participa avec ses amis au repas
1 SO AL~XANDAII LE ~AAND rL~ FILS DU SONDE
que les représentants de la confédération des Thessaliens leur avaient fait préparer. Au même moment, Philippe se voyait offrir la charge de tagos, président de la confédération thessa lienne, qui faisait de lui le chef de deux …tats, en qualité de roi et de président.
Les Thessaliens aussi étaient de formidables buveurs. Au cours du repas, Eumène s'abstint de boire et en profita pour négocier un lot de chevaux avec un noble et grand propriétaire terrien, complètement ivre, obtenant des conditions d'achat et de paiement extrêmement avantageuses, pour lui comme pour le royaume.
Le lendemain, une fois sa mission conclue, Alexandre repartit avec ses amis. Mais il s'arrêta bientôt, changea de vêtements, congédia sa garde et prit la route du sud.
" O˘ vas-tu ? demanda Eumène, surpris par ce comporte ment imprévu.
--Je l'accompagne, dit Héphestion.
--Oui, mais o˘ ?
--A Aulis, répondit Alexandre.
--Le port d'o˘ les Achéens levèrent l'ancre pour la guerre de Troie, commenta Callisthène d'un air imperturbable.
--Aulis ? Mais vous êtes fous ! Aulis est en Béotie, en plein territoire ennemi !
--Je veux voir ce lieu et je le verrai, affirma le prince. Personne ne nous remarquera.
--Je le répète, vous êtes fous, insista Eumène. On vous remarquera, c'est s˚r ! Si vous parlez, on notera votre accent, et si vous ne parlez pas, on se demandera pourquoi vous êtes muets. En outre, tes portraits ont été
diffusés dans une dizaine de villes. Te rends-tu compte des conséquences que pourrait avoir ta capture ? Ton père serait obligé d'accepter des com promis, de renoncer à ses projets, ou, dans le meilleur des cas, de payer une rançon qui lui co˚terait le prix d'une guerre perdue. Non, je ne veux rien avoir à faire avec cette folie. Je ne vous ai pas entendus ou, mieux, je ne vous ai pas vus: vous êtes partis à l'aube, sans bruit.
-- D'accord, acquiesça Alexandre. Et ne t'inquiète pas. Nous devons seulement parcourir quelques centaines de stades sur le territoire béotien.
Nous effectuerons l'aller et
retour en quatre jours. Et si 1 on devait nous arrêter, nous dirions que nous sommes des pèlerins venus consulter l'oracle de Delphes.
--En Béotie ? Mais Delphes est en Phocide !
-- Nous raconterons que nous nous sommes perdus ! ", cria Héphestion en éperonnant son cheval.
Callisthène examinait d'un air perplexe ses compagnons de voyage.
" qu'as-tu l'intention de faire ? lui demanda Eumène.
-- Moi ? Eh bien... d'un côté, l'affection que je porte à Alexandre me pousserait à le suivre. De l'autre, la prudence qui convient surtout à
un...
--J'ai compris ! interrompit Eumène. Arrêtez-vous ! que ~eus vous foudroie, arrêtez-vous ! " Alexandre et Héphestion s'exécutèrent. " Au moins, je n'ai pas l'accent macédonien et si je le veux, je peux passer pour un Béotien.
--Ah, ah ! Cela ne fait aucun doute ! ricana Héphestion.
--Ris donc, maugréa Eumène en poussant son cheval au trot. Si Philippe était là, il te ferait rire à coups de trique. Allons, en route, ne traînons pas !
--Et Callisthène ? demanda Alexandre.
--Il arrive, il arrive, répondit Eumène. O˘ veux-tu qu'il aille, tout seul ? "
Ils passèrent les Thermopyles le lendemain, et Alexandre visita la tombe des guerriers spartes tombés cent quarante ans plus tôt en combattant les envahisseurs perses. Il lut l'ins cription en dialecte laconique évoquant leur sacrifice et se recueillit en silence, à l'écoute.
" Comme le destin de l'homme est éphémère, s'exclama-t-il. Seules ces quelques lignes témoignent du fracas d'un affron tement qui fit trembler le monde et d'un acte
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