Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
de la mère patrie et des colonies d'Orient, je sauverai la culture hellénique et la répandrai dans le monde entier. Démosthène n'a pas saisi la teneur de mon projet, il m'a combattu comme si j'étais un tyran. Mais regarde autour de toi ! Les Grecs sont libres et il n'y a de garnison macédonienne que sur l'acropole des
I traitres thébains. J'ai protégé les Arcadiens et les Messéniens,
. j'ai été à plusieurs reprises le champion du sanctuaire de Delphes.
--Tu veux vraiment aller en Asie ? ", demanda Alexandre, surtout frappé
par cet aspect de la question.
Philippe plongea son regard dans le sien.
" Oui. Et je vais l'annoncer à nos alliés, à Corinthe. Je leur demanderai de nous fournir des contingents d'hommes et des navires de guerre pour favoriser une entreprise qu'aucun Grec n'est jamais parvenu à mener à bien.
--Et penses-tu qu'ils te suivront ?
--Je n'en doute pas, répondit Philippe. Je leur expliquerai que le but de cette expédition est de libérer les villes grecques d)Asie de la domination des barbares. Ils ne pourront pas reculer.
--Est-ce le véritable but de cette expédition ?
--Nous possédons l'armée la plus forte du monde, l'Asie est immense, et il n'y a pas de limites à la gloire qu'un homme peut se gagner, mon fils ", affirma le roi.
quelques jours plus tard, un autre invité se présenta à la cour: Apelle, que bon nombre de gens considéraient comme le plus grand peintre du monde entier. Philippe lui avait demandé de le représenter aux côtés de la reine, avec toutes les retouches et les embellissements nécessaires, pour un por trait officiel destiné au sanctuaire de Delphes. Mais Olympias refusa de poser auprès de son époux, et Apelle dut l'épier de loin pour effectuer les croquis préparatoires.
Le résultat final enthousiasma toutefois Philippe, qui lui commanda un portr~it d'Alexandre. Celui-ci s'y opposa.
" Je préfère que tu fasses le portrait d'une amie, lui dit-il. Nue.
--Nue ? interrogea Apelle.
--Oui, sa beauté me manque quand je suis au loin. Il faut que tu effectues un tableau qui ne soit pas trop grand, car je désire l'emporter en voyage. Mais je veux qu'il soit très ressemblant.
--Tu auras l'impression de la voir en chair et en os, mon seigneur ", assura Apelle.
Ainsi, Campaspé, qui était selon l'avis de certains la plus belle femme de Grèce, posa nue, dans toute sa splendeur, devant le plus grand des peintres.
Impatient d'admirer le résultat d'une rencontre aussi extra ordinaire, Alexandre s'enquérait chaque jour des progrès du travail. Mais il s'aperçut bien vite qu'il n'y en avait pas, ou presque: Apelle ne cessait de multiplier les croquis pour ensuite les effacer.
" Ce tableau est comme la toile de Pénélope, observa le jeune homme.
qu'est-ce qui ne va pas ? "
Apelle était à l'évidence embarrassé. Son regard allait de son magnifique modèle à Alexandre, puis revenait vers la jeune femme.
" qu'y a-t-il ? répéta le prince.
-- Le fait est... Le fait est que je ne peux pas supporter l'idée de me séparer d'une telle beauté. "
A son tour, Alexandre observa le maître et Campaspé. Il devina qu'ils ne s'étaient pas seulement occupés d'art au cours de ces longues séances. "
J'~ai compris ", dit-il. Il songea alors à Leptine, dont les yeux étaient contin˚ment rougis par les larmes, et pensa qu'il ne manquerait pas de belles femmes à l'avenir, s'il le désirait. Il se dit aussi que sa maîtresse devenait chaque jour plus impertinente et plus exigeante. Il s'approcha alors du peintre et lui murmura à l'oreille: " J'ai une proposi tion à te faire. Tu me laisses le tableau et je te laisse la fille.
Naturellement, si elle n'a rien à redire.
--Oh, mon seigneur, balbutia le grand artiste envahi par l'émotion.
Comment te remercier. J'ai... j'ai... "
Le jeune prince lui donna une tape sur l'épaule. " L'impor tant, c'est que vous soyez heureux et que le tableau soit réussi. " Puis il ouvrit la porte et sortit.
Philippe et Alexandre se rendirent à Corinthe vers la fin de l'été et furent hébergéx aux frais de la cité. Le choix de ce lieu ne relevait pas du hasard: c'était à Corinthe que les Grecs avaient juré de résister à
l'envahisseur perse, cent cinquante ans plus tôt, et c'est là que devait être ratifiée la nouvelle alliance qui unirait tous les Grecs du continent et des îles dans une grande expédition en Asie. Une entreprise gui ferait p
‚lir le souvenir de la guerre de Troie, dont
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