Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
princesse était dans la splendeur de ses dix-huit ans. Elle avait de grands yeux verts, de longs cheveux aux reflets cuivrés et un corps digne d'une déesse de l'Olympe. Il n'y avait pas de noble macédonien qui ne rêv‚t de l'obtenir en mariage.
" Il est temps, à présent, que tu te maries, ma fille ", lui dit-il.
Cléop‚tre baissa la tête. " J'imagine que tu as déjà choisi mon époux.
-- En effet, confirma Philippe. Ce sera le roi Alexandre d'…pire, le frère de ta mère. "
La jeune fille observa un moment de silence, mais il était facile de comprendre que la décision de son père ne lui déplai sait pas. Son oncle était un beau jeune homme, fort courageux et très aimé de ses sujets, doté, qui plus est, d'un caractère semblable à celui d'Alexandre.
" Tu ne dis rien? demanda le souverain. T'attendais-tu à quelqu'un d'autre ?
--Non, père. Sachant que ce choix te revenait je n'avais pensé à
personne, afin de ne pas te contrarier. Mais je voudrais te poser une question.
--Parle, ma fille.
--Mon frère Alexandre sera-t-il invité à mes noces ? "
Philippe lui tourna brusquement le dos, comme frappé par un coup de fouet. " Ton frère n'existe plus, pour moi ", dit-il d'une voix glaciale.
Cléop‚tre fondit en pleurs. " Mais pourquoi, papa ? Pour quoi ?
--Tu le sais très bien. Tu étais là. Tu as vu comment il m'a humilié
devant les représentants de toutes les villes de Grèce, devant mes généraux et mes notables.
--Papa, il...
--N'essaie pas de le défendre ! cria le roi. J'ai appelé Aristote à la cour pour qu'il l'instruise, j'ai invité Lysippe pour qu'il sculpte une statue de lui, j'ai frappé des pièces de mon naie à son image. Comprends-tu ce que cela signifie ? Non, ma fille, ses insultes et son ingratitude ont dépassé les bornes... "
Cléop‚tre sanglotait, le visage caché dans ses mains. Philippe aurait aimé s'approcher, mais il refusait de se laisser émouvoir, il ne le pouvait pas.
" Papa..., insista la jeune fille.
--Je t'ai dit de ne pas le défendre !
~--C'est pourtant ce que je vais faire. J'étais présente, ce Jour-là, et j'ai vu ma mère te regarder, p‚le comme une morte, tandis que tu posais tes mains sur les seins de ta jeune épouse et que tu lui caressais le ventre.
Alexandre aussi l'a vu, et il aime sa mère. Ne le devrait-il pas ? Devrait-il l'effacer de sa vie, ainsi que tu l'as fait ? "
Philippe s'emporta. " C'est Olympias ! C'est elle qui t'a monté contre moi ! N'est-ce pas ? hurla-t-il, rouge de colère. Vous vous dressez tous contre moi ! "
Cléop‚tre se jeta à ses pieds et serra les genoux de son père entre ses bras. " Ce n'est pas vrai, ce n'est pas vrai, papa, nous voulons seulement que tu recouvres la raison. Certes, Alexandre a commis une erreur... " A ces mots, Philippe sem bla se calmer. " Mais ne peux-tu pas le comprendre ?
Ne peux
tu pas essayer de le comprendre ? Si l'on t'avait traité en public de b
‚tard, n'aurais-tu pas défendu ton honneur et celui de ta mère? N'est-ce pas ce que tu as toujours appris à ton fils? Maintenant qu'il te ressemble, maintenant qu'il se comporte selon tes voeux, voilà que tu le rejettes. Tu voulais un Achille ! continua Cléop‚tre en se levant, le visage sillonné de larmes. Tu voulais un Achille et tu l'as eu. La colère d'Alexandre est la colère d'Achille, papa !
--Eh bien, si sa colère est celle d'Achille, la mienne est celle de Zeus !
--Mais il t'aime, il t'aime et il souffre, je le sais ", sanglota Cléop
‚tre en se laissant tomber sur le sol.
Philippe la contempla un moment en silence, les lèvres pincées. Puis il se retourna.
" Prépare-toi, dit-il devant la porte. Le mariàge aura lieu dans six mois. " Et il sortit.
Eumène le vit regagner son bureau, le visage sombre, mais il fit semblant de rien et poursuivit son chemin dans le couloir les bras chargés de rouleaux.
Puis, quand la porte se fut refermée, il revint sur ses pas et colla son oreille contre le bois. Le roi pleurait.
Eumène s'éloigna en silence et regagna la pièce qu'il occu pait à
l'intérieur des archives royales. Il s'assit, croisa les bras sur son écritoire et y appuya la tête. Il réfléchit longuement puis il prit sa décision.
Il saisit un sac, endossa son manteau, se passa une main dans les cheveux et s'engagea de nouveau dans le couloir qui menait au bureau du roi.
Il poussa un profond soupir avant de frapper.
" qui est là ?
--Eumène.
--Entre. "
Eumène pénétra
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