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Alias Caracalla

Alias Caracalla

Titel: Alias Caracalla Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Daniel Cordier
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sont responsables de cette
catastrophe. » Devant l’état désastreux des transmissions, la sévérité de * Rex à l’égard des mouvements m’est d’un grand réconfort. Comme nous
tous, il est anxieux de la fragilité des liaisons avec
Londres : « Apportez-moi demain votre rapport sur
l’état réel des transmissions radio. »

    Leur fragilité n’est-elle pas la meilleure définition
de l’état des mouvements ?

    Lorsque nous arrivons au restaurant, Bidault nous
attend au fond de la salle, plongé, comme à son habitude, dans la lecture d’un journal. Son visage reflète
une gravité nouvelle. Dès qu’il aperçoit * Rex, il se lève
pour lui offrir sa place sur la banquette et s’assoit en
face de lui. * Rex me fait prendre place à ses côtés.
Bidault commence à raconter les événements
d’Oullins, du moins ceux dont il a connaissance.

    J’ai la tête ailleurs. Ma journée harassante ne m’a
pas laissé le temps de réfléchir à l’arrestation de
mon camarade Brault. Comme tous les coups durs,
c’est un rappel à l’ordre : depuis mon arrivée,
l’urgence des tâches quotidiennes a aboli les règles
de sécurité. Après cet événement cruel, les mesures
draconiennes enseignées par les Anglais perdent de
leur ridicule. * Rex a raison : le véritable danger
réside dans l’absence de danger visible.

    Ma première préoccupation urgente est d’installer Briant à Lyon et de lui trouver un lieu d’émission. Je pense aussi aux grèves, invisibles dans les
rues de Lyon. * Rex lui-même est arrivé sans encombre par le train. L’excitation de Bidault et Morandat
serait-elle exagérée ? De temps à autre, des bribes
de conversation, ou plutôt du monologue de Bidault,
forcent mes préoccupations : « Les communistes
cherchent à profiter de la situation. Ils poussent à
des décisions extrêmes (armement des ouvriers,
transformation des usines en forteresses). Il ne
semble pas que leur rôle ait été déterminant à l’origine. »

    Il évoque les tracts édités à cette occasion par les
mouvements, cosignés par le parti communiste et
le Front national. * Rex écoute attentivement, puis
demande : « Pourquoi le Comité d’action socialiste
est-il absent ?

    — Je l’ignore. Tout est anarchique. Il semble que
ce soient des initiatives de la base, s’opposant au
départ en Allemagne des ouvriers désignés, qui aient
tout déclenché. À partir de là, aucun représentant
des mouvements ne s’est manifesté, aucun plan n’a
été concerté. Comme toujours, le parti communiste
en profite pour se placer. Il faut reconnaître que ses
militants sont d’une autre envergure que ceux des
mouvements. Ils ont une formation politique et savent
où ils vont.

    — Et le Front national ?

    — J’ignore les raisons de sa signature au bas des
tracts.

    — Il faut s’informer sur son organisation, ses dirigeants et leurs objectifs. Naturellement, les communistes sont les maîtres d’œuvre de ce mouvement.*Gaston 5  a souhaité que je rencontre un de leurs
dirigeants pour préparer la commémoration de
Valmy. Comme vous le savez, j’ai refusé. Les communistes poursuivent dans la clandestinité leur tactique de noyautage. »

    De la masse des informations qu’il a reçues, Bidault
extrait quelques éléments qui lui semblent essentiels : le mouvement de grève n’a pas de meneur
« homologué », mais la réaction de solidarité des
cheminots est unanime. Un orateur ouvrier, après
avoir rappelé que la grève a toujours été un mode
de libération de la classe ouvrière, a proclamé qu’elleétait maintenant « l’instrument de la libération
nationale ». Les gardes mobiles ont enfoncé les portes de l’usine, mais, bien que menotté, l’orateur a
continué : « Pour vous prouver que les temps ont
changé, je demande aux gardes mobiles qui viennent d’arriver de se mettre au garde-à-vous pendant
que vous, camarades, chanterez La Marseillaise . »
Ce qui fut fait sur commandement du capitaine des
gardes mobiles.

    « Un détail va vous amuser, continue Bidault. Le
préfet Angeli est venu sur place pour rechercher les
meneurs. Un cri général lui a répondu : “Il y a mille
deux cents meneurs !” » Pour le reste, Bidault n’a
que des informations fragmentaires et de seconde
main : « Il semble qu’on aille vers la grève générale.
Le représentant de Vichy est venu pour calmer le
jeu. On lui a demandé la libération des cent

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