Alias Caracalla
avec le colonel, le télégramme qu’il me confie
révèle son projet :
Ai montré erreur criminelle Giraud n’avoir pas
rallié de Gaulle immédiatement et conséquence
catastrophique pour unité Résistance et avenir
du pays.
Semble avoir compris et envisage accord et
même venue général de Gaulle en Algérie.
*Rex doit ce succès au moyen de pression qu’il
possède pour échanger le départ du colonel à Londres
contre la « reconnaissance » du Général. Il me prescrit de joindre Fassin pour préparer ce départ : « Il
est indispensable qu’il rencontre le Général dans les
plus brefsdélais 10 . »
*Rex a négocié avec Linarès la remise aux mouvements d’armes stockées par l’armée d’armistice,
remise qui était l’objet premier de la précédente
rencontre du colonel avec * Lorrain. Il a obtenu que
les chefs de l’armée d’armistice annulent l’ordre de
Laval exigeant leur livraison aux Allemands.
La quantité et la qualité de ces armes sont une
aubaine pour les mouvements, comparées à celles,
symboliques, du matériel parachuté irrégulièrement
et à grands risques :
[…] ai obtenu livraison par son Deuxième
Bureau plusieurs milliers mitrailleuses et fusils
pour armer troupes Lifra, Liber et Tirf dans région
lyonnaise.
*Rex me demande d’examiner avec Schmidt la
façon de récupérer les archives abandonnées dans
l’appartement du colonel. Il l’a quitté dès l’arrivée
des Allemands à Lyon en y laissant quelques documents d’état-major : recherché par la Gestapo, il
craint de retourner chez lui. Le télégramme de * Rex
s’achève sur un autre sujet : « Grand merci pour
distinction — Pensez à collaborateurs. »
Cette dernière phrase révèle l’estime du patron
pour sa petite équipe.
Dimanche 15 novembre 1942
Réunion d’état-major
En dépit du manque d’information sur les événements de Londres, * Rex s’inquiète en permanence
de la situation imprévisible, et selon lui périlleuse,
du Général.
Après la décision d’adresser un message aux
Alliés — qui n’est pas encore parti, faute de n’avoir
pas recueilli toutes les signatures —, il décide, sans
attendre le retour de Frenay et d’Astier de la Vigerie,
la constitution d’une armée secrète unique, sous le
commandement du général Delestraint.
La première réunion de l’état-major, composé de
spécialistes militaires des mouvements, se tient
aujourd’hui dans le nouveau local trouvé par * Rex,
à l’angle de la rue Sala et de la rue Victor-Hugo, mis
à sa disposition par France d’abord (mouvement de
résistance limité à des cadres) : il abrite une agence
d’architectes dirigée par Georges Cotton.
Élégamment meublé et lumineux, le local a un
aspect cossu, bien différent des logements exigus
dans lesquels nous vivons et travaillons. La salle de
réunions et le bureau du directeur, à l’angle des deux
rues, sont réservés à * Rex. Le va-et-vient du personnel et des clients de l’agence garantit notre sécurité.
La réunion a un autre objectif : l’intégration de
cadres de l’armée d’armistice, dont l’Armée secrète
manque cruellement. Les entretiens de * Rex avec le
colonel de Linarès lui ont révélé la nécessité de créer
des structures militaires plus étoffées pour les troupes des mouvements et de la Résistance, adéquates
à la reprise des combats. À cet effet, * Rex présentele général Delestraint aux responsables des mouvements. Cette réunion marque symboliquement le
passage des bandes plus ou moins organisées à un
ensemble cohérent.
C’est après cette réunion que Delestraint signera
son premier ordre du jour : « L’instant est proche
où nous pourrons exercer notre action. L’heure n’est
plus aux atermoiements. Je demande à tous une
stricte discipline, une attitude véritablement militaire. »
Mardi 17 novembre 1942
Silence des communistes
*Rex m’a prescrit de garder un contact permanent
avec * Gaston, représentant le parti communiste en
zone sud, afin d’obtenir le plus tôt possible sa signature pour le message aux Alliés.
Les premières fois que je l’ai rencontré, il y a une
huitaine de jours, j’avais peine à croire que ce père
tranquille fût un chef communiste. Avec sa moustache de vigneron, son pantalon de velours côtelé,
aux chevilles serrées par des pinces à vélo, il affichait l’allure débonnaire du vieux métayer de
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