Alias Caracalla

rang
modeste.

    Le voyage de * Rex à Londres a trois objectifs :
la nomination du général Delestraint à la tête de
l’armée secrète de la zone sud ; la création du
Conseil de la Résistance ; le contrôle des mouvements de zone nord, abandonnés à eux-mêmes par
le BCRA, qui se contente d’utiliser leurs capacités
de renseignement.

    Ne possédant aucune liaison entre eux, ces mouvements ne peuvent envisager la coordination de
leur action. Par ailleurs, n’ayant pas de contact avec
Londres, ils ne bénéficient d’aucun soutien financier. Ils n’ont donc pas pu se développer à l’égal de
ceux de la zone sud.

    *Rex avait commencé d’en aider quelques-uns par
l’intermédiaire de * Frédéric. On a vu que, contrairement à la proposition d’André Philip, il envisageait
entre ces mouvements une organisation plus souple
que celle adoptée en zone sud.

    Prévenu par Manuel de l’envoi prochain en zone
nord de * Brumaire, * Rex a décidé d’aller à Londres
(au moment où de Gaulle a réclamé sa venue) afin
de faire barrage à ce projet. Dans la perspective du
départ de * Frédéric et Manuel à sa place en cas
d’échec de son opération d’enlèvement, plusieurs
séances de travail se sont tenues avec Manuel.

    Au cours du dîner de ce soir, Manuel expose son
plan : suggérer à de Gaulle la nomination de * Rex
comme son représentant personnel pour toute la
France : « C’est la seule manière d’obtenir la fin deschevauchements entre les agents de Londres dont
vous vous plaignez. Vous savez bien que les uns et
les autres se présentent comme “seuls” représentants
du Général, alors qu’ils n’en ont ni le titre ni la
fonction. » C’est mot pour mot la formule de * Rex.

    Enfin, * Rex souhaite avoir un adjoint en permanence dans chaque zone. Il propose * Frédéric pour
la zone nord et demande de trouver à Londres le
personnel complémentaire.

    Durant cette mise au point, qui occupe tout le
dîner, je m’étonne du choix de * Frédéric, un homme
qui lui ressemble si peu et manque de la plus élémentaire prudence. Son aspect théâtral donne
l’impression qu’il est en représentation permanente, et quant à ses paroles, proférées d’une voix
de stentor, la moindre d’entre elles pourrait perdre
toute la Résistance.

    Pourtant, le hasard privilégie cette solution. Tandis que * Rex se morfond sur son terrain, la précaution de faire enlever * Frédéric sur un autre terrain
est récompensée de succès ; en effet, il s’envole avec
Manuel dans la nuit.

    Heureusement, * Rex a confié à ce dernier le courrier considérable accumulé depuis fin novembre.

    Mercredi 27 janvier 1943

     

    Les mouvements enfin unis

    Depuis deux mois, * Rex travaille à l’unité des mouvements de zone sud. Aujourd’hui, enfin, il peut
annoncer l’aboutissement de ses efforts : le Comité
de coordination prend le titre officiel de « Comitédirecteur des Mouvements unis de la Résistance
[MUR] ».

    Les trois journaux subsistent sous leur forme
actuelle, mais avec la même manchette : « Un seul
chef, de Gaulle, un seul combat pour les libertés ».

    La fusion a pour corollaire la centralisation. Le
Comité directeur est composé de trois services :
Affaires politiques, dirigé par Emmanuel d’Astier de
La Vigerie ; Affaires militaires, par Henri Frenay ;
Renseignements et Sécurité, par Jean-Pierre Lévy.
*Rex conserve la présidence avec une voix prépondérante.

    Un peu plus d’un an après son retour de Londres,
il a enfin réussi à unifier les mouvements de zone
sud, comme de Gaulle le lui avait prescrit. Étant
donné la nature rebelle des mouvements, c’est un
succès à double tranchant ; * Rex en est conscient.

    À Georges Bidault qui le félicite, il répond : « C’est
indispensable à l’efficacité des combats. Mais maintenant que ces individualistes sont obligés de partager le pouvoir, j’en serai peut-être la première
victime  : leur refus du conseil politique risque, hélas,
d’être plus efficace. »

    Malheureusement, cette réussite est entachée d’un
désastre que nous venons d’apprendre : Jean Holley,
Jean Loncle et un radio formé en France, Marcel
Lenclos, ont été arrêtés par la Gestapo à Annecy, le
20 janvier 15 . Ils devaient aller proposer au BCRA un
système d’écoute blind mis au point par Loncle.

    Dans le câble par lequel * Rex annonce cette catastrophe à Londres, il affirme que j’assure la