Alias Caracalla

Combat, m’a
confié que Frenay n’avait pas l’envergure pour exercer cette fonction. À plusieurs reprises, j’ai entendu
que son grade de capitaine était un handicap, même
dans la Résistance, pour briguer la fonction de
commandant en chef  : les officiers supérieurs ne
badinent pas avec la hiérarchie.

    N’osant demander à * Rex la raison de cet argument qui m’étonne dans la clandestinité, où les rangs
volent en éclats et où le caractère et le courage remplacent la compétence homologuée, je m’en étais
ouvert à Copeau. « Bien que * Charvet [Frenay] soit
“breveté”, me dit-il, son grade n’est pas assez prestigieux dans la Résistance pour commander à des
colonels ou à des généraux, même ceux de l’armée
d’armistice. »

    J’objectai que Leclerc et Kœnig, également capitaines, avaient obtenu à Londres des promotions
fulgurantes dues à leur mérite : « Alors pourquoi
pas * Charvet ? » Copeau éclata de ce rire malicieux
qui en fait un complice si proche : « Notre capitaine
a un problème : son intelligence. Quand tu le connaîtras, tu comprendras. »

    Dimanche 7 février 1943

     

    Rencontre * Rex- * Brumaire 16

    *Brumaire est arrivé le 27 janvier en zone sud par
l’opération qui a enlevé Manuel et * Frédéric. N’ayant
pu attendre * Rex à Londres, il lui avait fixé rendez-vous à l’adresse envoyée à Londres — chez
Mme Bedat-Gerbaut —, dès qu’il serait arrivé.

    Bidault a communiqué à * Rex quelques renseignements sur sa personnalité : les deux hommes avaient
passé le concours d’agrégation d’histoire ensemble ;Bidault avait été reçu premier devant * Brumaire.
Tout en étant des adversaires politiques ( * Brumaire
au Populaire , socialiste, et Bidault à L’Aube , démocrate populaire), tous deux ont soutenu les républicains espagnols, refusé Munich et choisi la
Résistance.

    Les positions fracassantes contre les anciens partis
prises à Londres par * Brumaire durant l’automne
de 1942 et publiées dans La Marseillaise (hebdomadaire de la France libre dirigé par François de
Quillici) ont été utilisées par Frenay et d’Astier à
leur retour pour torpiller le projet de Conseil de la
résistance de * Rex.

    Le patron s’attendait au pire. D’où sa surprise en
découvrant un homme charmeur. Selon le récit
qu’il en fait à Bidault le soir même, * Brumaire a
écouté attentivement et loué ses initiatives politiques.
Il n’a rien objecté à l’exposé de * Rex sur la nécessité de réintégrer les anciens partis au sein de la
Résistance, sous peine de les voir s’organiser indépendamment hors de la France libre, et peut-être
contre elle.

    *Brumaire a paru ébranlé par le danger représenté
par un Conseil de la Résistance, organisme représentatif, capable de concurrencer auprès des Alliés
les institutions de la France libre. Il a révélé à * Rex
que * Francis, * Froment et * Brémond avaient exposé
leur projet à de Gaulle après l’échecd’Anfa 17 .

    *Rex lui a expliqué qu’il reprenait à son compte
un projet de Frenay d’instituer un comité de coordination unique entre les deux zones, dont le siègeserait à Paris, et qui serait l’exécutif du Conseil de
la Résistance.

    *Brumaire a marqué son désaccord, parce que
l’évolution des mouvements est profondément différente dans les deux zones. Il a ensuite communiqué
à * Rex les informations de * Rémy selon lesquelles le
Front national en zone sud était bel et bien un
mouvement de résistance grâce aux FTP (Francs-Tireurs et Partisans), sa branche militaire. Ce que
*Rex a infirmé, *Gaston l’ayant assuré qu’ils n’étaient
que le groupe paramilitaire du parti communiste.

    Le patron a donc insisté sur sa volonté d’écarter
le Front national de cette représentation, estimant
qu’il ne fallait pas donner dans une manœuvre massive de noyautage. * Brumaire a alors raconté l’arrivée de Fernand Grenier à Londres en tant que
représentant officiel du parti communiste. L’accueil
sans réserve du général de Gaulle avait laissé croire
que le parti placerait ses troupes sous son commandement. Mais cette reconnaissance officielle des
communistes n’avait fait que stimuler les autres
représentants des partis présents à Londres, notamment Vallin (PSF), Philip (socialistes) et Antier
(Parti agraire et paysan français), qui réclamaient
le même traitement.

    En dépit de nuances et de certaines