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Alias Caracalla

Alias Caracalla

Titel: Alias Caracalla Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Daniel Cordier
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et à de Gaulle ?

    « Pour supporter les résistants, me dit-il, il faut
oublier que nous sommes des soldats. Eux sont des
patriotes à l’état sauvage. Heureusement, j’ai tout
de même réussi à former une bonne équipe.

    — C’est aussi mon cas. Ceux-là sont sans reproche, mais ils ne sont qu’une douzaine !

    — N’oublie jamais que les quarante millions
d’autres ont choisi Pétain comme chef pour stopper
la guerre et remettre leurs pantoufles. »

    Il me prodigue quelques conseils sur la sécurité à
Paris — zones à éviter (en général, les jardins sont
sûrs), précautions dans les transports (le métro est
commode, mais dangereux, à cause des fouilles inopinées), etc. — puis revient aux mouvements.

    « Les communistes se distinguent du lot. Seuls
les FTP sont prudents, à tel point qu’ils ne révèlent
jamais leurs boîtes. On ne peut les rencontrer que
tous les huit jours. Comme ils refusent la vérification de leurs “terrains” ou de leurs emplacements
radio, je n’ai jamais rien réussi pour eux. * Passy est
furieux parce qu’il y tient beaucoup. En les fréquentant, il a compris. Je te souhaite bien du plaisir ! »

    En me quittant, Ayral ajoute : « Surtout, n’oublie
pas : double six sous la tour Eiffel ! » Et il part en
courant presque, riant aux éclats.

    Ma journée achevée, je profite, pour flâner, de mes
derniers instants de liberté avant l’arrivée du patron.

    Je descends la rue du faubourg Saint-Honoré. Les
vitrines qui enchantaient ma mère conservent un
éclat. En dépit de la pénurie, je suis impressionné par
l’élégance des Parisiens, et surtout des Parisiennes.Il est vrai qu’après la grisaille lyonnaise, tout paraît
lumineux.

    Une foule compacte emplit les cafés des Champs-Élysées et du quartier de l’Opéra. Dans le contraste
radical avec ce que j’ai connu ces derniers mois, je
perçois un mélange de frivolité et d’effronterie à
l’égard des Boches. Ces derniers sillonnent les rues
en groupes et s’entassent avec nous dans le métro.
Ils envahissent les terrasses des cafés, les cinémas,
les restaurants, qui leur sont réservés. Partout, ils
sont chez eux.

    À Lyon, je pouvais croire qu’ils étaient de passage ; ici, nul doute, ils sont chez eux. Plus encore
que leur présence, ce sont leurs panneaux de signalisation en bois peint qui me choquent : ils imposent l’ordre teuton à la capitale.

    Mardi 30 mars 1943

     

    Pierre Kaan, mon ami

    Cinq jours après mon arrivée, je déjeune avec Kaan.
Après mon départ de Lyon, il a rencontré * Rex, qui
lui a demandé de s’installer à Paris. Il souhaite en
faire le secrétaire du CGE et du Comité de coordination nord. Il lui a recommandé de maintenir ses
contacts avec ses amis professeurs ou écrivains disponibles pour l’action.

    « Il m’a également demandé de maintenir un
contact quotidien avec vous », précise-t-il. Rien ne
peut me réjouir autant que cette relation de travail.

    Kaan a déjà rencontré quelques responsables des
mouvements parisiens : « La partie va être rude. Ilssont tous remontés contre * Rex, à commencer par
*Passy et *Brumaire. En réalité, c’est à l’emprise du
Général sur la Résistance qu’ils en ont. Ils sont persuadés que, sans eux, de Gaulle n’existerait pas !

    —  * Rex en a vu d’autre.

    — Certes, mais cette fois l’enjeu est risqué : à
Londres, le Général est isolé face aux Américains,
aux Alliés et aux vichystes ; en France, il est à la
merci des mouvements et des partis. À Alger, il est
interdit. La bataille pour le pouvoir sera rude. »

    J’essaie de le convaincre du contraire : depuis que
de Gaulle a refusé la démission de * Rex et lui a
manifesté sa confiance par l’octroi des pleins pouvoirs, j’ai la certitude qu’il est intouchable. Quels
que soient les obstacles, il atteint toujours les objectifs qu’il s’est fixés.

    Kaan ne semble pas convaincu : « Ici, les chefs
ont une autre forme d’indocilité. N’ayant pas effectué la fusion des mouvements, ils sont plus indépendants et ne doivent rien au Général.

    —  * Rex les mettra au pas. »

    Après la politique, nous abordons les liaisons
quotidiennes. Il m’indique qu’étant donné la jeunesse de mon équipe, le Quartier latin lui semble
un endroit idéal. Il habite lui-même non loin de
l’Observatoire et vit entre le boulevard Saint-Michel,
Saint-Germain-des-Prés et

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