Alias Caracalla
félicitons
vivement. »
Malheureusement, le câble envoyé par * Rex est
partiellement indéchiffrable et les noms des délégués
ne sont pas parvenus. Quand je pense au soin que
j’ai mis à ce codage, j’accuse la radio anglaise de ne
pas savoir écouter correctement notre meilleur opérateur, Maurice de Cheveigné.
Le plus scandaleux dans ce rapport concerne les
« collaborateurs pour vous assister » : « Cette question n’avance pas […]. Ne la perdons pas de vue,
comprenons vos difficultés et vos besoins. » Combien de câbles ont été expédiés par * Rex depuis son
retour réclamant de la manière la plus dramatique
l’envoi de collaborateurs ! Je suis indigné par ces
deux lignes.
Il est impossible que Londres n’ait pas conscience
de la terrible solitude de * Rex face à des problèmes
de plus en plus graves qu’il ne peut résoudre seul.
Je ne peux m’empêcher d’y voir un complot.
Parmi d’autres remarques, l’une me révolte plus
que toutes les autres, avant de me faire rire : « Les
mouvements se déclarent à même de fournir des
opérateurs [radio] ; il importe que Rex profite de
ces bonnes volontés. » Je me revois il y a un an lorsque, à Lyon, les mouvements lui avaient fait une
déclaration identique le jour de mon installation,
avant de manifester une impuissance chronique…
Dimanche 20 juin 1943
Préparation du retour de * Rex
Déjeunant avec Pierre Kaan pour organiser la
prochaine réunion à Paris des deux comités de
coordination, je lui explique l’espoir du patron de
convaincre les chefs des mouvements de reconsidérer leur hostilité à l’égard de la Commission permanente.
*Rex souhaite faire adopter la forme de direction
qu’il a proposée à Londres, en leur rappelant ce qu’ils
ne semblent pas avoir compris. Il a toujours répété,
depuis son rapport de décembre 1942, que la direction de la Résistance appartient aux seuls mouvements. Ce sont donc eux, et eux seuls, qui constituent
le Comité directeur du Conseil de la Résistance.
Depuis qu’il a proposé de réunir les deux comités
de coordination à Paris, * Rex se propose de les intégrer au CNR sous la forme d’un exécutif du Conseil,
remplaçant la Commission permanente qu’il avait
prévue. Il est bien conscient que la manœuvre est
délicate, surtout après le départ de Frenay à Londres.
*Rex a convaincu les « seconds » de la zone sud
du bien-fondé de cette institution, qui favorisera la
direction de la Résistance par les seuls mouvements
en reléguant les partis dans le domaine politique.
Il espère obtenir le même consentement des mouvements de zone nord.
Je répète mot à mot à Kaan les propos de * Rex :
« De plus entêtés qu’eux ont fini par céder ! N’oubliez
pas que l’avantage d’une démocratie est que la majorité devient exécutoire. »
Je lui communique ensuite les ordres de * Rex pour
contrer les communistes. Il garde le silence, puis se
confie : « J’exécuterai ses ordres à la lettre. Mais
*Rex me semble entreprendre simultanément deux
opérations délicates. Alors que ses adversaires
sont distincts, il risque de se retrouver face à une
coalition. »
En dépit de mon amitié pour Kaan, je bondis
pour défendre le patron : « Vous ignorez de quoi il
est capable ! » Surpris, il acquiesce tout en marquant sa réserve : « Bien sûr ! Mais ce n’est pas
évident. »
Nous passons aux tâches concrètes de l’organisation de la réunion du 24, à laquelle doivent participer neuf personnes. Kaan me montre le texte qu’il
vient d’envoyer aux membres des comités de coordination. Il m’explique que le représentant du CGE
a insisté pour faire un exposé ce jour-là, ce qui fait
une double séance.
Cela me paraît trop long : « Je ne suis pas d’accord ;
ce sont deux sujets différents. L’urgence est de tenir
la première réunion officielle des deux groupes sous
la présidence de * Rex afin de constituer un seul
comité. Il doit s’imposer en présidant les deux
comités et en fixant l’ordre du jour. »
Lundi 21 juin 1943
Que dire au patron ?
Les longues journées de ce solstice d’été rendent
Paris plus séduisant. Seul, je dîne tôt, car j’ai du
travail à exécuter chez moi. Je veux réfléchir avant
le retour de * Rex à ce que je dois lui dire à propos
du travail que j’exécute.
Le besoin de lui expliquer ce que je pense est
apparu il y a trois mois,
Weitere Kostenlose Bücher