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Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Titel: Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain-Gilles Minella
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réinstaller un pouvoir central fort. L’Église anglaise ? Elle a soutenu la cause d’Henri. Indéniablement, c’est elle qui a amené Étienne à accepter l’adoption de son jeune rival. Malgré tout, on peut douter du désintéressement de son enthousiasme. Elle a profité de la situation créée par la période de chaos social pour acquérir un poids politique considérable que les nouveaux souverains ne manqueront pas de vouloir brider. Il va lui falloir négocier et elle sait qu’elle devra abandonner certaines de ses prérogatives. Elle ne l’envisage pas de gaieté de cœur et a bien l’intention de se défendre avec acharnement en « monnayant » son soutien affiché et efficace des dernières années.
    À peine la cérémonie terminée, Henri publie une charte par laquelle il indique ses intentions avec netteté : « Henri, par la grâce de Dieu roi d’Angleterre, duc de Normandie et d’Aquitaine et comte d’Anjou, à tous ses comtes, barons et fidèles français et anglais, salut. Sachez que, à l’honneur de Dieu et de la Sainte Église, et pour le commun amendement de tout mon royaume, j’ai concédé et rendu, et par ma présente charte confirmé à Dieu et à la Sainte Église et à tous mes barons et comtes et à tous mes hommes, toutes les concessions et donations, libertés et libres coutumes que le roi Henri mon aïeul leur a données et concédées. Semblablement encore, je fais rémission et concède abolition, pour moi et mes héritiers, de toutes les mauvaises coutumes qu’il a abolies et remises. C’est pourquoi, je veux et prescris fermement que la Sainte Église et tous les comtes et barons et tous mes hommes aient et tiennent toutes ces coutumes et donations et libertés et libres coutumes librement et tranquillement, bien et en paix intégralement, de moi et de mes héritiers, pour eux-mêmes et leurs héritiers, aussi librement et tranquillement et pleinement en tout que le roi Henri mon aïeul les leur a données et concédées et confirmées par sa charte. Témoin : Richard de Lucé, à Westminster. »
    Le message est clair. Tout ce qui a été fait, donné, concédé, pendant le règne d’Étienne de Blois, est nul et non avenu. On revient au statu quo ante, c’est-à-dire au règne d’Henri Beauclerc. Henri II affirme la validité de sa filiation, la légitimité de ses droits à occuper le trône et se place comme le successeur direct de son grand-père. On efface Étienne, et par la même occasion… Mathilde. Le cours de l’histoire anglaise reprend là où il s’était arrêté : fin de la parenthèse !
    Le nouveau roi indique les règles du jeu. Bien sûr il va y avoir négociations – Henri et Aliénor sont suffisamment fins pour savoir que les « nobliaux » et le clergé ne vont pas se laisser faire facilement – mais elles se feront selon la charte. Et la fermeté du ton montre que le nouveau roi est déterminé et qu’il saura être également ferme dans ses actes, si besoin est.
    *
    Pour le Noël de l’année 1154, les souverains anglais séjournent au prieuré de Bermondsey, un village situé sur la rive gauche de la Tamise. Un unique pont en bois relie cette cité à Londres. Des fenêtres du château, on distingue clairement les appontements de l’autre côté du fleuve et le va-et-vient incessant des dockers qui chargent et déchargent des marchandises venues de toute l’Europe. Au moment où Henri et Aliénor prennent possession de la ville, celle-ci est en pleine mutation. Un incendie, en 1136, avait fait des ravages considérables, détruisant la plus grande partie des maisons en bois et en torchis. La ville a été reconstruite en « dur » , murs de briques et de pierre, toits de tuiles. On commençait maintenant à paver les ruelles. Selon les conceptions urbanistiques du moment, ces ruelles étaient légèrement incurvées avec au centre une rigole par où s’évacuaient vers le fleuve toutes les immondices ; en marchant sur les côtés on évitait de se salir mais on n’évitait pas les odeurs. Londres, comme la plupart des villes de l’époque, puait !
    Avec une population approchant des quinze mille habitants, Londres est la cité la plus peuplée du nord de l’Europe. Protégée par de hauts murs percés de six portes, la ville déploie une intense activité commerciale autour de son port. On y débarque de la laine et des toisons de Flandres et d’autres produits venus de très loin – les marchands anglais,

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