Amy, ma fille

brisait le cœur. Elle qui avait toujours eu beaucoup d’amis et une vie sociale riche, voilà qu’elle se retrouvait toute seule. Heureusement, j’ai réussi à lui changer les idées grâce à mes souvenirs d’enfance et mes « mitchellismes », qui ont fini par la faire rire.
    Je lui ai raconté qu’après la mort de mon père, un de ses amis, Sammy Soroff, était venu me voir en disant : « Je viens chercher l’argent que ton père me devait. » Je ne savais pas de quoi il voulait parler. « Alec et moi, on est allés dans le Nord pour des affaires et c’est moi qui ai tout payé. Il ne m’a jamais remboursé. Je veux mon argent. » J’ai commencé à m’inquiéter. Comment allais-je le rembourser ? Je lui ai promis de payer. Et à ce jour, je lui dois encore cet argent.
    Amy a été fascinée par mon histoire.
    — Combien tu lui dois, papa ? Je peux te donner l’argent.
    — Oh, une quarantaine de livres, ai-je répondu en riant.
    Et elle s’est mise à rire aussi.
    Elle avait besoin de changer d’air pour reprendre confiance en elle. Je savais que toute la famille serait soulagée de la voir quitter Camden Town, et quelques jours plus tard, j’ai commencé à lui chercher un nouvel appartement. J’en ai vu de jolis, en proche banlieue, à Rickmansworth, Hemel Hempstead et Hadley Wood. Mais Amy se demandait comment elle allait se procurer du Subutex là-bas.
    J’ai prévenu Raye qu’Amy ne serait peut-être pas en mesure de chanter au V Festival, mais nous avons décidé d’attendre le dernier moment pour prendre une décision. Raye avait également reçu une proposition de concert à Rio pour le jour de l’an.
    — Pour l’instant, elle refuse de quitter Camden, ai-je répliqué. Comment veux-tu qu’on l’envoie à Rio ?
    Finalement, Raye l’a persuadée de participer au V Festival. Elle est montée sur scène avec une demi-heure de retard mais s’en est très bien sortie. Le lendemain, elle est arrivée une fois de plus en retard sur scène, mais d’après Raye, le public lui a fait un triomphe. Il l’a trouvée exceptionnelle ce soir-là et a jugé qu’elle avait repris les choses en main. En voyant ce concert à la télé, j’ai trouvé quant à moi sa prestation plutôt moyenne.
    Quand elle est retournée à Prowse Place, les éternels problèmes sont réapparus. Elle avait peur de sortir, si bien que le docteur Tovey devait se déplacer pour lui prescrire son Subutex à domicile. Un jour, alors qu’elle avait prévu de se rendre à la gym, elle n’a pas trouvé le courage d’y aller. Son état psychologique s’aggravait de jour en jour. Ses docteurs, pour la plupart, avaient arrêté de se soucier d’elle puisqu’elle ne les écoutait pas. Je commençais à perdre confiance en son traitement ; il nous fallait de nouvelles idées, de nouvelles méthodes. J’ai demandé conseil autour de moi.
    Ajoutons qu’Amy s’était brouillée avec bon nombre de ses amis. Ceux qui ne trempaient pas dans la drogue ne la soutenaient plus et ne l’encourageaient pas à poursuivre son traitement au Subutex, qui fonctionnait pourtant bien. Une fois de plus, nous ne défendions pas la même approche.
    Par-dessus le marché, j’ai découvert qu’au cours des derniers mois, Amy avait retiré sept mille livres sur son compte. J’étais sûr que cet argent payait la drogue ; à quoi d’autre pouvait-il servir ? J’essayais de me convaincre qu’elle avait remboursé une vieille dette, jusqu’à ce qu’Andrew m’informe qu’un nouveau dealer était venu chez elle. J’ai écrit dans mon journal : « J’ai peur qu’Amy ait repris la drogue. C’est reparti. »
    Nous pouvions nous débrouiller pour bloquer son compte en banque, mais si elle voulait de la drogue, elle trouverait un moyen de s’en procurer. J’ai fini par lui dire les choses en face. Elle est entrée dans une colère noire avant de reconnaître qu’elle avait remboursé les dettes de quelques amis. Elle m’a assuré que cela ne se reproduirait pas.
    Il restait toujours le problème des concerts. Elle avait trois dates prévues alors qu’elle devait se concentrer sur son prochain album. La première date était en France. Raye a réussi à la faire sortir de la maison et ils étaient dans l’Eurostar quand Blake l’a appelée pour lui dire d’annuler. Apparemment, elle faisait tout ce qu’il lui demandait. Il l’a convaincue qu’on la forçait à donner ce concert et qu’elle devait