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Antidote à l'avarice

Antidote à l'avarice

Titel: Antidote à l'avarice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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laquelle ils mirent beaucoup de sentiment. Puis Felip joua un accord joyeux, et tous deux se lancèrent dans une chanson au comique bon enfant qui parlait de séparation et de retrouvailles. La voix de baryton de Felip n’était pas aussi précise que celle d’Andreu, mais elle avait une sonorité agréable, et tout le groupe riait de bon cœur aux dernières notes.
    — Voilà, Votre Excellence, comment nous gagnons notre vie sur la route, dit Andreu.
    — Vous êtes musiciens de profession ? lui demanda l’évêque.
    — Oh, non, Votre Excellence. Mais nous chantons et jouons indifféremment, et sommes heureux de le faire quand quelqu’un se montre assez généreux pour partager son repas avec nous.
    — Nous ferez-vous la faveur d’une ou deux autres chansons ? Vous nous apportez un délassement bienvenu après la monotonie du chemin.
     
    Les compliments des auditeurs marquèrent la fin de la chanson. Les deux hommes engloutirent un peu de vin pour humecter leur gorge sèche.
    — Où votre soif de connaissance vous conduira-t-elle demain, messieurs ? demanda Berenguer.
    — Le plus loin possible sur la route de Barcelone tant que la nuit ne nous contraint pas à faire halte, répondit Andreu.
    — Je vous suggère de vous joindre à nous, proposa l’évêque. Vos chansons et votre joyeuse conversation adouciraient considérablement notre voyage et, en retour, vous voudrez bien partager notre humble nourriture.
    — Nous en serions honorés, dit Felip.
    — Et rien ne nous ferait plus plaisir, ajouta Andreu.
     
    Au pied de l’escalier, l’intendant avait l’air d’un cerf aux abois face à l’abbesse de Sant Daniel, de Sor Marta et de Sor Agnete, la pécheresse. Le garde assigné à sa surveillance nocturne était impassible.
    — Ce n’est pas une prison, madame, dit l’intendant. Nous n’avons pas coutume d’enfermer nos hôtes dans leur chambre.
    — Que cela soit la coutume ou pas m’importe peu, répliqua l’abbesse. Est-ce possible ?
    — Certes, fit l’intendant après un temps de réflexion, c’est possible, mais il nous faut loger tant de personnes que la seule chambre où elle pourrait être seule n’est pas digne d’une dame de son rang.
    — Elle se pliera au manque de commodités, trancha l’abbesse. Le garde se tiendra dehors avec la clef.
    Sur ce, elle tourna les talons et regagna ses propres appartements, suivie de près par Sor Marta.
    — Ce ne sera pas la première nuit que je passe adossé à un mur, dit le garde avec philosophie.
    — Je vais vous apporter une couche qui vous protégera du froid et de la dureté de la pierre, murmura l’intendant.
     
    — Pourquoi avez-vous incité ces deux-là à voyager avec nous ? demanda Francesc alors qu’ils se dirigeaient vers leur logement.
    — Oui, Votre Excellence, ajouta Bernat. C’est la question que je désirais vous poser. Je ne leur fais pas confiance. Pas entièrement.
    — Vous pensez qu’ils constituent une menace à notre égard ?
    — Non, je ne dirais pas une menace, mais ce sont, dans le meilleur des cas, des jongleurs et des baladins qui ont appris à bien manier le langage.
    — Pour ma part, dit l’évêque, je crois qu’il est peu probable qu’ils nous soulagent de notre bourse. Ils me semblent relativement inoffensifs et ce ne sont que des gagne-petit. Dans le pire des cas, ils s’adonnent peut-être à quelque filouterie, mais c’est totalement sans danger. Leurs talents valent bien le prix de leurs repas. Avez-vous remarqué ce qu’il est advenu de notre groupe quand ils se sont mis à chanter ?
    — Il ne s’est rien passé, dit Bernat. Tous les ont écoutés et, plus tard dans la soirée, certains ont même chanté avec eux. C’était prévisible.
    — C’est pourquoi je les ai invités à se joindre à nous. Je n’aime pas me déplacer avec un groupe où l’on est à couteaux tirés. Cela contribue à rendre le voyage lassant, pour ne pas dire dangereux. Même les serviteurs chantaient de concert au lieu de se jeter des regards noirs. Bonne nuit, mes amis. Dieu vous apporte la paix du sommeil.
     
    La pluie s’abattit jusqu’à l’aube sur le toit du château. Le vent faisait claquer les volets et hurlait dans les cheminées. Rares furent ceux qui dormirent bien. Le garde posté devant la chambre de Sor Agnete y parvint pourtant : avec une longueur de corde, il s’était attaché les poignets à la porte verrouillée et s’était ensuite installé pour

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