Apocalypse
immédiatement.
— Je vous ai dit que j’avais trouvé quelque chose, mes amis. Quand on compare le dessin et le tableau, il y a une autre différence, outre le personnage en moins et l’inscription. Les bords du dessin sont noircis et présentent un aspect crénelé, irrégulier. Au début, je croyais que c’était une altération de l’esquisse ou une ombre sur la photo. Maintenant, regardez à nouveau le bas-relief de l’église où Marie Madeleine est agenouillée dans une grotte. La clé est là. Le dessin, à la différence du tableau, nous indique que l’on voit le tombeau et les personnages depuis l’ouverture d’une grotte. Là où serait censé se trouver le peintre. Le tombeau n’est qu’un leurre. C’est la caverne qui est l’élément central.
Antoine s’assit à côté de lui, la fatigue en lui était toujours présente, mais l’excitation le réveillait.
— Il y a beaucoup de grottes dans la région ?
— Oh oui, un vrai gruyère ! La colline de Rennes est truffée de catins et les montagnes aux alentours aussi. On pourrait passer des centaines d’années à arpenter les environs, on serait encore loin du compte. En revanche…
Le regard du marquis s’illuminait à nouveau.
— La coïncidence avec le tombeau dont je vous ai parlé est plus que troublante. Pourquoi quelqu’un s’est-il amusé à construire la réplique du tombeau de Poussin au début du XX e siècle ? J’ai repensé à ce que vous m’aviez dit sur la famille juive qui possédait le dessin.
Cécile s’était approchée d’Antoine et lui avait passé la main sur l’épaule. Il la laissa faire. De Perenna désigna sur l’étagère un livre à la fine reliure rouge.
— Je possède un opuscule sur les familles propriétaires de terrains dans la région. Et devinez quel est le nom de celle qui possédait le terrain sur lequel était le tombeau ? Lévy.
Antoine se souvint des paroles de la vieille dame. Elle ne lui avait jamais parlé de l’endroit exact où se trouvait la villa de sa famille. Seulement du trajet pour aller à Rennes-le-Château qui prenait une vingtaine de minutes. Il n’y avait pas prêté attention. Il fronça les sourcils.
— Elle m’aurait parlé du tombeau si elle l’avait vu quand elle était jeune. Elle aurait fait le rapprochement avec le dessin de Poussin.
— Pas forcément, je connais cet endroit et je vois très bien la maison du propriétaire, le lieu où se trouvait le tombeau en est éloigné, à un kilomètre, pas plus.
— Puisque vous connaissez le coin, il y a des grottes sur la propriété ?
— Non, répondit le noble, mais attendez…
Il se leva et alla chercher le livre rouge dans la bibliothèque.
— C’est bien ça ! Selon la tradition, la maison a été construite sur les ruines d’une ancienne ferme bâtie par des moines. Elle reposerait sur une cavité naturelle, utilisée au Moyen Âge pour entreposer des vivres pendant les invasions des soudards venus d’Aragon, qui ravageaient le pays. Regardez.
Deux dessins au fusain étaient représentés. La première gravure montrait des moines qui effectuaient des travaux domestiques devant un corps de bâtiment ressemblant à une ferme fortifiée. La seconde illustration présentait l’entrée d’une grande cave voûtée remplie de tonneaux et de barriques.
— Lisez le passage sous le deuxième dessin, il y est indiqué le nom du lieu, ajouta l’érudit.
Antoine et Cécile prirent l’ouvrage. La jeune femme poussa une exclamation.
— C’est dingue !
Marcas croisa les bras, décontenancé. Le nom était sans équivoque.
Arca Nigla.
— Arca fait référence à la commune d’Arques, où se trouvait la ferme mais c’est aussi la traduction occitane du mot arche. Quant à Nigla …
— L’Arche de l’Apocalypse, articula Marcas.
Antoine se leva brusquement. Il repensa à Hannah qui avait vécu deux brèves années dans cette maison, juste au-dessus de ce qui pouvait subsister d’un très ancien secret. Le père, ami de l’abbé Saunière, confident de la servante, Marie Dénarnaud, en avait été le gardien. Et l’ultime détenteur.
Ils entendirent un cri qui venait du rez-de-chaussée et levèrent la tête. Un gémissement suivit.
— Vous avez entendu ? dit Cécile avec inquiétude.
— Oui, il y a quelqu’un d’autre dans cette maison ? demanda Antoine.
— Non. À part Gisèle, la cuisinière. J’espère qu’elle n’est pas tombée dans la cave,
Weitere Kostenlose Bücher