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Au bord de la rivière T4 - Constant

Au bord de la rivière T4 - Constant

Titel: Au bord de la rivière T4 - Constant Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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ancienne chambre du rez-de-chaussée, au grand déplaisir d’Eugénie.
    Le lendemain matin, Bernadette, un peu inquiète, n’avait pas encore osé ajouter le nom de sa nouvelle élève. Après avoir allumé le poêle, elle accueillit les enfants autour de huit heures. Ann fut parmi les premières à se présenter et il était évident qu’elle était ennuyée d’être l’objet de cette dispute. Elle aurait tout donné pour rester à la maison, mais ses parents ne lui avaient pas laissé le choix. Selon eux, elle avait le droit de fréquenter l’école.
    La classe était commencée depuis près d’une heure quand le bon gros curé Fleurant fit son apparition à la petite école du rang, comme il le faisait habituellement chaque semaine, pour vérifier la qualité de l’enseignement du catéchisme.
    — Vous en faites pas, mademoiselle Beauchemin, murmura-t-il à l’institutrice, je vais rester jusqu’à l’arrivée de l’inspecteur. D’ailleurs, il aurait dû me faire une courte visite de politesse hier, ce que je vais lui mettre sous le nez.
    Quand Charlemagne Ménard vint s’arrêter devant l’école, se sachant probablement épié par l’institutrice, l’homme prit tout son temps pour descendre de voiture et venir frapper à la porte. Il sembla pour le moins surpris de découvrir le prêtre déjà installé derrière le bureau de l’enseignante à son entrée dans la petite maison blanche. Il n’en remarqua pas moins la présence d’Ann Connolly et son visage se ferma immédiatement.
    — Excusez-moi, monsieur le curé, j’ignorais que vous deviez passer à l’école ce matin, dit-il au prêtre en déboutonnant son manteau.
    — Si vous vous étiez arrêté hier pour me saluer au passage, lui fit sèchement remarquer Félix Fleurant, je vous l’aurais dit.
    L’inspecteur se rebiffa un peu sous la réprimande, mais le curé n’en tint aucun compte.
    — Mademoiselle Beauchemin, dit-il en se tournant vers l’institutrice, pourriez-vous devancer de quelques minutes la récréation des enfants ? J’aimerais régler avec vous et monsieur l’inspecteur un petit problème.
    Bernadette obéit et les élèves s’habillèrent et sortirent pour aller jouer dans la cour de l’école malgré la neige qui tombait dru. Dès que le dernier eut franchi la porte, le visage du prêtre se fit plus sévère.
    — J’aimerais bien savoir, monsieur Ménard, où c’est écrit dans les règlements qu’un élève est trop âgé pour fréquenter l’école, apostropha-t-il l’inspecteur.
    — Mais, monsieur le curé, c’est le simple bon sens qui le dit, se défendit l’autre.
    — Ah oui ! fit semblant de s’étonner l’ecclésiastique au tour de taille imposant.
    — C’est évident qu’une fille de presque seize ans a pas sa place au milieu d’enfants.
    — Je suppose que c’est ce que je devrai écrire à monseigneur pour lui raconter toute cette affaire, reprit le curé de Saint-Bernard-Abbé, sur un ton sarcastique. J’ignore si je me trompe, mais ça me surprendrait qu’il soit de votre avis, monsieur. Il va sûrement se demander de quoi vous vous mêlez. Il me semblait qu’il avait uniquement chargé les inspecteurs des écoles du diocèse de voir à la qualité de l’enseignement qui y était donné… Est-ce que je fais erreur ?
    — N… non, monsieur le curé, balbutia Charlemagne Ménard qui avait perdu toute sa superbe.
    — Est-ce que je dois comprendre qu’Ann Connolly peut fréquenter l’école, même si elle a quinze ans ?
    — Si vous y tenez, monsieur le curé, se résigna le fonctionnaire.
    — C’est parfait, conclut le curé de Saint-Bernard-Abbé. En passant, j’espère que vous ne ferez pas de rapport défavorable à mademoiselle Beauchemin.
    — Non.
    — Si on y pense bien, elle mériterait plutôt des éloges pour avoir donné des travaux à Ann Connolly et les avoir corrigés depuis quatre mois alors que celle-ci ne pouvait fréquenter l’école.
    — Bien sûr, admit piteusement le vieil inspecteur.
    — Je suis très content de voir que nous nous comprenons bien et que nous partageons les mêmes vues, monsieur Ménard, fit le prêtre avec un large sourire. Venez donc dîner au presbytère ce midi. Nous pourrons faire plus ample connaissance.
    Sur ces mots, Félix Fleurant endossa son manteau, coiffa son bonnet de raton laveur, salua l’inspecteur et l’institutrice et quitta les lieux. Charlemagne Ménard, la mine déconfite,

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