Au bord de la rivière T4 - Constant
dirigea vers la porte qu’elle ouvrit toute grande pour aérer la pièce. L’air était beaucoup plus frais que la veille, pour sa plus grande satisfaction.
Elle sursauta à la vue du centre de la cour transformé en un lac d’où émergeaient de nombreuses branches d’arbre. Elle poussa la porte moustiquaire et sortit sur la galerie d’où les chaises berçantes avaient disparu. Elle les aperçut plaquées contre la balançoire en bois renversée.
— Sainte bénite, on va bien en avoir pour une semaine à remettre tout d’aplomb ! murmura-t-elle en regardant tous les déclins de cèdre arrachés des toits des bâtiments.
Elle rentra et alluma le poêle pour faire bouillir le thé en marmonnant.
— Êtes-vous rendue que vous vous parlez toute seule ? lui demanda Donat en se grattant le cuir chevelu.
— À matin, il y a de quoi, répondit sa mère. Attends de voir tous les dégâts que cet orage-là a faits.
Ernest pénétra dans la pièce, alla prendre une tasse dans l’armoire et la tendit à sa patronne pour qu’elle y verse du thé.
— Il est pas encore prêt, lui dit Marie.
— L’orage t’a pas réveillé ? lui demanda Donat.
— Oui, reconnut l’adolescent, mais je me suis rendormi presque aussitôt.
— Eh bien, on peut dire que t’es pas trop nerveux, toi, laissa tomber Marie.
Bernadette, les traits tirés par le manque de sommeil, pénétra dans la cuisine d’été en portant Alexis dans ses bras.
— Il était en train de réveiller Eugénie, expliqua-t-elle en le déposant sur le siège d’une chaise berçante.
Quelques minutes plus tard, Donat, Ernest et Bernadette chaussèrent leurs bottes et quittèrent la maison. La pluie continuait et le brouillard commençait à se lever. Il y avait partout des branches de différentes grosseurs arrachées par le vent.
Avant de se diriger vers les bâtiments, ils allèrent récupérer les chaises berçantes sur le terrain et ils redressèrent la balançoire.
— Torrieu ! on a un vrai lac au milieu de la cour, s’exclama Donat en contournant la grande mare laissée par la pluie pour vérifier si le toit avait beaucoup souffert des vents violents qui avaient soufflé durant plusieurs heures.
Il ne manquait que quelques bardeaux de cèdre qu’il faudrait remplacer.
— Va chercher les vaches pendant que je prépare les affaires, ordonna-t-il à Ernest avant de se diriger vers l’étable.
L’homme engagé prit la direction du champ où les bêtes avaient passé la nuit pendant que Bernadette allait nourrir les porcs et les poules. Donat venait à peine de finir de récurer un bidon de lait qu’il vit revenir Ernest un peu essoufflé.
— Monsieur Beauchemin, je pense que vous êtes mieux de venir voir dans le champ, dit-il à son patron.
— Qu’est-ce qu’il y a ? fit Donat, agacé.
— Vous avez perdu une vache et son veau. Il y a un arbre qui est tombé sur eux autres.
— Ah ben, maudit torrieu ! jura le fils de Baptiste Beauchemin. Il manquait plus que ça !
Il suivit Ernest dans le champ et ne put que constater le fait. La foudre avait frappé l’érable sous lequel la bête et son veau avaient trouvé refuge. L’arbre les avait écrasés.
— Il fallait, en plus, que ce soit celle qui nous donnait le plus de lait, ragea Donat en aidant son employé à rassembler les autres bêtes.
Quand ils rentrèrent à la maison après le train, on fit le bilan des dégâts causés par l’orage de la nuit précédente en mangeant l’omelette au lard cuisinée par Marie.
— Là, on en a au moins pour deux ou trois jours avant de se remettre d’aplomb, déclara Donat. La première chose à faire, ça va être de creuser une fosse pour enterrer notre vache et notre veau après leur avoir enlevé la peau. Après, il va falloir s’occuper des couvertures. Il manque des bardeaux autant sur le toit de la maison que sur celui de l’étable et de la grange.
— Nous autres, on va s’occuper de nettoyer la cour, annonça Bernadette. Il y a des branches partout. On va les mettre près du four.
— Il faudrait bien aller voir chez Camille, Emma et Xavier s’ils ont pas trop de dommages, intervint Marie, l’air préoccupé.
— Inquiétez-vous pas, m’man, je vais aller voir tout de suite après le déjeuner, la rassura son fils. Pendant ce temps-là, Ernest va pouvoir commencer à creuser la fosse sur le bord de la décharge.
Après le repas, Donat attela la Noire au boghei, tourna à gauche en
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