Au Coeur Du Troisième Reich
petite pour nous. Nous en construirons une autre tout à côté ; prévoyez-la pour 1 200 députés 1 ! » Cela supposait un peuple d’environ 140 millions d’hommes ; Hitler montrait par là dans quel ordre de grandeur il se situait. Il envisageait, d’une part, un rapide accroissement démographique de l’Allemagne, et, d’autre part, l’incorporation d’autres peuples germaniques ; était exclue la population des nations asservies, auxquelles il ne reconnaissait pas le droit de vote. Je proposai à Hitler d’augmenter tout simplement le nombre des voix que chaque député devrait réunir sur son nom, ce qui permettrait de conserver la salle des séances de l’ancien Reichstag. Mais Hitler ne voulait pas modifier le chiffre de 60 000 voix par député, hérité de la république de Weimar. Il n’en donna pas les raisons, mais n’en démordit pas, de même que, pour la forme, il maintenait le système électoral traditionnel, avec ses élections à date fixe, ses bulletins de vote, ses urnes et son vote à bulletin secret. Sur ce plan, il voulait manifestement maintenir une tradition qui l’avait porté au pouvoir, bien qu’elle eût perdu toute importance depuis qu’il avait introduit le système du parti unique.
Les édifices qui devaient entourer la future « place Adolf-Hitler » étaient situés à l’ombre du Grand Dôme, d’un volume cinquante fois supérieur à celui du bâtiment destiné à la représentation populaire, comme si Hitler avait voulu démontrer, jusque dans les proportions, le peu d’importance de ladite représentation. Dès l’été 1936 2 , il avait décidé de faire établir les plans de ce dôme. Pour son anniversaire, le 20 avril 1937, je lui en remis les vues, plans et coupes, ainsi qu’une première maquette. Il fut enthousiasmé, me reprochant uniquement d’avoir porté au bas des plans la mention : « Établi d’après les idées du Führer. » Car c’était moi l’architecte, me dit-il, et il fallait accorder plus de valeur à ma contribution qu’à son ébauche de 1925. Mais on en resta à cette formule et il est probable que mon refus de revendiquer la paternité de son édifice le satisfit. On fabriqua, d’après les plans, des maquettes partielles, et en 1939 furent achevées la maquette de l’extérieur, haute de près de trois mètres, et la maquette de l’intérieur. Elles étaient en bois et exécutées avec la plus grande précision ; on pouvait en retirer le fond pour examiner, à hauteur de regard, l’effet que produirait l’intérieur de l’édifice. Hitler ne manquait jamais, à chacune de ses nombreuses visites, de se laisser griser pendant un long moment par la contemplation de ces deux maquettes ; ce qui, quinze ans auparavant, avait pu paraître à ses amis un extravagant jeu de l’esprit, il pouvait maintenant le montrer triomphalement : « Qui me croyait quand je disais que ce serait un jour construit ! »
Le plus grand de tous les halls de réunion jamais conçus ne comportait qu’une seule salle, mais elle pouvait contenir 150 000 à 180 000 auditeurs debout. A la vérité, bien qu’il refusât d’adhérer aux idées mystiques de Himmler et de Rosenberg, Hitler n’en faisait pas moins construire là un édifice cultuel qui devait, au cours des siècles, acquérir, grâce à la tradition et au respect dont il serait entouré, une importance analogue à celle que Saint-Pierre de Rome a prise pour la chrétienté catholique. Sans cet arrière-plan cultuel, toutes les dépenses engagées pour cette construction, dont Hitler voulait faire le centre de Berlin, auraient été absurdes et incompréhensibles.
L’intérieur circulaire avait un diamètre de 250 mètres, ce que l’imagination a peine à se représenter ; la gigantesque coupole, dont la courbure légèrement parabolique prenait naissance à 98 mètres du sol, s’élevait à une hauteur de 220 mètres.
En un certain sens, nous nous étions inspirés du Panthéon de Rome. La coupole de Berlin devait avoir, elle aussi, une ouverture circulaire pour laisser passer la lumière ; mais cette ouverture, à elle seule, avait undiamètre de 46 mètres, dépassant ainsi celui de toute la coupole du Panthéon (43 mètres), et du dôme de Saint-Pierre (44 mètres). Le volume intérieur faisait dix-sept fois celui de la basilique Saint-Pierre.
L’intérieur du bâtiment devait être très simple d’aspect. Entourant un plan circulaire de 140
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