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Au Coeur Du Troisième Reich

Au Coeur Du Troisième Reich

Titel: Au Coeur Du Troisième Reich Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Lemay , Albert Speer , Michel Brottier
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Un portail s’ouvrit. Je fus introduit quelques instants dans la salle intérieure de l’aile cellulaire que j’avais vue quelques semaines auparavant dans le journal, mais, à peine étais-je entré que je me retrouvai à nouveau enfermé dans une cellule. Dans la cellule d’en face, Göring regarda par le guichet  1 en hochant la tête. Un sac de paille, de vieilles couvertures en loques, personne pour s’occuper du prisonnier. Bien que les quatre étages aient été pleins, il régnait un silence inquiétant, seulement rompu de temps à autre par une porte qu’on ouvrait pour conduire un prisonnier à l’interrogatoire. Je vis Göring, mon vis-à-vis, aller et venir sans arrêt dans sa cellule. J’apercevais à intervalles réguliers une partie de sa masse imposante passer devant le guichet. Je ne tardai pas, moi non plus, à me promener dans ma cellule, d’abord de long en large puis, pour mieux utiliser l’espace, en tournant en rond.
    Au bout d’une semaine, pendant laquelle, me laissant dans l’incertitude totale, on ne m’avait pas accordé la moindre attention, se produisit un changement, modeste pour un homme normal, mais pour moi très important : on me transféra au troisième étage : les cellules, exposées au soleil, y étaient plus agréables et les lits meilleurs. C’est là que je reçus la première visite du directeur de la prison, le colonel américain Andrus. Déjà à Mondorf, il s’était, comme commandant du camp, montré d’une extrême sévérité, aussi crus-je percevoir quelque chose comme du sarcasme dans son very pleased to see you ! par lequel il me souhaita la bienvenue. En revanche, j’eus plaisir à retrouver un personnel allemand. Tous, cuisiniers, serveurs, coiffeurs, étaient des prisonniers de guerre soigneusement choisis. Mais précisément parce que, de toute évidence, ils avaient fait la douloureuse expérience de la captivité, ils se montrèrent, quand personne ne nous surveillait, toujours prêts à nous aider. Ils nous soufflaient ainsi dans un imperceptible murmure telle ou telle nouvelle parue dans le journal ou de nombreux souhaits et encouragements.
    En rabattant la partie supérieure de la fenêtre de ma cellule, pourtant haut placée, la tache de soleil était assez grande pour que je puisse exposer le haut de mon corps Étendu par terre sur quelques couvertures, je changeais de place au fur et à mesure que le soleil tournait, et ce jusqu’à son dernier rayon, tout de biais. Nous n’avions ni lumière, ni livres, ni même les journaux. J’en étais réduit à combattre sans aide extérieure ma détresse intérieure croissante.
     
    Je vis souvent passer Sauckel devant ma cellule. Chaque fois qu’il me voyait, il prenait un air sombre et gêné. En fin de compte, ma porte s’ouvrit enfin. Un soldat américain m’attendait, tenant à la main un papier où étaient inscrits mon nom et le numéro de la pièce de celui qui devait m’interroger. Nous traversâmes cours et escaliers pour aboutir dans les couloirs du palais de justice de Nuremberg. En chemin, je croisai Funk revenant d’un interrogatoire, très affecté et le moral très bas. La dernière fois que nous nous étions rencontrés, c’était à Berlin, et nous étions libres tous les deux. « C’est comme ça qu’on se revoit », me lança-t-il en passant. Je ne pus faire autrement que de conclure, d’après l’impression qu’il m’avait faite, sans cravate, dans un costume mal repassé, le teint blême et maladif, que je devais donner la même lamentable impression. Car depuis des semaines je ne m’étais plus vu dans un miroir et cela devait durer des années. Je vis également Keitel dans une pièce, debout devant quelques officiers américains. Sa vue aussi me bouleversa car il semblait très bas.
    Un jeune officier américain m’attendait. Me priant aimablement de prendre place, il commença par me demander certains éclaircissements. Manifestement, Sauckel avait essayé d’induire en erreur les autorités menant l’enquête en me présentant comme le seul responsable de l’emploi des travailleurs étrangers. L’officier, montrant une grande compréhension, rédigea de lui-même une déclaration sous serment remettant les choses en place. J’en fus soulagé car j’avais eu jusqu’alors l’impression que, la tactique consistant à « charger les absents » avait joué depuis mon départ de Mondorf, à mon désavantage. Peu après, je fus conduit devant

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