Au Coeur Du Troisième Reich
tenue par mes services note, à la date du 5 mai 1941, que le Reichsmarschall ressentit une grande joie en voyant la maquette du bâtiment. Il fut particulièrement enthousiasmé par le hall du grand escalier. C’est là, dit-il, que chaque année il annoncerait le mot d’ordre de l’année aux officiers de la Luftwaffe. Et toujours suivant la Chronique, Göring ajouta textuellement : « Dans le hall de cet escalier, le plus grand du monde, Breker doit élever un monument à l’inspecteur général de la Construction. Il sera érigé ici même pour honorer l’homme qui a créé un édifice aussi grandiose. »
Cette partie du ministère, avec sa façade de 240 mètres donnant sur la « Grande Avenue », était reliée à une aile de mêmes dimensions donnant sur le Jardin zoologique ; elle comprenait les salles de réception exigées par Göring, ainsi que ses appartements privés. Je mis les chambres à coucher au dernier étage. Puis, invoquant des raisons de défense aérienne, je décidai de recouvrir le bâtiment d’une couche de terre végétale épaisse de quatre mètres, de façon que même de grands arbres puissent y prendre racine. Ainsi aurait été créé, à 40 mètres au-dessus du Jardin zoologique, un parc d’une surface de 11 800 mètres carrés, agrémenté de jets d’eau, de bassins et de colonnades, de pergolas et de coins buffets, et comprenant, outre une piscine et un court de tennis, un théâtre d’été pouvant accueillir 250 spectateurs. Göring était subjugué, rêvant déjà aux fêtes qu’il donnerait dans ce jardin dominant les toits de Berlin : « Je ferai illuminer le grand dôme par des feux de Bengale et j’y ferai tirer un grand feu d’artifice pour mes invités. »
Sans les caves, l’édifice de Göring aurait eu un volume de 580 000 mètres cubes, alors que la nouvelle Chancellerie de Hitler, construite depuis peu, ne faisait que 400 000 mètres cubes. Néanmoins Hitler ne s’avouait pas battu par Göring. Dans son discours du 2 août 1938, fort instructif quant à ses intentions en matière d’architecture, il déclara que, suivant le grand projet d’aménagement de Berlin, il n’utiliserait la nouvelle Chancellerie du Reich, qui venait d’être terminée, que pendant dix à douze ans, et précisa qu’un centre gouvernemental et résidentiel beaucoup plus vaste était prévu. En effet, après une visite que nous fîmes ensemble dans l’immeuble qu’occupaient les services de Hess, il avait spontanément décidé de la destination définitive de la nouvelle construction de la Voss-Strasse. Car, chez Hess, Hitler avait vu un hall d’escalier où dominaient des tons d’un rouge violent, et un ameublement beaucoup plus discret et beaucoup plus simple que le style « paquebot » auquel allaient sa préférence et celle des sommités du Reich. De retour à la Chancellerie, Hitler, horrifié, critiqua le manque de sens artistique de son adjoint : « Hess n’est qu’un béotien. Jamais je ne l’autoriserai à construire quelque chose de nouveau. Il se verra plus tard attribuer comme siège de ses services l’actuelle nouvelle Chancellerie du Reich et il ne pourra y apporter la moindre modification. Car il n’entend rien à ces choses. » Une telle critique, portant notamment sur le sens esthétique de quelqu’un, pouvait parfois signifier la fin d’une carrière et, dans le cas de Rudolf Hess, c’est bien ainsi qu’on l’interpréta généralement.Hess fut le seul à qui ce verdict n’eût pas été clairement signifié. Seule l’attitude désormais réservée de la cour lui permit de constater que sa cote avait considérablement baissé.
Notre projet prévoyait, à l’extrémité nord du grand axe de la ville, une deuxième gare centrale. En sortant de cette gare, on devait apercevoir, au-delà d’un plan d’eau de 1 100 mètres de long et de 350 mètres de large, le Grand Dôme, éloigné de près de deux kilomètres. Nous ne voulions pas relier ce plan d’eau à la Sprée, dont les eaux étaient polluées par les immondices de la grande ville. Ancien adepte des sports nautiques, je voulais que ce bassin offrît une eau claire aux nageurs. Des vestiaires, des hangars pour les canots et des terrasses ensoleillées devaient entourer cette vaste baignade située en pleine ville, ce qui aurait sans doute formé un curieux contraste avec les grands édifices qui allaient se refléter dans ses eaux. L’origine de mon idée de
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