Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Au Fond Des Ténèbres

Au Fond Des Ténèbres

Titel: Au Fond Des Ténèbres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gitta Sereny
Vom Netzwerk:
circulaire adressée le 6 mars 1967 par l’archevêque auxiliaire de Münich Johann Neuhäusler à toutes les autorités épiscopales et archiépiscopales d’Allemagne, d’Autriche et des pays autrefois occupés par les Allemands. Je reçus également deux autres photocopies : l’une était un bref extrait en latin de la Gazette diocésaine du diocèse wurtembourgeois de Rottenburg, datée du 24 mars 1941 ; l’autre reproduisait la circulaire pastorale Mystici corporis du pape Pie XII datée du 29 juin 1943.
    Quelque importante qu’ait pu être la personnalité de Herr Hartl au départ, elle passait au second plan de même que tous mes autres doutes. Car les documents étaient éloquents.
    Les minutes du procès de Francfort de 1967 montrent que Herr Hartl y avait rapporté son histoire, comme il l’avait fait en 1965 (selon d’autres minutes) et comme il allait le faire de nouveau en 1973 devant moi. Et cela sans hésitation, sans se laisser troubler ni par l’attitude manifestement sceptique des juges, ni par l’agressivité du contre-interrogatoire. Il avait parlé avec concision, clarté, objectivité et n’avait aucunement tenté de gonfler, ou en l’occurrence de justifier, son propre rôle dans les événements.
    Le professeur Joseph Mayer pour qui – même à la simple lecture des minutes – on ressentait une vive compassion en raison de ses quatre-vingt-un ans et de l’effort manifestement désespéré qu’il s’imposait [29] , avait commencé par nier avoir jamais entendu parler de Herr Hartl ni de la consultation qu’on lui décrivait. Mais, au cours du contre-interrogatoire, toutes ses dénégations et ses arguments se sont écroulés et, ce qui est ressorti pour finir, c’est que le professeur Mayer avait bien été chargé, par Hartl, de rédiger une consultation, qu’il s’était acquitté de ce travail au vu et au su de tous ses amis et collègues [il ne faut pas oublier qu’en 1938-1939, il enseignait à l’Université catholique et qu’il se trouvait donc placé sous le regard et l’autorité de l’Église], qu’il avait fait taper la consultation par une secrétaire et qu’il avait remis en personne les exemplaires à Hartl à la gare. Il serait trop long de reproduire ici le détail de son témoignage, mais, en substance, il y confirmait toutes les déclarations de Hartl. Le fait est d’autant plus important qu’il ne reste aucune trace de ce document ; il n’a été produit à aucun des procès d’euthanasie ; toutes les autorités catholiques d’Allemagne nient l’avoir jamais vu ; l’Institut d’histoire contemporaine de Münich, si admirablement outillé et le Centre de Ludwigsburg [pour la poursuite des crimes nazis] ont fouillé tous les dossiers de cette période sans parvenir à trouver un seul exemplaire, ni même une seule mention du document dans les archives de l’époque. Et les Bundesarchiv d’Allemagne occidentale qui abritent aujourd’hui à Coblence l’ensemble, plus ou moins complet, de la documentation de cette époque, y compris les dossiers restitués par les Archives nationales de Washington, ont été elles aussi incapables de retrouver ce texte, tout en ayant connaissance de son existence. On ne peut s’empêcher de conclure que la totale disparition de ce document historique est sans doute plus significative de l’importance qu’y attachaient ceux que son contenu concernait très directement que ne l’aurait été sa mise à la disposition pour examen.
    Le professeur Mayer produisit aussi au tribunal de Francfort sur demande de celui-ci, la lettre-circulaire de l’évêque Neuhäusler.
    Dans cette lettre, l’évêque [opposant acharné du régime, il passa la majeure partie de la guerre au camp de Dachau et son intégrité politique est incontestable] demandait à tous ses correspondants de rechercher dans leurs archives pastorales, sermons d’évêques, protestations auprès des autorités, ou directives au clergé et aux fondations (médicales) catholiques, des déclarations de l’Église catholique à titre de preuves sur la question de l’euthanasie.
    Après une présentation implacable de la personne et des antécédents d’Albert Hartl, M gr  Neuhäusler laissait entendre que ceux qui étaient connus pour avoir été informés du Programme d’euthanasie étaient tous – ou presque – des prêtres défroqués [30]  ; il indiquait que le professeur Mayer niait totalement avoir jamais pris position en

Weitere Kostenlose Bücher