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Au Fond Des Ténèbres

Au Fond Des Ténèbres

Titel: Au Fond Des Ténèbres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gitta Sereny
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armées et avaient été blessés, et des personnes d’un certain âge disposant de moyens et d’influence. Un certain nombre d’entre eux avaient des relations importantes à l’étranger, capables d’effectuer des versements substantiels pour eux en monnaie américaine. Ce camp, supervisé personnellement par Eichmann, a été plus tard exhibé en trois occasions différentes à des délégations de la Croix-Rouge, l’une venant d’Allemagne, une autre du Danemark et une autre de la Croix-Rouge internationale. Et un certain nombre de délégués ont ainsi été convaincus que c’était évidemment, comme devait dire Himmler, « non pas un camp au sens habituel du mot, mais une ville habitée et gouvernée par des Juifs, dans laquelle on exerçait… toutes sortes de métiers. » « Ce type de camp a été conçu par moi-même et mon ami Heydrich, et c’est ainsi que nous voulions que soient tous les camps. » Néanmoins, entre novembre 1941 et 1942,110 000 personnes ont été entassées dans cette « ville » qui à l’origine en abritait 7 000 et à la fin de 1942, il ne restait que 49 392 personnes : 16 000 étaient mortes de maladie et de privations, et 43 879 avaient été « expédiées à l’Est » durant cette seule année.
    « J’ai été cantonné dans une écurie, a repris Richard Glazar ; deux cousines à moi se trouvaient là ; elles logeaient dans un grenier. »
    Richard est resté un mois à Theresienstadt, travaillant au traitement des ordures. Il retrouva là son grand-père maternel et sa grand-mère paternelle – ils y étaient depuis plusieurs mois. Sa grand-mère vivait dans une pièce avec une douzaine d’autres vieilles femmes et elles couchaient sur des couvertures à même le sol. « Elle paraissait si petite, dit Richard. Je lui ai apporté du chocolat, quand j’ai pu m’en procurer un peu, mais elle disait toujours : “Non, merci, garde-le pour toi.” Mais quand un jour je lui ai amené un pot de saindoux, elle l’a accepté. Mon grand-père était dans une salle de vieillards ; ça c’était vraiment terrible. Il était presque aveugle ; il avait essayé de se couper les veines. »
    Après quelques jours passés dans cette écurie, Richard fut logé dans un grand hall, avec des amis. C’est là qu’il a rencontré un autre Tchèque, Karel Unger qui allait devenir son ami le plus intime, qui a survécu et s’est échappé de Treblinka avec lui. Il vit maintenant aux États-Unis.
    « Au bout d’un mois, on m’a notifié que je partais le lendemain matin pour un autre camp, dans l’Est. J’ai couru voir Hannah, ma cousine – elle m’a dit que grand-père venait de mourir ; juste ce jour-là.
    « Notre convoi de Tchèques a été acheminé en train de voyageurs ; plus tard je devais me rendre compte à quel point c’était rare. Seuls les transports venant de l’Ouest, – Allemagne, Autriche, Hollande, etc. – se faisaient plutôt confortablement en trains ; pour tous les autres c’étaient des wagons à bestiaux. Les surveillants de notre convoi étaient des policiers en uniforme vert. Ils ont désigné quelques jeunes hommes comme moniteurs et leur ont donné des brassards. Ce n’était pas particulièrement dur ni effrayant. Il est vrai cependant que l’officier de police responsable s’exprimait plutôt bizarrement. “J’ai à livrer un millier de pièces, dit-il, et un millier de pièces je livrerai. Si quelqu’un passe la tête par la fenêtre, il est sûr de la perdre : nous tirons.” Nous l’avons trouvé inutilement grossier ; pas besoin, nous semblait-il, d’effrayer femmes et enfants de cette façon ; mais en vérité nous ne lui avons pas accordé d’autre pensée. Nous avons quitté Theresienstadt le 8 octobre et nous avons voyagé deux jours. D’abord nous avons pensé que nous allions en direction de Dresde, mais le train a tourné et s’est dirigé vers l’est. La nuit il stationnait plus souvent qu’il n’avançait. Le dernier matin, nous avons vu se profiler au loin une ville ; ce devait être Varsovie. Nous sommes arrivés à Treblinka à 3 h 30 de l’après-midi. Nous nous sommes entassés aux fenêtres. J’ai vu une haie verte, des baraquements et j’ai entendu comme un bruit de tracteur en marche. J’étais ravi, ça ressemblait à une ferme. J’ai pensé : “C’est de première ; il y aura du travail que je connais.”
    « Le convoi qui nous avait amenés portait le numéro

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