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Au Pays Des Bayous

Au Pays Des Bayous

Titel: Au Pays Des Bayous Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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Compagnie entendait bien poursuivre ses projets et envoyer en Louisiane de nouveaux colons, seuls capables de mettre en valeur le pays.

    Les Bandouliers du Mississippi
    Avant John Law, Antoine Crozat avait tenté de recruter des volontaires pour la Louisiane, afin de tenir l'engagement qu'il avait pris d'installer dans la colonie au moins vingt personnes par an. Comme les candidats à l'expatriation ne s'étaient que rarement manifestés, le financier avait obtenu du roi « qu'il lui soit accordé tous les ans cent faux sauniers […] pris dans les provinces d'Anjou, de Touraine, du Maine, et […] condamnés aux galères n'y ayant point encore été conduits. Sa Majesté commuera cette peine en celle de passer à la Louisiane pour s'y établir ». On lui avait aussi permis « de prendre tous les ans dans les hôpitaux cent filles qui y furent élevées dès leur enfance pour les envoyer à la Louisiane et commencer à la peupler ». Ce programme avait à peine connu un commencement de réalisation avec l'envoi d'une vingtaine de faux sauniers au jour où la colonie avait changé de concessionnaire.
    John Law, qui s'était engagé à transporter, en vingt-cinq ans, en Louisiane six mille Blancs et trois mille Noirs, donna la priorité au peuplement de la colonie. Le fait que la Compagnie d'Occident ait fusionné avec la ferme des Tabacs, saisi la surintendance des Monnaies, annexé la perception de la Gabelle, absorbé la Compagnie du Sénégal et la Compagnie de Saint-Domingue, que la banque générale de Law soit devenue banque royale et qu'au mois de mai 1719 la Compagnie des Indes orientales et la Compagnie de la Chine aient été incorporées à la Compagnie d'Occident pour former une nouvelle Compagnie des Indes conférait au financier écossais la maîtrise de tout le commerce extérieur de la France. Tandis que la rue Quincampoix acclame l'argentier génial et qu'un bossu métis, importé du Mississippi, prête sa bosse-écritoire aux belles dames pressées de souscrire des actions, le Mercure de France publie des tableaux idylliques de la colonie, sous forme de récits ou de lettres. L'une de ces dernières, adressée par un officier de marine à une dame inconnue, se termine ainsi : « Avant de quitter la Louisiane, permettez-moi, Madame, de vous faire faire une promenade de cinq ou six cents lieues dans un terrain charmant : là, tantôt dans un bois où nous marcherons sur la vigne et l'indigo sauvage qui ne demande qu'à être cultivé, tantôt sur un coteau ou dans une plaine vaste et agréable par sa verdure et la variété de ses fleurs, ou sur les bords d'une infinité de petites rivières et de ruisseaux qui coulent dans le fleuve, vous verrez que la Nature n'a pas répandu ses trésors et ses agréments sur notre seule Europe. » Malgré les tirades de ce genre, reprises par les sergents recruteurs, la Compagnie, qui est en train de constituer à Lorient une flotte commerciale pour la Louisiane avec le Comte-de-Toulouse , la Duchesse-de-Noailles , la  Renommée , la Marie , la Badine , le Dromadaire , l' Éléphant , le Chameau , la Baleine , la Gironde , le Deux-Frères , la Vénus , la Seine , la Loire et quelques autres brigantins, frégates, flûtes ou corvettes, n'inspire que de rares vocations coloniales.
    Ce fut sans doute ce manque d'enthousiasme, sans rapport, hélas ! avec celui que manifestaient les spéculateurs de la rue Quincampoix, qui décida Law à user des méthodes de peuplement autoritaire des colonies que le Régent accepta d'autoriser. Les ordonnances des 8 janvier et 12 mars 1719 livrèrent à la Compagnie les prisonniers libérés. Un an plus tard, celle du 10 mars 1720 permit aux magistrats d'ordonner la transportation en Amérique des condamnés pour les délits les plus bénins. Ces mesures, dont John Law se défendit toujours d'avoir été l'inspirateur, facilitaient aussi le maintien de l'ordre en période de disette et de mécontentement du peuple. M. d'Argenson, garde des Sceaux et adversaire du banquier devenu contrôleur général des Finances, y souscrivit entièrement. Dans le même temps furent recrutés, officiellement parmi les anciens militaires ayant servi pendant cinq ans mais quelquefois parmi des repris de justice, quatre-vingts archers spécialisés dans la rafle des vagabonds, mendiants, ribaudes, désœuvrés, chômeurs et va-nu-pieds. Véritables chasseurs de prime, ces miliciens qui ne portaient pas d'uniforme mais seulement une large

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