Au pied de l'oubli
a rassurés. Ils ont plein de petits trucs.
Ils rallongent la chaînette du plafonnier et ils l’attachent au poignet du
bébé.
— Pour que la lumière les avertisse… en déduisit le curé. Quelles difficultés
en perspective ! Léo est courageux.
— Surtout amoureux ! Comme Hélène…
D’un air pensif, Julianna ajouta :
— On ne peut pas dire que les Gagné et les Rousseau prennent toujours les
chemins les plus faciles !
Le curé lui sourit gentiment.
— C’est ce qui vous rend si forts j’imagine. Je vous envie…
— De quoi ? s’étonna Julianna.
— De posséder autant… lui répondit-il.
— Allons donc, monsieur le curé ! Qu’est-ce que vous me chantez là !
— Rien Julianna, rien...
Le curé se leva.
— Bon, il est l’heure que je rentre, moi.
Julianna avait encore quelque chose à lui demander.
— Attendez un peu, monsieur le curé. Pour le mariage de Léo, je m’apprêtais
justement à vous téléphoner. Nous aimerions que vous soyez l’officiant de leur
cérémonie. Hélène pourrait être à l’avant, près de vous, et traduire en
signes.
Soudain mal à l’aise, le curé Duchaine répondit :
— Je suis désolé, Julianna, mais… je ne crois pas que cela sera possible.
— Pourquoi ? Vous ne changez pas encore de paroisse ! Vous venez de revenir
dans la région.
— Non, Julianna. C’est autre chose... Je ne serai plus prêtre.
— Je ne comprends pas.
— Je quitte l’ordre, j’enlève mon col.
— Vous défroquez ?
— Je déteste cette expression, dit le curé.
— J’en reviens pas… Pourquoi ce… ce revirement ?
— C’étaient pas des paroles en l’air tantôt, Julianna. Je vous envie, toi,
François-Xavier, vos enfants… Je vous ai toujours enviés. Nous sommes tellement
nombreux à être entrés en religion juste parce que c’était à peu près tout ce
qui s’offrait à nous. Je désire faire mes propres choix, avoir mes propres
opinions, les émettre haut et fort.
— Cela va être difficile de s’habituer à l’idée, dit Julianna.
— Je crains de choquer bien du monde, se désola-t-il. Le changement fait si
peur, à moi le premier, avoua-t-il.
Julianna se pencha vers lui.
— Pour nous, il n’y aura rien de changé. Vous avez été, vous êtes et vous
resterez notre grand ami. Mais je veux savoir une chose.
— Quoi ?
— Votre prénom. Je ne pourrai plus vous appeler « monsieur le curé ».
Q UATRIÈME PARTIE
– T
immy, arrête de
bouger ! lui intima Julianna.
— Il faut pas monter sur les chaises ! Des chaises, c’est pour
s’asseoir !
Debout sur une chaise de la cuisine, Timmy était tout sauf conciliant.
— Je vais finir par le piquer, marmonna-t-elle, des épingles de couture entre
les lèvres.
Tant bien que mal, Julianna prit la mesure du pantalon qu’elle devait
réajuster.
— Il a encore maigri ? demanda Mélanie en entrant dans la pièce, vêtue de sa
robe de carnaval.
— Depuis un mois, il a moins d’appétit. Bon, tu peux descendre, mon
gaillard.
— Ce qui s’est passé avec Bernard l’a secoué, je pense…
Julianna déshabilla Timmy.
— Je n’aurai pas le temps de faire dans la finesse. Je vais juste coudre une
pince. De toute façon, avec sa chemise à carreaux par-dessus, ça paraîtra
pas.
— Moi aussi, j’aurais besoin d’un petit ajustement sur mon costume.
Julianna s’impatienta.
— Mélanie, vous vous êtes donné le mot ou quoi ? Je peux pas tout faire ! On
devrait déjà être partis pour le carnaval depuis dix bonnes minutes !
Énervée, Julianna essayait de penser à tout. Elle déposa le
pantalon sur le dossier de la chaise.
— Approche, que je regarde ce qui cloche, dit-elle à Mélanie.
En soupirant, elle examina la robe d’époque.
— C’est vrai qu’elle est un peu juste au niveau de la taille. Tu vas devoir te
rentrer le ventre.
Fatigués d’attendre les femmes dans le salon, François-Xavier et Pierre,
habillés à l’ancienne, vinrent voir ce qui les retardait.
— Êtes-vous prêtes, les créatures ? s’informa François-Xavier.
— Presque... répondit Julianna.
Pierre siffla d’admiration en détaillant Mélanie.
— T’es ben belle !
Julianna sourit de satisfaction. Elle était particulièrement fière de sa
réalisation. Sa belle-fille allait en faire tourner, des têtes ! Elle était tout
simplement magnifique. D’un
Weitere Kostenlose Bücher