Avec Eux...
dâenchaîner une trentaine de rendez-vous sur des sujets tous plus différents les uns que les autres. Câest cela que jâappelle « mes traversées de miroirs ». Celuique nous recevons croit toujours que nous lâavons attendu toute la journée et, par conséquent, quâil est le rendez-vous incontournable, alors que quatorze autres vont le suivre. Pourtant il faut rester courtois, gentil, à lâécoute, partager des idées.
Je donnais beaucoup, mais jâai comme tout le monde un seuil de tolérance à la fatigue psychologique, que jâai dépassé trop souvent⦠Câest vrai que jâavais tout Paris à mes pieds, et que, sans doute un peu ivre de cette puissance, je me permettais même, à lâoccasion, dâinsulter Patrick Le Layâ¦
4. « Mister président,
 tu nâas pas de couilles ! »
TF1 fait partie de mon ADN. Cette chaîne reste pour moi synonyme dâexpériences humaines inoubliables, mais ce fut également un univers de combat, un univers guerrier. Nous sommes en 1989, je suis directrice artistique de TF1, en charge des divertissements et des opérations spéciales. Un nouveau projet mâhabite tout particulièrement : Jây crois dur comme terre , un prime time spécial conçu autour de lâenvironnement. Voilà bien longtemps que, aux côtés de Nicolas Hulot, je rêve dâun programme écologique, à une époque où la sauvegarde de la planète ne représente pas encore une véritable préoccupation ni un choix de société. Jâai réussi à entraîner dans mon sillage les animateurs de la chaîne, ainsi que des sociologues et écologues. Nicolas Hulot et Patrick Poivre dâArvor doivent présenter lâémission, et Paris-Match est notre partenaire exclusif.
Je suis vraiment confiante, Ãtienne Mougeotte, vice-président et directeur dâantenne de TF1, mâa donné son feu vert avec enthousiasme. Le défi est de taille, mais le sujet me tient à cÅur et je travaille dâarrache-pied avec mes équipes pour proposer aux téléspectateurs le programme le plus complet possible. Pour préparer ce prime time , nous disposons dâun tasdâarchives, de documents, de témoignages divers, mais nous nous intéressons aussi à tout ce qui est produit à lâétranger. Parmi dâautres, un documentaire britannique diffusé sur la BBC retient tout particulièrement mon attention. La terre y est représentée avec une bouche et des yeux qui pleurent sur toutes les blessures que ses enfants lui infligent. Je trouve ce programme tellement riche que jâen achète les droits pour illustrer mes différents reportages.
Il fait soleil ce matin-là à la terrasse du café où je prends mon petit déjeuner avec un journaliste de Libération. Je commence à lui parler avec passion de la mise en Åuvre de ce projet lorsquâil me coupe net dans mon élan et mâapprend que les journalistes de la rédaction de TF1 travaillent avec Pascale Breugnot, directrice de lâunité des magazines de société, sur un magazine similaire intitulé La Terre perd la boule .
Plus il entre dans les détails, moins jâarrive à cacher ma stupéfaction. La diffusion de ce programme serait prévue pour septembre⦠Au même moment que le mien ! De retour à TF1, je me renseigne sur ce projet qui semble faire doublon. Il semble que personne nâen ait entendu parler, pourtant je doute fortement que Pascale Breugnot ait commencé à travailler dessus sans avoir obtenu au préalable lâaccord de nos dirigeants. Une situation intenable, à un mois à peine de la diffusion. Câest finalement au service Communication que jâobtiens la réponse à mes questions : La Terre perd la boule figure dans les conducteurs dâantenne et, en outre, il est prévu le même jour que Jây crois dur comme terre  ! Cette situation me laisse sans voix, car je porte ce projet en moi depuis longtemps et jâai acquis une certaine légitimité dans le domaine en produisant Ushuaïa avec Nicolas Hulot. Quâune même chaîne prépare deux magazines totalement identiquesdans leur fond, même sâils diffèrent dans leur forme, mâapparaît impensable. Il doit y avoir une
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