Avec Eux...
très concrète que cette maladie ne se transmet pas par la salive mais seulement par le sperme et par le sang. Cette image fera ensuite le tour du monde : le baiser de lâamour, et non pas celui de la mortâ¦
Gérard Depardieu, lui, réalise lâinterview dâun jeune garçon en phase terminale dans un hôpital. Je dois avouer quâil me touche particulièrement. Lorsque je lâai appelé pour lui demander de réaliser cet entretien filmé, son accueil a été dans un premier temps plutôt réservé. Mais au final, jâai rarement vu quelquâun sâintéresser de façon aussi précise, aussi humaine aux malades. Il pose des centaines de questions avec beaucoup de douceur à ce jeune garçon dâà peine vingt ans, dâune maigreur affolanteâ¦
Tout le long de lâémission, les présentateurs se succèdent dans une vraie ferveur, presque une communion⦠Une grande prière le temps dâune nuit. Le réalisateur de lâémission, Jérôme Revon, a mis six mois à préparer le tournage, une vraie performance personnelle. Je crois quâau fond, surce programme, personne nâest là par hasard. Nous avons tous compris quâune épidémie est en train de détruire toute une frange de la population et quâil nous faut montrer que ce nâest pas une maladie de drogués et dâhomosexuels, mais quâelle touche tous les milieux, toutes les couches sociales, hommes, femmes et enfantsâ¦
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Ãa avait été très compliqué dâavoir tous les présidents de chaîne. Déjà , ils ne sâaimaient pas entre eux, mais ils pouvaient à la rigueur oublier leurs différends pour une telle cause, lâespace dâun soir. Pourtant, il y a eu des bagarres sans nom. Câétait invraisemblable de voir que, même pour une cause comme celle-là , on nâarrivait pas à se faire entendre de gens dâune telle qualité. Deux présidents se sont battus, réellement battus, lors dâune réunion qui se passait dans les bureaux dâune des chaînes (on changeait de lieux pour les réunions, parce quâil ne fallait pas que TF1 ait le leadership). Ãa paraît impensable, et lâécrire aujourdâhui, des années plus tard, renforce encore mon sentiment dâincompréhension, mais les présidents de deux grandes chaînes de télévision française en sont venus aux mains, parce quâils nâétaient pas dâaccord sur la ligne éditoriale !
Comme je lâai dit, câétait une soirée économiquement « vide », donc pour les chaînes de télévision qui vivent avec la pub, câétait une catastrophe, « un accident industriel ». Mais il y avait dâautres soucis. Dâabord ils nâétaient pas dâaccord sur le temps que devait durer lâémission, que je voulais faire exister quatre heures. Ensuite il y a eu beaucoup de discussions sur lâidée quâune partie de lâargent généré par la publicité diffusée pouvait quand même être répartie entre les chaînes. Puis il y a eu des discussions sans fin sur qui faisait quoi, quel journaliste pour les reportages, ceux de TF1,ceux de France 2, de France 3 ? Quelle répartition des rôles. Qui allait présenter ? Un animateur de TF1, un présentateur de M6 ? Câétait une querelle dâespace, de leadership et de visibilité. On en oubliait presque le sida.
Câest comme ça. Dès le moment où on choisit de mettre six chaînes de télévision ensemble, il faut penser six fois. Peut-être nâavais-je pas intégré la pensée divisée par six ! Il a bien fallu le faire, et on lâa fait. Lâimportant, câétait de réussir la soirée.
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Lâémission se termine⦠Dans les coulisses, tous les présidents de chaîne sont présents, fiers dâavoir réussi ce pari. Plus de bagarres ! Oubliée, le temps dâun soir, la pression économique et lâabsence de recettes publicitaires. Nous avons, cette nuit-là , récolté une somme dâargent incroyable pour aider les malades : 270 millions de francs donnés par 1,4 million de donateursâ¦
Cette émission ne pouvait pas se faire sans lâappui du ministère
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