Avec Eux...
émission spéciale sur la myopathie, et pas sur telle autre maladie orpheline ? » Câest un questionnement légitime, et ça a été un peu compensé par une émission qui sâappelle Qui veut gagner des millions ? , où régulièrement Jean-Pierre Foucault reçoit des artistes qui participent au jeu pour gagner des sommes dâargent conséquentes, destinées à des associations. Cela reste une émission de divertissement, mais lâargent quâelle génère va à des causes. Jâestime que ce genre dâémissions devraient être beaucoup plus nombreuses. Ce nâest pas prendre les Français en otages. Il se trouve en fait que les Français sont très généreux. Comme il nây a personne derrière eux qui leur braque un fusil derrière lâoreille pourleur dire : « Si vous ne donnez pas, vous êtes vraiment quelquâun de pas bien », ils ne sont pas obligés de donner. Mais il se trouve que, à un certain niveau de sensibilisation, vous vous sentez obligé de faire un geste. Câest la force des images, câest la force de la demande. On ne peut pas rester indifférent à ces causes. Ou bien câest le mot « générosité » quâil faut remettre en question.
Maintenant, ce qui est probablement une question plus fondamentale, câest jusquâoù les chaînes de télévision doivent-elles se substituer à la mission et au budget dâun Ãtat ?
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Je crois que je nâaurais pas pu vivre dans un monde léger, facile, brillant, rempli de paillettes, sans avoir fait ces choses⦠Je me dis que mon passage à la télévision aura au moins servi à cela. Mais câest ma propre conscience, on nâest pas obligé de me suivre. Câest aussi ce qui habite un Zidane, apparemment, qui a envie de redonner quelque chose. Câest aussi, probablement, le cas pour Zazie qui a monté lâassociation Sol en Si pour les enfants séropositifs ou qui ont perdu leurs parents du sida, et qui organise tous les ans une opération pour les aider. Tout citoyen, tout être humain qui voit ce qui se passe dans ce monde risque fort de sentir un beau jour quâil doit sâinvestir et dépasser la simple prise de conscience.
Zazie, justement, a écrit une chanson qui pour moi est un bel exemple, Jâai tout vu, jâai tout regardé, je nâai rien fait . Je ne voulais pas avoir tout vu, tout regardé, tout su et nâavoir jamais rien fait, alors que jâavais entre les mains un outil majeur pour pouvoir agir. Je nâavais pas la possibilité de guérir, mais je pouvais utiliser lâoutil dont je disposais pour faire parler des gens, les sensibiliser et apporter ma pierre à lâédifice à travers une chaîne de télévision, pour peu quâonveuille bien me suivre là -dessus. Jâavais besoin évidemment de mes patrons et là je remercie ici M. Bouygues, M. Le Lay, M. Mougeotte. Nos relations à travers le temps nâont pas toujours été idéales, mais pour cela, ils ont été avec moi.
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Mon implication dans cette « télévision humanitaire » nâest pas indépendante non plus dâune conscience que jâai longtemps partagée avec Nicolas Hulot. On a beaucoup voyagé ensemble, notamment en Afrique du Sud. Jâai eu de vrais chocs là -bas, à lâépoque de lâapartheid. On avait pris le train Bleu, on avait fait des tournages magnifiques, dans ce pays sublime que jâaime par-dessus tout, mais câétait aussi un pays où lâégalité nâexistait pas. Je me souviens dâune scène très particulière qui mâa vraiment touchée. Nous étions dans un restaurant à Johannesburg, nous avions déjeuné avec toute lâéquipe de façon tout à fait somptueuse. Arrive une petite bande de jeunes garçons très maigres, et par ailleurs très sages, qui, de façon évidente, avaient faim. Ils rampent pratiquement sous notre table pour quâon leur donne du pain ou du sucre, peu importent les reliefs de notre repas. Alors Nicolas les installe à une table dans le restaurant et passe commande, comme si câétait pour nous. Quand les plats arrivent, il les fait servir aux petits Blacks, qui se font jeter par le restaurateur
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