Avec Eux...
Christ-Sauveur, la plus grande cathédrale orthodoxe du monde, où doit se tenir lâoffice. Lâhistoire de ce majestueux monument blanc coiffé de coupoles dorées est liée inextricablement à celle du défunt. Détruit en 1931 par Staline, au plus fort de la révolution communiste, lâédifice a été reconstruit à la demande dâEltsine, entre 1995 et 2000, sur son emplacement dâorigine.
La température extérieure affiche trente degrés sous zéro. Câest un choc thermique, mais jây suis habituéedepuis mes pérégrinations au temps dâ Ushuaïa . Transie de froid, jâassiste au ballet incessant des voitures officielles qui « livrent » leurs personnages importants devant la basilique. La foule est impressionnante et son recueillement est sincère, palpable. Ce sont les premières funérailles religieuses dâun dirigeant russe depuis celles du tsar Alexandre III, en 1894. Une journée de deuil national a été décrétée par le Kremlin et, depuis la veille, des milliers de citoyens russes ont défilé devant le cercueil ouvert, selon le rite orthodoxe, paré du drapeau de la Russie. Un important dispositif policier cerne la cathédrale.
Philippe et moi sommes arrivés un peu en avance, mais pas question dâentrer. Selon le protocole, nous ne pourrons pénétrer à lâintérieur du bâtiment quâen respectant un ordre et un horaire précis. Les officiels proposent alors à Philippe Douste-Blazy de rejoindre divers chefs dâÃtat dans une pièce attenante à la cathédrale. De mon côté, je suis dirigée par les officiers de sécurité vers une grande salle très sombre, sans fenêtres, par ailleurs assez impressionnante, où de petits cierges se consument.
Je ne sais pas exactement où je me trouve, mais jây suis toute seule, finalement heureuse de patienter dans cet endroit où il fait déjà un peu moins froid. Au bout dâun moment, dans une quasi-obscurité, je distingue au loin une silhouette, de dos, appuyée contre un mur, et qui semble en pleine conversation sur un téléphone mobile. Sans savoir de qui il sâagit, je salue poliment cette silhouette à peine distincte. Lâhomme se détache du mur, sâavance, et je mâaperçois à ma grande stupéfaction quâil nâest autre que Vladimir Poutine, que je nâavais jamais croisé auparavant. Lorsquâil raccroche, je lui dis en anglais que je suis très honorée de le rencontrer, même dans uncontexte aussi particulier, et je me présente comme la compagne de Philippe Douste-Blazy. Nous échangeons les politesses dâusage et puis quelques mots à propos de Boris Eltsine. Une conversation improbable dans cette salle vide et glaciale. Vladimir Poutine et ma petite personne, mais comment est-ce possible ? Je ne suis pas intimidée outre mesure, ce type de rencontres se produira très souvent dans mon existence, mais dans ces circonstances, une petite voix intérieure me fait toujours prendre la mesure de la situation presque incongrue : la petite fille du Nord, la productrice de divertissements populaires à la télévision, projetée par son destin dans lâimmédiate proximité de personnages de cette dimensionâ¦
Jâen suis là de mes réflexions, lorsque brusquement une porte sâouvre pour laisser entrer un autre visage familier : Bill Clinton ! Non, je nâhallucine pas, câest bien lui ! Lui, en revanche, je lâai déjà rencontré plusieurs fois dans dâautres circonstances, notamment pour une interview que son épouse Hillary avait accordée à Patrick Poivre dâArvor lors de la sortie de son livre Il faut tout un village pour élever un enfant . Nous nous étions également retrouvés plusieurs fois ensemble, avec Philippe Douste-Blazy, lorsque je lâaccompagnais aux sommets de lâONU. Dans cette salle, sorte dâantichambre où règne la pénombre, Bill Clinton, tout sourires, nâa pas changé. Il est comme à chaque fois adorable avec moi, très welcoming . Puis il salue Vladimir Poutine avec une chaleur qui me semble moins naturelle.
Soudain, en quelques secondes, le mouvement sâaccélère, câest le grand branle-bas de combat : le cortège
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