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Aventuriers: Rencontres avec 13 hommes remarquables

Aventuriers: Rencontres avec 13 hommes remarquables

Titel: Aventuriers: Rencontres avec 13 hommes remarquables Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Heimermann
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subir plus qu’il ne participa. Sa capacité à remonter le vent, à dicter une route un tant soit peu cohérente était quasi nulle. Et ses moyennes journalières qui oscillaient au mieux entre 50 et 65 milles n’étaient guère encourageantes.
    Il faut lire et relire le récit circonstancié de cette lente transhumance pour mesurer son incroyable audace. Pleins d’intuitions, les aventuriers de l’onde ne furent jamais pris au dépourvu. Ils imaginèrent le moyen d’arrimer l’aviron afin de garantir un minimum de repos aux hommes de quart, fabriquèrent des dérives pour freiner les dérapages intempestifs et multiplièrent les tournées d’inspection sous la coque dans le but de prévenir le moindre désagrément.
    Du fait même de sa position au ras de l’eau, le radeau fragile offrait un point d’observation unique en son genre. Pendant plus de trois mois, les rencontres zoologiques s’accumulèrent, plus étonnantes les unes que les autres. Des poissons volants par centaines, des « troupeaux » de bonites et de dorades jusqu’à cet improbable maquereau serpent tout droit sorti d’un livre de Jules Verne, ce requin-baleine de près de quinze mètres ou ce minuscule crabe pélagique bientôt adopté par l’ensemble de l’équipage sous le surnom de Johannes.
    Le 5 août, l’expédition identifia enfin une terre lointaine, l’île de Pouka-Pouka, mais le radeau, toujours aussi peu docile, fila plus au sud. Compatissantes, quelques pirogues locales, attachées les unes aux autres, tentèrent d’infléchir sa course. Un jour encore et la barrière de Raroïa menaça pour de bon. Aucune passe n’était visible. Malgré l’ancre flottante et les ultimes efforts de l’équipage, l’abordage ne put être évité. Miracle ultime : les documents, carnets et livres de bord furent in extremis précipités dans une série de sacs étanches !
    Les dégâts étaient à la mesure du choc : seuls les douze troncs initiaux n’avaient pas bougé. Quarante-huit heures durant, Heyerdahl et ses hommes se débattirent avant d’entrer en contact avec un radioamateur des îles Cook. Une conversation de quelques minutes qui, à elle seule, alluma l’incendie. Bientôt l’opinion prit fait et cause pour les aventuriers du Pacifique et les grands de ce monde pour leur ébouriffante tribulation. Le roi Haakon cela va de soi, mais aussi le président Truman et la reine d’Angleterre, et même un peu plus tard Nikita Khrouchtchev qui tint à rencontrer le capitaine et son équipe lors d’une visite officielle à Oslo.
    Bientôt le petit film 16 mm retraçant l’impossible fut porté aux nues. Jamais spectateurs ne s’étaient à ce point sentis au cœur d’une aventure. Avec tant de véracité que plus d’un se plaignit de « mal de mer » pendant la projection ! Oscarisé à Hollywood, le documentaire « grandeur nature » trouva son logique prolongement en librairie. Avec, là encore, un succès considérable. Reportant la publication de son étude (de 820 pages) sur les « Indiens d’Amérique dans le Pacifique », Heyerdahl proposa un récit si convaincant qu’il fut traduit au fil des années en soixante-sept langues, espéranto et braille compris.
    Et la fièvre de gagner. Avec à la clef une quantité incalculable de restaurants et d’hôtels estampillés à l’enseigne du Kon-Tiki , mais aussi une multitude de vêtements, jouets ou produits d’alimentation pareillement labellisés. Au prétexte qu’il abritait des balsas de même nature que ceux utilisés par le radeau désormais mythique, le jardin botanique de Durban fut pris d’assaut l’espace d’un week-end. Et c’est de chocolats toujours baptisés Kon-Tiki que les futurs cosmonautes américains se munirent quelques années plus tard juste avant d’être envoyés en orbite au-dessus de la Terre.
    En marge du plébiscite quelques voix discordantes s’élevèrent néanmoins. Divers chercheurs s’empressèrent, en particulier, de mettre à mal l’ensemble des arguments avancés par l’aventurier norvégien. S'ils convenaient que les Polynésiens étaient de fiers marins et que leurs ancêtres essaimèrent d’île en île, ils maintenaient mordicus que le sens de leurs voyages s’effectua à partir de l’Asie et non depuis l’Amérique. Les spécialistes ès navigations renchérirent : les explorateurs du temps jadis rechignaient à se faire d’emblée « porter » par le vent, préférant, au contraire, d’abord lutter «

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