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Aventuriers: Rencontres avec 13 hommes remarquables

Aventuriers: Rencontres avec 13 hommes remarquables

Titel: Aventuriers: Rencontres avec 13 hommes remarquables Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Heimermann
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demeurait parfaitement claire. Lorsque le cône n’eut plus que quelques mètres de diamètre, nous avons profité du plus beau cadeau imaginable : la vision d’un poisson ! »
    L'animal mesure une trentaine de centimètres et, comme une sole, possède deux yeux sur le sommet du crâne. Mais plus encore que ses caractéristiques, c’est sa solitude qui séduit les deux plongeurs. N’était-ce pas le couronnement de leur expédition ? « La réception sur le fond, précise Piccard, s’est finalement effectuée sans encombre, sans l’ombre d’un nuage de vase. Un effleurement plus qu’un atterrissage. Dans la mesure où nous ne nous sommes attardés que vingt minutes à ce niveau, nous aurions très bien pu n’apercevoir aucune trace de vie. Et il est certain que nous en aurions retiré une réelle frustration... »
    Point de déception donc, ni même de stress. A dire vrai, la plongée la plus profonde vaut moins par les minutes de son déroulement que par les années de recherches qui l’ont précédée. Appliquer une théorie est une chose, l’énoncer en est une autre. Les tâtonnements préliminaires d’Auguste, les plongées multipliées en Atlantique et en Méditerranée, les recherches perpétuelles de crédits et de subventions, trop souvent reportés ou différés, avant que la marine américaine ne parraine l’initiative, furent des stations autrement difficiles à négocier que la lente dégringolade à suivre.
    Jacques Piccard, toujours posé, toujours définitif, insiste : « C'est mon père qui a inventé le bathyscaphe. C'est lui qui a imaginé cette nacelle pressurisée dépourvue de tout cordon ombilical avec la surface, capable de descendre grâce à son lest et de remonter grâce à son flotteur d’essence, un liquide plus léger que l’eau. L'idée d’un dirigeable sous-marin semble évidente aujourd’hui, mais elle fut pourtant longue à se dessiner. »
    Suisses, les Piccard effectuent leurs premières plongées avec des crédits belges et le soutien logistique des Français. Au large de Dakar, en 1938, le professeur Théodore Monod, délégué du Muséum d’histoire naturelle, embarque à bord d’un engin pionnier pour un premier voyage expérimental. Jacques-Yves Cousteau, lui-même dans les parages, s’émerveille : « Professeur, votre invention est la plus stupéfiante du siècle ! » Jacques, qui a vingt-six ans, n’est pas très loin non plus. Mais l’imminence du second conflit mondial ne lui donne pas le temps de vraiment s’investir.
    Un engagement volontaire dans l’armée française et une croix de guerre plus tard, le voilà réellement à pied d’œuvre. Il n’est pas dupe : les Français, justement, sont de plus en plus pressants. Cousteau, en particulier, guette le moment de s’approprier le bathyscaphe pour son seul avantage, avec d’autant plus d’impatience que la marine nationale se déclare prête à financer son programme. Inquiet de cette éventuelle captation d’initiative, Jacques Piccard se tourne vers les Italiens qui, heureusement, l’écoutent et choisissent de pérenniser les recherches de son père. Dès lors, le nouveau submersible de la famille Piccard, baptisé Trieste , multiplie les records en Méditerranée. Ensemble, le père et le fils descendent à – 3 150 mètres, juste avant que les Américains ne se penchent à leur tour sur cette drôle de machine.
    Cette fois Auguste ne sera pas du voyage. Agé de soixante-seize ans, il enregistre néanmoins la réussite de son entreprise. Rasséréné, heureux d’avoir transmis autant qu’inventé, il ne fera plus que de très rares apparitions publiques avant de disparaître en 1962 victime d’une crise cardiaque.
    Passé son record – qui ne sera répété qu’une seule fois en 1995 par un robot japonais –, Jacques Piccard a bien sûr poursuivi l’œuvre familiale. Il fit construire plusieurs sous-marins d’agrément et de recherche. Le Mésoscaphe , qui a effectué plus de 1 000 plongées dans le Léman et transporté près de 33 000 passagers, le Ben-Franklin , lancé pendant un mois et 2 800 km dans les eaux troubles du Gulf Stream, ou le F.A. Forel , qui a multiplié les investigations dans douze lacs européens ainsi qu’en Méditerranée. Il a promené des touristes à la demande, bataillé avec les politiques, ferraillé avec les bureaucrates, travaillé avec la Nasa, entrepris des études microbiologiques, posé des conduites d’eau et recensé les ombles

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