Azteca
lacs, les traditionnels
acali étaient facilement taillés dans les pins tendres qui poussaient sur
place ; mais ces canoës de mer étaient fait dans de l’acajou lourd et dur
et leur construction pouvait prendre des mois. A Acamepulco, presque tous les
bateaux servaient dans les mêmes familles depuis des générations et personne
n’avait envie de les vendre. Je finis par trouver les quatre canots dont
j’avais besoin après des journées de fastidieuses négociations et en me
départissant d’une quantité de poudre d’or bien plus importante que je l’avais
escompté.
Ensuite, le voyage à la rame vers l’est, le long de la côte, à deux
dans chaque embarcation ne fut pas, non plus, un jeu d’enfant. Nous avions tous
une certaine expérience de la navigation sur nos grands lacs intérieurs qui
étaient parfois agités par les vents, mais nous n’avions pas l’habitude de ces
eaux roulées par les courants et les marées, même par le temps calme qui
présida à notre traversée, ce dont je remercie les dieux. Malgré notre malaise
à nous sentir loin de la côte, nous naviguions bien au-delà des premiers
rouleaux et des brisants que nous traversions seulement au coucher du soleil,
pour passer des nuits récupératrices sur les plages au sable doux et sans
remous.
Comme je l’avais déjà remarqué auparavant, ces plages passaient peu à
peu du blanc éclatant au gris terne, puis au noir sinistre des sables
volcaniques. Enfin, la grève fut interrompue par un promontoire qui s’avançait
dans la mer : c’était la Montagne qui marche dans l’eau. Je pus la voir de
loin grâce à ma topaze et, comme l’après-midi était déjà fort avancé, je donnai
l’ordre d’accoster sur la plage.
Lorsque nous fûmes tous installés autour du feu de camp, je m’adressai
à mes sept compagnons pour leur préciser une dernière fois tous les détails de
mon plan d’action et à la fin, je leur dis : « Certains d’entre vous
auront peut-être une certaine répugnance à lever la main sur un prêtre, même
celui d’un dieu étranger. Il ne faut pas en avoir. Ils vous sembleront
désarmés, fâchés de notre intrusion et sans défense. Il n’en est rien. Si on
leur laisse la moindre chance, ils nous massacreront jusqu’au dernier, nous
découperont en quartiers, comme des sangliers et nous mangeront tranquillement.
Demain, lorsque nous aurons terminé notre travail, tuons, tuons sans pitié ou
sinon c’est nous qui risquons d’être exterminés. Rappelez-vous-le bien et
souvenez-vous aussi de mes signaux. »
Le lendemain matin, lorsque nous reprîmes la mer, nous n’étions plus un
groupe de sept porteurs d’âge mûr conduit par un jeune pochtecatl, mais une
troupe de huit intrépides guerriers mexica, dirigée par un « vieil
aigle »… pas si vieux que ça. Nous avions défait nos paquets, revêtu nos
insignes de guerre et nous nous étions armés de pied en cap. J’avais pris avec
moi le bouclier et le bâton de quachic de Gourmand de Sang et j’avais mis sa
coiffure sur ma tête. Le seul insigne de ce rang qui me manquât, c’était l’os
qui traverse le nez. Comme moi, mes sept compagnons étaient protégés d’une
armure blanche de coton matelassé. Ils avaient piqué des plumes dans leur
chevelure qu’ils avaient relevée et nouée, et ils s’étaient peint le visage de
dessins multicolores. Chacun de nous avait un macquauitl, un poignard et un
javelot.
Notre flottille avançait crânement en direction du promontoire, sans
rien faire pour se dissimuler, mais au contraire avec la volonté délibérée
d’être vue par les gardes. Ce fut effectivement ce qui se produisit, et une
bonne douzaine de ces sinistres prêtres Zyù, vêtus de leurs peaux de bête en
loques, vint nous attendre au pied de la falaise. Nous ne fîmes pas virer nos
canots vers la plage pour accoster facilement, mais au contraire, nous piquâmes
droit sur eux.
Etait-ce la saison, ou parce que nous étions arrivés par le côté ouest
de la falaise, mais l’océan était bien moins agité que le jour où j’avais
abordé avec le pêcheur zapotecatl. Cependant, il y avait encore bien assez de
remous pour que les marins inexpérimentés que nous étions aillent se fracasser
sur les rochers, si les prêtres n’étaient pas venus tirer nos canots pour les
amener dans des creux abrités. Il était bien évident qu’ils agissaient de la
sorte parce qu’ils avaient reconnu nos tenues mexica et qu’ils
Weitere Kostenlose Bücher