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Azteca

Azteca

Titel: Azteca Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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qu’elle est morte. Si j’étais
arrivé un peu plus tôt, elle aurait sans doute accepté avec plaisir de profiter
de ma couverture et de mes petites attentions. Maintenant, la seule attention
que je puisse lui témoigner, c’est de l’enterrer avant que les vautours ne
rappliquent. »
    Je posai mon sac et ma gourde et entrepris de faire un trou dans le
sable avec mon macquauitl. Il me sembla voir un reproche dans ses yeux, aussi
je pensai que je pourrais l’allonger pendant que je creusais sa tombe. Je la
pris par les épaules pour la mettre sur le dos, mais, oh !
« surprise ! elle résista à tout prix. Ses muscles ne s’étaient
pourtant pas encore raidis.
    Je reculai d’un pas, pour considérer ce cadavre si bizarrement têtu et
soudain, je reçus un coup violent entre les omoplates. Je me retournai vivement
pour me voir entouré par un demi-cercle de flèches pointées sur moi. Les hommes
qui tenaient les arcs me regardaient méchamment. Ils n’avaient pour tout
vêtement qu’un pagne de cuir graisseux et déchiré, une couche de crasse sur
tout le corps et quelques plumes dans leurs cheveux embroussaillés. Ils étaient
neuf. Tout occupé par ma singulière découverte, je ne les avais pas entendus
arriver, pourtant j’aurais dû les sentir car ils puaient dix fois plus que la
morte.
    Les Chichimeca ! pensai-je et peut-être même l’ai-je dit à haute
voix.
    « Je viens de tomber sur cette malheureuse, leur expliquai-je, et
je m’apprêtais à faire quelque chose pour elle. »
    J’avais parlé très vite, espérant arrêter leurs flèches, aussi j’avais
utilisé ma langue maternelle en accompagnant mes paroles de force gestes
destinés à me faire comprendre de ces sauvages. Mais, à mon grand étonnement,
l’un d’eux me répondit en un nahuatl très correct :
    « C’est ma femme. »
    Les flèches des Chichimeca étaient toujours braquées sur moi et je me
hâtai de dire :
    « Ce n’est pas moi qui l’ai tuée. Je l’ai trouvée comme ça. Je ne
lui aurais pas fait de mal, même si elle avait été en vie. »
    L’homme eut un sourire féroce.
    « Je voulais l’enterrer, poursuivis-je, avant que les vautours ne
viennent s’en repaître. »
    L’homme regarda le sillon que j’avais commencé à creuser, puis il leva
les yeux vers les charognards qui planaient au-dessus de nous. Son visage
sévère s’adoucit un peu quand il me déclara en baissant son arc :
    « C’est très aimable à vous, étranger. »
    Ses compagnons l’imitèrent et glissèrent leurs flèches dans leur
chevelure en bataille. L’un d’eux saisit mon macquauitl et l’examina
admirativement. Un autre entreprit de fouiller mon sac. Je pensais qu’ils
allaient peut-être me voler le peu que je possédais, mais j’espérais qu’ils ne
me tueraient pas. Tâchant de maintenir ce climat de cordialité, je dis au
veuf :
    « Je compatis à votre douleur. Votre femme était jeune et
avenante. De quoi est-elle morte ?
    — D’avoir été une mauvaise femme, répliqua-t-il d’un air sombre.
Elle a été mordue par un serpent à sonnette. »
    Je ne voyais pas très bien le rapport entre les deux mais je me
contentai de remarquer : « C’est bizarre, elle ne semble pas avoir
été malade.
    — Elle a survécu à la morsure, grommela-t-il. Mais elle s’était
d’abord confessée à Mangeuse de Saleté et j’étais à côté d’elle. Elle a avoué à
Tlazolteotl qu’elle avait couché avec un homme d’une autre tribu et par
malheur, elle n’est pas morte après. » Il secoua tristement la tête et
continua son récit. « On a attendu qu’elle soit guérie, car on n’exécute
pas une femme malade. Quand elle a été tout à fait remise, on l’a amenée ici,
ce matin, pour la faire mourir. »
    Je regardai le cadavre en me demandant quel genre d’exécution pouvait
laisser pour seuls stigmates des yeux fixes et une bouche hurlant
silencieusement.
    « On est venu pour l’emporter », conclut le veuf. Il me posa
une main amicale sur l’épaule. « On va s’en occuper ; ensuite,
peut-être voudrez-vous partager notre repas au campement ?
    — Avec plaisir », répondis-je.
    L’homme s’approcha de sa femme et la déplaça en la tirant vers le haut
avec beaucoup de difficulté. J’entendis un effrayant bruit d’arrachement, et
l’homme la dégagea du pieu sur lequel elle était empalée.
    Les neuf hommes me conduisirent ensuite jusqu’à leur campement et ils
me

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