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Barnabé Rudge - Tome II

Barnabé Rudge - Tome II

Titel: Barnabé Rudge - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Dickens
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continua le bourreau en opérant sa
retraite par où il était entré, et regardant son compagnon d'un air
sombre. Tu veux entrer, camarade, tu le veux ?
    – Quand je te dis que oui. Que
diable ! qu'est-ce que tu as donc ?… Où veux-tu
aller ?
    – Je vais où je veux, ça ne te regarde
pas, répliqua le bourreau, jetant encore du guichet de fer où il
était, et qu'il tenait entrebâillé, un regard dans la galerie,
avant de le fermer sur lui tout à fait. Ne t'inquiète pas où je
vais ; mais fais attention où tu cours : tu t'en
souviendras. Je ne t'en dis pas davantage. »
    Là-dessus, il secoua d'un air menaçant du côté
de Hugh son portrait sculpté sur sa canne, et, lui faisant une
grimace encore moins aimable que son sourire habituel, il ferma la
porte et disparut.
    Hugh ne perdit pas de temps. Stimulé à la fois
par les cris des condamnés et par l'impatience de la foule, il
recommanda au camarade qui était immédiatement derrière lui (il n'y
avait de place que pour un homme de front), de reculer un peu pour
ne pas attraper de mal, et brandit avec tant de force un marteau de
forge, qu'en quatre coups il fit ployer et rompre le barreau, qui
leur livra passage.
    Si les deux fils du prisonnier dont nous avons
parlé déployaient déjà auparavant un zèle qui allait jusqu'à la
fureur, on peut juger à présent de leur vigueur et de leur
rage ; ce n'étaient plus des hommes, c'étaient des lions.
Après avoir prévenu le prisonnier renfermé dans chaque cellule de
se reculer de la porte aussi loin qu'il pourrait, pour ne pas se
faire blesser par les coups de hache qu'ils allaient donner dans la
porte, ils se divisèrent en quatre groupe ; pour peser sur
elle chacun de leur côté, et l'enfoncer de vive force en faisant
sauter gâches et verrous. Mais, quoique la bande où se trouvaient
ces deux jeunes gens ne fût pas la plus forte, il s'en faut ;
quoiqu'elle fût la plus mal armée, et qu'elle n'eût commencé
qu'après les autres, c'est leur porte qui céda la première, et leur
homme qui fut le premier délivré. Quand ils l'entraînèrent dans la
galerie pour briser ses fers, il tomba à leurs pieds, comme un vrai
tas de chaînes, et on l'emporta dans cet état sur les épaules de
ses libérateurs sans qu'il donnât signe de vie.
    Ce fut là le couronnement de cette scène
d'horreur ; ce fut la mise en liberté de ces quatre
misérables, traversant en pareille escorte, d'un air égaré,
abasourdi, les rues pleines d'agitation et de vie, qu'ils n'avaient
plus espéré revoir jamais, avant le jour où on viendrait les
arracher à la solitude et au silence pour leur dernier voyage, le
jour où l'air serait chargé du souffle infect de milliers de
poitrines haletantes, où les rues et les maisons ne seraient plus
bâties et recouvertes de briques, de moellons et de tuiles, mais de
faces humaines étagées les unes au-dessus des autres. À voir en ce
moment leur figure pâle, leurs yeux creux et hagards, leurs pieds
chancelants, leurs mains étendues en avant pour ne pas tomber, leur
air égaré, la manière dont ils ouvrirent la bouche béante pour
respirer comme s'ils se noyaient, la première fois qu'ils
plongèrent dans la foule, on reconnaissait bien que ce ne pouvaient
être qu'eux. Il n'y avait pas besoin de dire : « Vous
voyez bien cet homme-là, il était condamné à mort ; » il
portait hautement ces mots-là imprimés et marqués du fer rouge sur
son front. Le monde se retirait devant eux pour les laisser passer,
comme si c'étaient des déterrés qui venaient de ressusciter avec
leurs linceuls ; et l'on vit plus d'un spectateur qui venait,
par hasard, de toucher ou de frôler leurs vêtements à leur passage,
frissonner de tous ses membres, comme si c'étaient en effet de
vrais morts.
    Sur l'ordre de la populace, les maisons furent
toutes illuminées cette nuit-là… avec des lampions, du haut en bas,
comme dans un jour de grande réjouissance publique. Bien des années
après, les vieilles gens, qui, dans leur jeunesse, habitaient ce
quartier, se rappelaient à merveille cette clarté immense en dedans
comme en dehors, et l'effroi avec lequel ils regardaient, petits
enfants, par la fenêtre passer
la Figure
. La foule,
l'émeute avec toutes les autres terreurs, s'étaient déjà presque
évanouies de leur souvenir, que celui-là, celui-là seul et unique,
était encore distinct et vivant dans leur mémoire. Même à cet âge
innocent de la première enfance, il suffisait

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