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Barnabé Rudge - Tome II

Barnabé Rudge - Tome II

Titel: Barnabé Rudge - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Dickens
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considérables de son
père, je désire ajouter, comme gage de mon affection, une pauvre
pitance qui ne vaut pas la peine d'en parler, et dont je n'ai plus
besoin. Je suis bien aise que vous alliez voyager à l'étranger. Que
notre maison maudite reste en ruines ! Quand vous reviendrez
après quelques années prospères, vous en ferez bâtir une meilleure,
et, j'espère, plus fortunée. Voulez-vous faire la
paix ? »
    Édouard prit la main que lui tendait Haredale,
et la serra cordialement.
    « Vous ne mettez ni retard ni froideur
dans votre réponse, dit M. Haredale, en lui rendant une
poignée de main aussi chaleureuse, et maintenant, que je vous
connais, je me dis, quand je vous regarde, que vous êtes bien
l'homme que j'aurais voulu lui choisir pour époux. Son père était
d'un caractère généreux, et vous lui auriez convenu tout à fait. Je
vous la donne en son nom, et je vous bénis pour lui. Si le monde et
moi, nous nous séparons là-dessus, nous nous serons séparés en
meilleurs termes que nous n'avons vécu ensemble depuis
longtemps. »
    Il la mit dans les bras de son mari, et il
allait quitter la chambre, quand il fut arrêté dans sa marche, sur
le pas de la porte, par un grand bruit dans le lointain, qui les
fit tressaillir en silence.
    C'était un tumulte éclatant, mêlé
d'acclamations frénétiques qui déchiraient l'air. Les clameurs
approchaient de plus en plus à chaque moment, avec tant de rapidité
que, rien que le temps d'y prêter l'oreille, elles éclatèrent en
une confusion de sons assourdissants au coin de la rue.
    « Il faut mettre ordre à ça… il faut
apaiser ce tapage, dit M. Haredale avec vivacité. Nous aurions
dû y penser et l'empêcher. Je vais les trouver à
l'instant. »
    Mais, avant qu'il pût atteindre la porte de la
rue, avant qu'Édouard eût eu seulement le temps de prendre son
chapeau pour le suivre, ils furent encore arrêtés par un cri
perçant, qui, cette fois, partait du haut de l'escalier. En même
temps la femme du serrurier se précipita dans la chambre, et
courant tout bonnement se jeter dans les bras de M. Haredale,
elle s'écria :
    « Elle sait tout, cher monsieur… elle
sait tout. Nous lui en avons dit quelques mots petit à petit, et
maintenant elle est toute préparée. »
    Après cette communication, accompagnée des
actions de grâces les plus ferventes pour remercier Dieu de ce
nouveau bienfait, la bonne dame, fidèle à l'usage classique des
matrones dans toutes les occasions d'une émotion vive, se pâma tout
de suite.
    Ils coururent à la fenêtre, levèrent le
châssis, et regardèrent dans la rue encombrée par la foule. Au
milieu d'une immense multitude parmi laquelle il n'y avait pas une
personne qui restât un moment en repos, on voyait en plein la bonne
grosse et rougeaude figure du serrurier, culbuté à droite, à
gauche, comme s'il luttait contre une mer agitée. Tantôt il était
emporté vingt pas en arrière, tantôt poussé en avant presque
jusqu'à la porte ; puis emporté par un nouveau flot, puis
pressé contre le mur d'en face, puis contre les maisons attenantes
à la sienne, puis soulevé jusque sur un perron où les bras d'une
cinquantaine de gens le poursuivaient de leurs saluts, pendant que
tous les autres, dans le plus grand tumulte, s'égosillaient à
l'applaudir de toutes leurs forces. Quoique véritablement il fût en
danger de se voir mettre en morceaux par l'enthousiasme général, le
serrurier, aussi rassuré que jamais, répondait à leurs acclamations
par les siennes, jusqu'à s'en faire mal à la gorge, et, dans un
élan de joie et de bonne humeur, il agitait son chapeau avec tant
d'ardeur, que le jour avait fini par y passer entre le bord et la
forme.
    Mais au milieu de tout cela, ballotté de main
en main, avançant un pas, reculant deux, poussé, bousculé comme il
était, il n'en reparaissait que plus jovial et plus radieux après
chaque assaut. La paix de son âme n'en était pas plus affectée que
s'il avait volé comme une plume sur la surface de l'eau et il n'en
tenait pas moins ferme, sans le lâcher seulement une fois, un bras
serré contre le sien ; c'était celui d'un ami vers lequel il
se tournait de temps en temps pour lui frapper sur l'épaule, ou
bien pour lui glisser un mot d'encouragement solide, ou bien pour
l'égayer par un sourire ; mais avant tout, son soin constant
était de le défendre contre l'empressement indiscret de la foule,
et de lui ouvrir un passage pour le faire

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