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Barnabé Rudge - Tome II

Barnabé Rudge - Tome II

Titel: Barnabé Rudge - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Dickens
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plus
d'impression sur l'esprit du gentleman que le babil de l'oiseau,
sans doute parce qu'ils répondaient mieux à ses habitudes et à ses
goûts. Il voulut lui faire répéter cet exercice ; mais, malgré
ses ordres péremptoires et les cajoleries de Barnabé, Grip resta
sourd à la requête et garda un morne silence.
    « Viens me l'amener, » dit le
gentleman en montrant du doigt le château. Mais Grip, qui ne
s'endormait pas, s'était douté de la chose, et se mit à sauter
devant eux, échappant à la poursuite de son maître ; il
battait des ailes et criait en courant :
« Marguerite, » afin d'annoncer à la cuisinière qu'il
arrivait de la compagnie, pour laquelle elle ferait bien de
préparer une petite collation.
    Barnabé et sa mère, chacun de leur côté,
accompagnaient le gentleman qui, du haut de son cheval, les
regardait, de temps en temps, d'un œil fier et farouche, vociférant
par-ci par-là quelque question dont Barnabé trouvait le ton si
sévère que, dans son trouble, il n'y faisait point de réponse. Ce
fut dans une occasion de ce genre que, voyant le gentleman disposé
à le châtier à coups de fouet, la veuve prit la liberté de
l'informer à voix basse, et la larme à l'œil, que son fils était
imbécile.
    « Tu es donc idiot, hein ? dit le
gentleman en regardant Barnabé. Y a-t-il longtemps que tu es
idiot ?
    – La mère sait ça, dit timidement
Barnabé. Moi je crois que je l'ai toujours été.
    – C'est de naissance, dit la veuve.
    – Je ne crois pas ça, dit le gentleman,
je n'en crois pas un mot. C'est une excuse pour faire le paresseux.
Il n'y a rien de bon comme le fouet pour guérir ça tout de suite.
Je vous réponds qu'il ne me faudrait pas dix minutes pour lui faire
passer cette maladie-là.
    – Le ciel y a mis vingt-deux ans déjà,
monsieur, sans y réussir, dit la veuve avec douceur.
    – Alors, pourquoi ne le faites-vous pas
enfermer ? Nous payons pourtant assez cher en province pour
ces institutions-là, que Dieu confonde ! Mais c'est que vous
aimez mieux le promener pour demander l'aumône, comme de raison.
Oh ! je vous connais bien. »
    Or, ce gentleman avait plusieurs petits
surnoms d'amitié dans ses connaissances. Les uns l'appelaient
« un gentilhomme campagnard de la bonne roche, » d'autres
« un gentilhomme campagnard du bon temps, » d'autres
« un Nemrod, » d'autres « un Anglais pur
sang, », d'autres « un vrai John Bull ; » mais
tous ils s'accordaient en un point : c'est que c'était bien
dommage qu'il n'y en eût pas beaucoup comme lui, et que c'était là
ce qui faisait que le pays marchait tous les jours à sa ruine. Il
était juge de paix : il savait à peine écrire son nom
lisiblement ; mais il avait des qualités de premier ordre.
D'abord, il était très sévère pour les braconniers ; ensuite
il n'y avait pas de meilleur tireur, de cavalier plus
intrépide ; nul n'avait de meilleurs chevaux, de meilleurs
chiens ; il mangeait de la viande, il buvait du vin comme
personne ; il n'y avait pas, dans tout le comté, un homme
comme lui pour se coucher tous les soirs plus aviné, sans qu'il y
parût le lendemain matin. Il se connaissait en bêtes chevalines
aussi bien qu'un vétérinaire ; il avait des connaissances en
écurie, qui faisaient honte à son premier cocher. Il n'avait pas un
porc dans ses étables qui pût se vanter d'être aussi glouton que
son maître. Il n'avait pas un siège au Parlement en personne, mais
il était extrêmement patriote, et menait ses gens au vote haut la
main. C'était un des plus chauds partisans de l'Église et de
l'État, et il n'aurait pas, au grand jamais, donné un bénéfice de
son ressort à un curé qui n'aurait pas justifié de boire ses trois
bouteilles à son repas, et de chasser le renard dans la perfection.
Il n'avait aucune confiance dans l'honnêteté des pauvres gens qui
avaient le malheur de savoir lire et écrire, et, dans le fond de
l'âme, il n'avait pas encore pardonné à sa femme d'en savoir
là-dessus plus long que lui. Bien entendu qu'il avait épousé cette
dame pour cette bonne raison que ses amis appelaient « la
bonne vieille raison anglaise, » à savoir que les deux
propriétés se touchaient. Bref, si nous appelons Barnabé un idiot
et Grip une créature de pur instinct animal, je ne sais plus trop
comment qualifier notre gentilhomme.
    Il poussa jusqu'à la porte d'une belle
habitation où l'on montait par un perron ; au bas des marches
se

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