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Barnabé Rudge

Barnabé Rudge

Titel: Barnabé Rudge Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Dickens
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et l'invita à dire ce qu’il
voulait lui communiquer, mais à ne pas le dire trop haut, parce
qu'il y avait de fines oreilles de l'autre côté.
    Ainsi dûment averti, M. Willet raconta
tout bas, tout bas, ce qu'il avait entendu dire, ce qu'il avait dit
lui-même pendant la soirée ; appuyant particulièrement sur sa
sagacité personnelle, sur son grand respect pour la famille, et sur
sa sollicitude pour la paix de leur esprit et leur bonheur.
L'histoire émut son auditeur beaucoup plus que John ne s'y était
attendu. M. Haredale changea souvent d'attitude, se leva,
marcha dans la chambre, revint s'asseoir, le pria de répéter, aussi
exactement que possible, les propres mots dont s'était servi
Salomon, et donna tant d'autres signes de trouble et de malaise,
que M. Willet lui-même en fut surpris.
    « Vous avez bien fait, dit-il en
finissant cette longue conversation, de les engager à tenir secrète
une pareille histoire. C'est une folle imagination, née dans le
faible cerveau d'un homme nourri de craintes superstitieuses. Mais
Mlle Haredale, malgré tout, serait troublée par ce conte, s'il
arrivait à ses oreilles ; cela se rattache de trop près à un
sujet qui nous navre tous, pour qu'elle en entendît parler avec
indifférence. Vous avez été très prudent, et je vous ai une extrême
obligation. Je vous en remercie beaucoup. »
    Ce remercîment répondait aux plus ardentes
espérances de John ; il eût toutefois mieux aimé voir
M. Haredale le regarder en lui parlant, comme si réellement il
le remerciait, que de le voir se promener de long en large, parler
d'un ton brusque et saccadé, s'arrêtant souvent pour fixer les yeux
sur le parquet, s'élançant de nouveau dans sa chambre comme un fou,
presque sans avoir l'air de savoir ce qu'il disait ni ce qu'il
faisait.
    Telle fut cependant son attitude pendant cette
communication, et John en était si embarrassé, qu'il resta
longtemps assis tout à fait comme un spectateur passif, sans savoir
quel parti prendre. À la fin il se leva. M. Haredale fixa sur
lui son regard étonné pendant un moment, comme s'il eût tout à fait
oublié sa présence, lui donna une poignée de main, et ouvrit la
porte. Hugh, qui était ou feignait d'être fort endormi sur le
plancher de l'antichambre, bondit sur ses pieds quand ils
entrèrent, et, jetant autour de lui son manteau, il empoigna son
bâton et sa lanterne, et se prépara à descendre l'escalier.
    « Attendez, dit M. Haredale, cet
homme boira peut-être bien un coup.
    – Boire ! Il boirait la Tamise,
monsieur, si ce n'était pas de l'eau, répliqua John Willet. Il aura
quelque chose quand nous serons rentrés au logis. Il vaut mieux
qu'il n'en ait pas avant, monsieur.
    – Là ! voyez ! la moitié de la
distance est faite, dit Hugh. Quel rude maître vous êtes ! Je
n'en irai que mieux au logis, si je bois un bon verre à mi-route.
Allons, un coup à boire ! »
    Comme John ne riposta pas, M. Haredale
apporta un verre de liqueur et le donna à Hugh, qui, en le prenant
dans sa main, en répandit une partie sur le plancher.
    « À quoi pensez-vous, monsieur,
d'éclabousser ainsi avec votre boisson la maison d'un
gentleman ? dit John.
    – Je porte un toast, répliqua Hugh,
levant le verre au-dessus de sa tête, et fixant ses yeux sur le
visage de M. Haredale, un toast à cette maison et à son
maître. »
    Il marmotta ensuite quelque chose pour lui
seul, but le reste du liquide, et, replaçant le verre, les précéda
sans ajouter un mot.
    John fut grandement scandalisé de cet
hommage ; mais, voyant que M. Haredale s'occupait peu de
ce que Hugh pouvait dire ou faire, et que sa pensée était ailleurs,
il se dispensa de lui présenter des excuses ; il descendit en
silence l'escalier, traversa l'allée du jardin et franchit la
grille. Il s'arrêta du côté extérieur pour que Hugh éclairât
M. Haredale, tandis que celui-ci fermait en dedans. John vit
alors avec étonnement (comme il le raconta maintes fois par la
suite) qu'il était très pâle, et que sa figure avait tellement
changé depuis leur entrée, et que ses yeux étaient devenus si
hagards qu'il semblait presque un autre homme.
    Ils furent bientôt sur la grande route. John
Willet marchait derrière son escorte, ainsi qu'en allant à la
Garenne, et pensait très posément à ce qu'il avait vu tout à
l'heure. Soudain Hugh le tira de côté, et presque au même instant
trois cavaliers passèrent au galop, il était temps, car le

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