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Barnabé Rudge

Barnabé Rudge

Titel: Barnabé Rudge Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Dickens
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joliment aux abois, elle le déploya
de son mieux.
    « Oui, monsieur, répliqua-t-elle, toute
tremblante et effrayée qu'elle était ; oui, monsieur, je l'ai.
Vous pouvez me tuer si vous voulez, monsieur, mais je ne m'en
dessaisirai pas. J'en suis très fâchée, mais je ne la livrerai
pas ; voilà, monsieur.
    – Je loue votre fermeté et votre
franchise, dit M. Haredale. Soyez assurée que je désire aussi
peu vous ravir votre lettre que votre vie. Vous êtes une très
discrète messagère et une bonne fille. »
    Ne se sentant point la pleine certitude, comme
elle l'avoua plus tard, qu'il n'allait pas sauter sur elle à la
faveur de ces compliments, Dolly se tint éloignée de lui autant
qu'elle put et pleura de nouveau, décidée à défendre sa poche (où
était la lettre) jusqu’à la dernière extrémité.
    « J'ai quelque intention, dit
M. Haredale après un court silence, pendant lequel un sourire,
alors qu’il regarda Dolly, avait percé le sombre nuage de
mélancolie naturelle répandue sur sa figure, de procurer une
compagne à ma nièce car sa vie est très solitaire. Aimeriez-vous
cette position ? Vous êtes la plus ancienne amie qu'elle ait,
et vous avez à notre préférence les meilleurs titres.
    – Je ne sais, monsieur, répondit Dolly,
craignant un peu qu'il ne voulût se moquer d'elle, je ne peux rien
vous dire. J'ignore ce qu’on en penserait à la maison, je ne peux
pas vous donner mon opinion là-dessus, monsieur.
    – Si vos parents n'y avaient pas
d’objections, en auriez-vous pour votre compte ? dit
M. Haredale. Allons, c'est une question toute simple, à
laquelle il est aisé de répondre.
    – Aucune absolument que je sache
monsieur, répliqua Dolly. Je serais fort heureuse sans doute d’être
auprès de Mlle Emma, car c'est toujours un bonheur pour
moi.
    – Très bien, dit M. Haredale. Voilà
tout ce que j'avais à vous dire, vous brûlez de vous en aller,
libre à vous, je ne vous retiens plus. »
    Dolly ne se laissa point retenir, et
n'attendit point qu'il l'essayât : car ces mots n'eurent pas
sitôt fui des lèvres de M. Haredale, que Dolly avait fui aussi
de la chambre et de la maison, et se retrouvait dans les
champs.
    La première chose qu'elle fit, comme de
raison, quand elle revint à elle-même et qu'elle considéra le grand
émoi où elle venait d'être, ce fut de repleurer de nouveau, et la
seconde, lorsqu'elle réfléchit au succès de sa résistance, ce fut
de rire de tout son cœur. Les larmes une bonne fois bannies
cédèrent la place aux sourires et Dolly finit par rire tant, mais
tant, qu'il lui fallut s'appuyer contre un arbre et donner carrière
à ses transports. Quand elle ne put pas rire davantage, et qu'elle
en fut tout à fait fatiguée, elle rajusta sa coiffure, sécha ses
yeux, regarda derrière elle avec une joie bien vive et bien
triomphante les cheminées de la Garenne qui allaient bientôt
disparaître à sa vue, et poursuivit sa route.
    Le crépuscule était survenu, et l'obscurité
augmentait d'une manière rapide dans la campagne ; mais Dolly
était si familiarisée avec le sentier, pour l'avoir traversé bien
souvent, qu'elle s'apercevait à peine de la brune, et n'éprouvait
aucun malaise d'être seule. D'ailleurs, il y avait le bracelet à
admirer ; et quand elle l'eut bien frotté et se le fut offert
en perspective au bout de son bras étendu, il étincelait et
reluisait si magnifiquement à son poignet, que le contempler dans
tous les points de vue, et en tournant le bras de toutes les façons
possibles, était devenu une occupation tout à fait absorbante. Il y
avait la lettre, aussi, et qui lui semblait si mystérieuse, si
rusée, quand elle la tira de sa poche, et qui contenait tant
d'écriture sur ses pages, que de la tourner, et retourner, en se
demandant de quelle manière elle commençait, de quelle manière elle
finissait, et ce qu'elle disait tout du long, cela devint un autre
sujet d'occupation continuelle. Entre le bracelet et la lettre, il
y eut bien assez à faire sans penser à autre chose ; et, en
les admirant tour à tour, Dolly chemina gaiement.
    Comme elle passait par une porte
d'échalier [21] , là où le sentier était étroit et
flanqué de deux haies garnies d'arbres de place en place, elle
entendit tout près d'elle un frôlement qui la fit s'arrêter
soudain. Elle écouta. Tout était tranquille, et elle poursuivit sa
route, non pas absolument avec frayeur, mais avec un peu plus de
vitesse

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