Ben-Hur
chambres sans nombre, on les conduisit jusqu’à une tour très élevée. Là, le guide s’arrêta et désignant de la main une porte ouverte, il dit :
– Entrez, le roi est là.
Ils se trouvèrent dans une chambre meublée avec luxe dont l’air était alourdi par une pénétrante odeur de bois de sandal. Un tapis précieux recouvrait le plancher. Les visiteurs ne firent qu’entrevoir un amas confus de sièges incrustés et dorés, d’éventails, de jarres brillamment décorées, de chandeliers d’or, que leur propre lumière faisait scintiller et les murailles peintes, devant lesquelles un Pharisien, saisi d’une sainte horreur, se serait voilé la face. Hérode sur son trône, absorbait toute leur attention. Ils se prosternèrent sur le bord du tapis. Le roi toucha une sonnette, quelqu’un s’approcha et plaça trois sièges devant le trône.
– Asseyez-vous, dit le roi gracieusement.
– J’ai appris, reprit-il quand ils eurent pris place, que trois étrangers, curieusement montés et paraissant venir de pays lointains, sont arrivés aujourd’hui par la porte du nord. Êtes-vous ces étrangers ?
Balthasar, sur un signe de ses compagnons, prit la parole :
– Si ce n’était pas, le puissant Hérode, dont la gloire est grande par toute la terre, ne nous eût point fait appeler !
Hérode approuva ce discours de la main.
– Qui êtes-vous ? D’où venez-vous ? Que chacun de vous réponde pour soi-même.
Ils lui rendirent compte, chacun à son tour, de ce qui les concernait, faisant mention simplement des pays et des cités de leur naissance et de ceux qu’ils avaient parcourus pour se rendre à Jérusalem. Un peu désappointé, Hérode les interrogea plus directement.
– Quelle est la question que vous avez adressée à l’officier qui se tenait près de la porte ?
– Nous lui avons dit : « Où est le roi des Juifs qui est né ? Car nous avons vu son étoile en Orient et nous sommes venus pour l’adorer. »
– Je comprends maintenant pourquoi la curiosité du peuple s’est éveillée. Vous excitez la mienne aussi. Y aurait-il donc un autre roi des Juifs que moi ?
L’Égyptien ne sourcilla pas.
– Il en est un qui vient de naître.
La sombre figure du monarque se contracta. Dominant son émotion, le roi poursuivit d’une voix ferme :
– Où est ce nouveau-né ?
– C’est là, ô roi, ce que nous désirons savoir.
– Vous me posez une énigme plus difficile que celles de Salomon. Expliquez-vous plus clairement, et je lui rendrai les honneurs que les rois ont coutume de se rendre entre eux. Racontez-moi tout ce que vous savez de cet enfant et je vous aiderai dans vos recherches, je ferai tout ce que vous désirerez, je le ferai venir à Jérusalem, je l’élèverai en prince et j’userai de mon influence sur César pour le décider à proclamer sa royauté. Je vous jure que la jalousie ne se dressera pas entre lui et moi. Mais avant tout, dites-moi comment il se fait que, séparés par des mers et des déserts, vous avez tous trois entendu parler de lui.
– Je te parlerai selon la vérité, ô roi Hérode, dit Balthasar. Tu sais qu’il existe un Dieu tout puissant.
Hérode, à ces mots, se troubla visiblement.
– C’est lui qui nous a ordonné de venir ici, en nous promettant que nous trouverions le Sauveur du monde, que nous pourrions l’adorer et rendre témoignage de sa venue. Comme signe il nous a donné, à chacun, une étoile et lui-même a été avec nous, ô roi !
Le regard soupçonneux d’Hérode allait de l’un à l’autre des trois hommes ; il était facile de voir que son mécontentement croissait.
– Vous vous moquez de moi, dit-il ; si cela n’est pas, parlez encore. Que résultera-t-il de la venue de ce nouveau roi ?
– Il sauvera le monde.
– De quoi ?
– De ses péchés.
– Par quels moyens ?
– Par ses vertus divines, la foi, l’amour et la charité.
– Ainsi vous êtes les hérauts du Christ. N’êtes-vous que cela ?
Balthasar s’inclina profondément :
– Nous sommes encore tes serviteurs, ô grand roi !
Le monarque agita de nouveau sa sonnette. L’officier de service parut.
– Apporte les présents, lui dit son maître.
Il sortit et revint presque aussitôt, puis s’agenouillant devant les visiteurs, il leur remit à chacun un manteau rouge et bleu et une ceinture d’or qu’ils reçurent en se prosternant à
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