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Berlin 36

Berlin 36

Titel: Berlin 36 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alexandre Najjar
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en visite à Berlin pour les mettre en garde contre le régime nazi…
    — Que dit-il ?
    Le pianiste s’éclaircit la gorge et commença à traduire le document à voix haute :
     
    A la question : « Qu’est-ce que les sportifs et les hôtes du monde entier ne doivent pas voir ici ? », il est répondu : « Il n’existe en Allemagne aucune liberté de la presse, aucune liberté d’organisation, aucune liberté d’opinion. Celui qui ose s’exprimer ouvertement contre n’importe quelle mesure du gouvernement hitlérien fasciste-réactionnaire est menacé de camp de concentration, de prison et de mort. Certes, le chômage a diminué, mais au prix d’une politique fébrile d’armement que le monde n’avait encore jamais vue. Cette militarisation menace sans aucun doute la paix en Europe et dans le monde, même si Hitler proclame à chaque occasion son amour de la paix. »
     
    Ayant achevé sa lecture, il replia le document, le rendit au Libanais et déclara d’une voix grave :
    — N’oubliez jamais ce que vous venez d’entendre. Ne vous laissez surtout pas embobiner par les nazis…
    Pierre Gemayel hocha la tête avec consternation. Il était venu à Berlin pour le football, pour l’athlétisme, par amour de la compétition et du beau jeu. Dans ses discours et ses livres, le baron de Coubertin lui avait enseigné que le sport est une école d’honneur, de courage et de discipline. Idéaliste, il l’avait cru.
    1 - Le Völkischer Beobachter était le journal du parti nazi.

25
    Où l’on voit Leni Riefenstahl
 s’enticher d’un éphèbe
    Le Junker 52 se posa à l’aéroport d’Athènes sans encombre. Leni Riefenstahl descendit de l’appareil et se dirigea vers la Mercedes qui l’attendait. Huit hommes de son équipe l’avaient précédée pour commencer à préparer le tournage du départ de la flamme d’Olympie. La chaleur, en ce mois de juillet, était si intense que l’air semblait trembler. Dès qu’elle fut à l’intérieur de la voiture, Leni défit les boutons de son chemisier et s’éventa avec un journal.
    — Tourner dans ces conditions sera un cauchemar, confia-t-elle à son chauffeur.
    — Vous en avez vu d’autres ! bredouilla-t-il, troublé par sa présence.
     
    Vers midi, la Mercedes s’arrêta à Olympie. Selon la légende, ce site avait été choisi par Pélops, fils de Tantale, roi de Lydie, pour y organiser les premiers Jeux dédiés à Zeus. Situé dans la plaine d’Elide, sur la rive droite de la rivière Alphée, au pied du mont Kronion, il accueillait autrefois un sanctuaire et une statue chryséléphantine de Zeus, haute d’une quinzaine de mètres. Leni mit pied à terre, se coiffa de son chapeau, salua machinalement ses collaborateurs qui avaient accouru à sa rencontre et se dirigea vers l’autel sur lequel la flamme olympique devait être allumée. Elle grimaça : l’endroit était d’une banalité affligeante et contrastait avec la majesté d’autres sites grecs comme l’Acropole.
    — Où est le bel éphèbe grec que je vous ai demandé de me trouver pour l’allumage de la torche ?
    Willy Zielke – celui-là même dont elle avait défendu le film auprès de Goebbels – lui montra du doigt un jeune homme convenablement habillé d’une tenue de sport blanche.
    — Lui ? gloussa-t-elle. On dirait un majordome !
    — C’est tout ce que nous avons trouvé…
    — Décidément, tempêta-t-elle, je dois tout faire moi-même !
    Elle commanda à l’équipe de planter les caméras et commença les prises de vue. Mais très vite, elle déchanta. Les coureurs qui devaient se relayer en brandissant la torche étaient happés par les curieux, les vendeurs de souvenirs et les touristes, et les voitures qui circulaient librement sur les routes gênaient le travail des techniciens. Elle décida alors de tourner les scènes ailleurs, loin des routes et des encombrements. Soudain, pendant qu’elle observait la course de relais à l’aide de ses petites jumelles, elle poussa un cri de surprise. Le quatrième coureur à porter la torche correspondait tout à fait au type idéal qu’elle recherchait pour jouer le rôle de l’allumeur de la flamme olympique dans une atmosphère à la fois antique et poétique.
    — Amenez-moi ce garçon ! ordonna-t-elle.
    Cinq minutes plus tard, l’athlète se présentait devant elle, torse nu et muscles saillants, vêtu d’un short noir moulant. Leni s’approcha de lui, émerveillée, et se mit à

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