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Bombay, Maximum City

Titel: Bombay, Maximum City Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Suketu Mehta
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pense qu’en septembre elle l’aura muté ailleurs. Son supérieur immédiat va être remplacé d’ici peu et il ne sait pas s’il pourra faire confiance au nouveau. Lorsqu’il ignore si ses chefs ont vraiment les coudées franches par rapport aux gangs, Ajay est obligé d’opérer dans la plus grande discrétion. S’il leur donnait les noms des personnes sur qui il enquête, il suffirait qu’elles appartiennent au gang auquel ils sont eux-mêmes liés pour qu’ils les en informent. Ajay doit agir en cachette, non seulement des taupes qui infestent les commissariats, mais aussi des roués politiques qui ont autorité sur lui.
    Depuis deux ans, et plus précisément depuis qu’il a été nommé à Bandra, Ajay a le sommeil perturbé. Il se tourne et se retourne dans son lit, repense aux différentes affaires qui l’occupent, essaie d’anticiper le prochain coup des gangsters. « Le matin, au réveil, je n’ai pas envie d’aller au bureau. Je me dis que je devrais aller voir un médecin, que je me tue au travail. » Les rares dimanches où il ne met pas les pieds au bureau, il est pris de panique à la tombée du jour parce qu’il a l’impression de ne plus contrôler ce qui se passe.
    « Ton fils a besoin de toi », lui a rappelé sa femme hier matin. Ajay me tend un journal posé sur son bureau ; dedans, il a coché un entrefilet consacré à Rahul, capitaine de son équipe de hockey et auteur d’un but décisif lors du dernier match. Son fils n’a pas encore lu ces lignes. Sachant déjà qu’il rentrera trop tard pour le féliciter, Ajay appelle Ritu pour qu’elle s’en charge à sa place. « À l’heure où je pars le matin, il dort, et le soir je rentre tard et il dort. Je ne vois jamais mon fils. »
    Une Maruti Omni banalisée vient de se garer devant le commissariat et des policiers en font sortir plusieurs hommes qui se cachent le visage. Peu après, un inspecteur entre dans le bureau d’Ajay avec Akbar, un rickshaw wallah d’Andhra soupçonné d’avoir tué plusieurs membres de la Compagnie-D. Akbar est sorti du système scolaire au terme de sa troisième année en primaire à l’école municipale d’Andhra. Son polo d’un blanc douteux s’orne d’un petit crocodile vert. Visiblement, il a l’esprit lent ; il se gratte la tête, dans une vaine tentative d’aviver sa mémoire. « C’était quoi, son nom déjà ? » – et ses doigts s’agitent mollement dans ses cheveux tandis qu’il répète « C’était quoi son nom à çui-là ? » Il ne cherche cependant pas à se dérober et se présente spontanément comme l’auteur des meurtres. Avant, il avait son propre rickshaw. Il l’a vendu parce qu’il avait besoin d’argent frais pour le mariage de sa sœur, à présent il doit en louer un. Les policiers le brutalisent pour la forme mais pourraient s’épargner cette peine. Akbar parle ouvertement de ses contrats. Sa première victime travaillait dans une auto-école. Son complice a tiré à deux reprises, lui une seule.
    « Où est-ce que tu as appris à te servir d’une arme à feu ? demande Ajay.
    — On m’en a donné une, on m’a montré où il fallait appuyer. Elle était déjà chargée. »
    Il semble avoir surtout à cœur de protéger son frère qui a joué un petit rôle dans l’affaire en allant chercher une partie de l’argent promis par le gang sur le trajet de la gare à chez lui.
    « Je vais traîner toute ta famille ici, lui promet Ajay. Tu as touché combien, au total ?
    — Ce coup-ci, quinze cents roupies. » Ensuite, il a réglé son sort à un membre de la Compagnie-D, abattu de deux balles à un feu rouge alors qu’il essayait désespérément de se cacher à l’arrière de sa Jeep. « J’ai gagné trois mille cinq cents roupies net en tout.
    — Qu’est-ce que tu as fait du fric ?
    — Je l’ai dépensé pour ma femme et mes gosses. J’en ai deux, un de six ans et un petit de six mois.
    — Tu as bousillé la vie de tes mômes ! s’emporte Ajay avant d’enchaîner avec une question que j’ai moi-même souvent posée à Bombay : Ça ne te fait rien de supprimer une vie comme ça ?
    — Une fois la balle partie, je sais pas où elle va. Je descends le gars de très près » – et il nous montre, le bras tendu, qu’il tire en effet à bout portant. « Si je devais le viser de loin je pourrais pas.
    — C’est un démon, intervient l’inspecteur. Il faudrait l’achever. »
    Une fois l’homme

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