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Borgia

Titel: Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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pommadé, fardé, toujours à la dernière mode. Il avait un visage rose et frais, un air de candeur fait pour inspirer confiance.
    – Voyons, l’abbé, dit César en se jetant sur un fauteuil, que pensez-vous de la situation ?
    L’abbé Angelo tressaillit. Jamais César ne lui avait parlé de choses sérieuses. Maintes fois, il avait assisté à des conseils de famille, sans qu’on prît garde à lui.
    – Monseigneur, répondit-il en s’efforçant de rougir, une si grave question… à moi…
    – Les hommes intelligents sont rares… et plus rares encore les serviteurs dévoués. Vous êtes de ceux-là : parlez donc en toute franchise et sans mâcher les mots.
    L’abbé s’était remis. César avait quelque chose de grave à lui demander. Il quitta séance tenante cet air enjoué dont il se faisait un masque.
    – Monseigneur, dit-il, voici mon avis tout net : à moins d’un événement considérable et imprévu, je pense que la situation est désespérée. Ce qu’il y a de grave, ce n’est pas que vos troupes, monseigneur, aient subi un échec immérité. Les échecs se réparent… Non. Ce qui est effrayant, c’est que Sa Sainteté se soit trouvée dans un tel état d’esprit qu’elle ait cru devoir mettre la mer entre elle et Rome…
    – Savez-vous que vous êtes fort intelligent, l’abbé ?… Tout ce que vous venez de dire est très juste… La mitre irait bien à votre tête intelligente…
    Angelo avait un peu pâli.
    – Si Dieu et le Saint-Père m’appelaient au soin de gouverner un diocèse, dit-il sourdement, je crois, en effet, que le pape n’aurait pas à s’en repentir.
    – Malheureusement, mon père ne songe pas à vous !…
    – C’est la vérité même, monseigneur !
    – Vous disiez qu’un événement considérable pourrait seul modifier la face de la situation. De quelle nature, selon vous, devrait être cet événement ?…
    L’abbé ne répondit pas. César se leva et se rapprocha de l’abbé :
    – Que pensez-vous de mon père ? demanda-t-il à brûle-pourpoint.
    L’abbé eut un frisson. Il leva les yeux sur son interlocuteur et, d’une voix sourde, il répondit :
    – Le pape est bien vieux… voilà ce que j’en pense !…
    – Expliquez-vous… Parlez sans crainte…
    – Ce que je viens de dire, monseigneur, enferme toute ma pensée… Le pape est trop vieux… Il est fatigué… Son règne a été glorieux, trois fois saint… mais ce règne a épuisé ses forces…
    – Que feriez-vous pour qui vous nommerait évêque ?…
    – Tout !
    – Mais pour vous nommer, il faut être pape, n’est-ce pas ?… Si je l’étais, moi, vous auriez la mitre, Angelo !
    L’abbé comprit que, maintenant, ce qu’il pourrait dire était inutile. Seulement, ses mains tremblaient légèrement.
    – Angelo, reprit César à voix basse, veux-tu être évêque… et plus tard cardinal ?…
    L’abbé s’inclina profondément, s’agenouilla presque, et d’une voix presque indistincte, prononça :
    – J’attends vos ordres, Saint-Père !…
    – C’est bien, l’abbé. On ne m’avait pas trompé.
    Cependant, César s’était assis à une table et s’était mis à écrire. Quand il eut fini, il tendit à l’abbé le parchemin sur lequel il venait d’apposer sa signature.
    – Lisez, dit-il. Entre nous, maintenant, il n’y a plus rien de secret. La lecture de cette lettre vous indiquera ce que j’attends de vous.
    L’abbé se mit à lire attentivement, en pesant chaque mot :
    « Ma chère sœur,
    L’abbé Angelo, qui vous remettra ce mot et en qui j’ai pleine confiance, vous dira pourquoi je ne puis vous rejoindre à Caprera. J’espère pourtant y venir dans quelques jours. Je pense que notre père jouit d’une bonne santé ; mais je n’ose trop m’arrêter à cet espoir. La dernière fois que je l’ai vu, il m’a semblé bien mal et je redoute une issue fatale. Si ce douloureux événement survenait à bref délai, l’abbé Angelo viendrait m’en prévenir. Adieu, ma bien chère sœur. L’abbé Angelo vous aidera à donner à notre père les soins que nécessite son état ; mais je crains que les médicaments dont il est porteur soient impuissants à enrayer le mal. Je vais marcher sur Rome où j’attendrai des nouvelles avec une impatience que vous devez concevoir.
    Votre frère,
    CÉSAR, DUC DE VALENTINOIS ».
    Lorsque l’abbé eut fini de lire cette lettre, César Borgia le regarda fixement.
    – Voyons, fit-il

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