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Byzance

Byzance

Titel: Byzance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michael Ennis
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faites venir mon secrétaire.
    Attaliétès brandit son poing déformé.
    — Et que le reste d’entre vous file d’ici.
    * *
*
    Les enfants se cachaient derrière les tuniques de laine grossière de leurs mères. Les hommes lançaient un coup d’œil affolé puis baissaient leurs regards vers les pavés jonchés d’ordures. L’homme au cheval noir continua d’avancer : Joannès était dans les rues.
    Lorsqu’il monta vers le palais du sénateur et magister Nicon Attaliétès, les clameurs se turent. Le grand silence vide qui précédait l’orphanotrophe Joannès comme le déclenchement d’une force de la nature n’exprimait ni crainte ni vénération, mais un profond respect. Tous avaient eu un ami, un voisin ou un parent soigné gratuitement dans l’un des hôpitaux de l’orphanotrophe. Et tous connaissaient quelqu’un qui avait disparu sans retour dans une de ses prisons.
    Comme à son habitude, Joannès était seul. Il mit pied à terre devant la grille du palais d’Attaliétès. Des mains calleuses s’avancèrent pour tenir la bride du cheval, et caresser ses flancs d’obsidienne, comme si flatter cette grande bête pouvait en quelque manière concilier les faveurs de l’autre.
    — Orphanotrophe, dit le chambellan d’Attaliétès en s’inclinant très bas.
    La colonnade conduisait à une cour dans le style d’un palais maure d’Ibérie, fantaisie scintillante d’or, de lapis-lazuli et de céramiques en damiers. Des poissons rouges nageaient dans les bassins d’azur. Joannès apprécia l’ironie de son intrusion monochrome dans ce décor coloré. Il était un linceul noir ambulant ; et sa poitrine un sépulcre pour les rêves du vieillard. Il prendrait plaisir à écraser Nicon Attaliétès. Il y avait seulement deux personnes sur terre dont la destruction lui donnerait plus de joie.
    Les portes d’argent décorées de lions presque grandeur nature s’écartèrent. Joannès resta sans voix. Incroyable. Attaliétès ne vivait pas comme un simple empereur, main élue de Dieu. Non, ses ambitions allaient même au-delà de ce blasphème. Attaliétès était assis sur un trône au milieu d’une immense salle. Les mosaïques dorées qui recouvraient le dôme au-dessus de lui scintillaient comme le soleil. De chaque côté du trône, qui ressemblait à une chapelle, s’étendaient deux bassins très longs en mosaïques dorées, entourés d’une ménagerie de pierre qui crachait d’éblouissants jets d’eau. Les yeux d’Attaliétès semblaient des pierres. « Les pierres tombales de son espoir », songea Joannès.
    — Orphanotrophe.
    Joannès choisit le salut qui offenserait le plus Attaliétès, le salut qu’il aurait offert au premier venu dans la foule dehors.
    — Mon frère…
    — À quel prix achèterons-nous nos vies ?
    Joannès fit claquer sa cravache contre sa jambe.
    — Avec quoi paieriez-vous, frère Attaliétès ? Vous avez emprunté à Nicéphore Argyros l’argent de vos achats en Cilicie et en Arménie. On dit qu’Argyros a ordonné à ses agents d’exiger de vous le taux usuraire de douze pour cent.
    Attaliétès faillit s’étouffer. Il était assez humiliant d’avoir dû serrer la main d’un homme comme Argyros, un homme dont les mains étaient si profondément souillées par la saleté du commerce que jamais elles ne seraient propres malgré toutes les robes de soie qu’il pourrait porter et tous les palais qu’il pourrait construire.
    — J’ai signalé au marchand Argyros que je l’exempterais de châtiment de cette exaction usuraire s’il présentait immédiatement ses reconnaissances de dettes.
    Le visage du sénateur devint si violacé que les lésions de sa peau disparurent presque. Il ne connaissait pas les chiffres exacts et n’avait nullement besoin de les connaître. Les acquisitions qu’il avait faites étaient d’excellentes affaires à l’époque. Mais la valeur des terres n’avait cessé de baisser le long de la frontière sarrasine, et jamais il ne pourrait rembourser les dettes de ce maudit marchand, même en revendant tout. Ses doigts déformés lâchèrent les crânes des lions d’or rugissants qui ornaient les accoudoirs de son trône.
    — Comme je ne peux pas payer cette dette en solidi, quelle monnaie demandez-vous ?
    — Votre complicité, répondit Joannès en fronçant ses sourcils noirs. La vôtre et celle de toute la clique Attaliétès du Sénat.
    Attaliétès sentit un courant d’air frais dans ses

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