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Byzance

Byzance

Titel: Byzance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michael Ennis
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corniche, puis se laissa glisser sur le toit de bois de la galerie.
    Il s’arrêta pour examiner une des statues de marbre, une femme presque aussi grande que lui, vêtue d’une robe de voile qui tourbillonnait autour de ses jambes et s’accrochait à ses seins généreux ; le sculpteur avait tant de talent que Haraldr put deviner les mamelons à travers le tissu. Il tendit la main vers la robe ; elle était lisse, presque sans texture, comme de la vraie soie. Il se recula. Elle avait une bouche si délicate, aux commissures si fines, qu’elle semblait sur le point d’entrouvrir les lèvres et de respirer. Avec une acuité terrifiante, il se souvint de Maria à Daphné, de l’instant où elle avait effleuré les lèvres de la statue puis retiré le doigt comme si elle avait touché de trop près la vie enfermée dans la pierre ancienne. Ou bien était-ce la mort qu’elle avait touchée ?
    Haraldr se laissa tomber sans bruit dans le Forum et courut aussitôt vers l’énorme piédestal pyramidal qui servait de base à la colonne surmontée par la statue de Constantin le Grand. Il s’accroupit près du grand socle de marbre et leva les yeux. La statue portait une étrange couronne, un éventail de rayons qui lui sortaient de la tête comme de la lumière glacée. Sa décision était prise. S’il s’opposait à Mar, sans doute mourrait-il, quelle que fût la personne que Mar servait et la fin qu’il poursuivait. Mais si Haraldr traitait avec lui, il pourrait au moins sauver ses hommes liges. Il ôta sa cape et la posa sur le sol à quelques coudées de lui, puis il prit son poignard dans sa botte, ôta l’épée courte de sa ceinture, et posa les deux armes sur la cape. Il s’accroupit et plaça les bras autour de ses genoux, dans la posture d’un captif sans défense. Il attendit.
    Le bras autour de son cou comprima sa trachée-artère avec une efficacité paralysante, et son cri d’alarme demeura étranglé dans sa gorge. D’une secousse, on le releva et un autre bras enveloppa son buste comme une bande d’acier. « Aucun homme n’a autant de poigne, songea Haraldr. Seulement Odin. »
    — Je jure que nos vies sont perdues si vous criez, chuchota Mar Hunrodarson d’une voix pressante.
    Il libéra Haraldr de cette étreinte contre nature, puis ramassa ses armes et sa cape, qu’il lui lança.
    — Pas un bruit, murmura-t-il.
    Pendant un instant, Mar parcourut des yeux le vide du Forum. Ses tempes battaient. Il entraîna Haraldr dans le noir. Trop surpris pour discuter, Haraldr essaya de ne pas perdre de vue le dos de Mar qui s’éloignait. À une quarantaine de coudées de la galerie, Mar s’arrêta. D’un geste vif, il lança un poignard, qui brilla un bref instant, vers un porche plongé dans l’ombre. Un cri pareil à un vent d’hiver erra entre les colonnes. Mar s’élança au pas de course.
    Quand Haraldr arriva, Mar avait déjà retourné le cadavre. L’homme avait abandonné son manteau dans sa fuite et ne portait qu’une tunique de laine. Du sang luisait sur sa barbe sombre.
    — Vous le connaissez ? demanda Mar.
    Haraldr secoua la tête. Il ne l’avait jamais vu.
    — Il est à la solde de Joannès, dit Mar en se relevant pour fixer Haraldr de ses yeux bleus intelligents et féroces. La maison que l’orphanotrophe Joannès vous a si généreusement offerte est un nid d’espions et de mouchards.
    Haraldr considéra le tournant que prenait la situation avec un intérêt détaché, comme s’il était devenu un simple spectateur de sa propre vie.
    — Peut-être Joannès a-t-il simplement chargé cet homme de me protéger, dit-il.
    Mar plissa les yeux.
    — Si vous vivez assez longtemps pour devenir roi, on vous appellera Haraldr-à-la-tête-de-linotte. Vous avez vu avec quelle efficacité cet homme vous a protégé quand j’ai fait mine de vous attaquer.
    La raillerie de Mar fit revenir Haraldr à la réalité. Le destin lui offrait une seconde chance, les Walkyries attendraient encore. Fallait-il traiter avec le démon ? Joannès avait-il appris le complot de l’impératrice et la complicité de Haraldr ? Le faisait-il suivre pour cette raison ? Mais si c’était le cas, pourquoi Mar aurait-il tué le mouchard de Joannès, à supposer qu’il serve le même maître ? Haraldr sentit son estomac se nouer. Mar faisait-il également partie du complot contre l’empereur ? « Traite avec le démon », lui suggéra le destin.
    — Peut-être Joannès me

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