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Byzance

Byzance

Titel: Byzance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michael Ennis
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savait pas comment, mais cela s’était passé. Il se pencha près de l’oreille du jarl Rognvald. C’était leur secret, le lien qui les unirait entre les mondes et par-delà le temps.
    — J’ai rencontré la bête, dit-il. J’ai résisté. Mais je crois qu’une autre épreuve m’attend.
    Le jarl se tourna vers lui. C’est à peine si ses lèvres bougèrent.
    — Il y a toujours une autre bête à abattre. Quand la dernière bête sera abattue, le temps s’achèvera. Je reviendrai à ce moment-là, pour lever l’épée contre le dernier dragon. À présent, je sais que tu y seras aussi. Je meurs heureux.
    Un sanglot s’échappa de la gorge de Haraldr. Le jarl parvint à lui saisir le bras en une dernière étreinte.
    — Ne pleure pas ce vieux païen, dit-il. Odin a déjà réservé ma place sur les bancs du Walhalla. Je boirai avec ton frère ce soir. Fais-moi honneur en m’écoutant bien, à présent.
    Il s’interrompit pour rallier ses dernières forces.
    — Je te remets mon commandement. La flotte entière. J’ai déjà parlé à Gleb et il est d’accord.
    Haraldr resta sans voix. Commander une flotte, lui qui venait à peine d’apprendre à commander son propre courage ?
    — Jarl, je ne suis pas…
    Le jarl l’arrêta.
    — Ton sang est le sang de rois et de dieux. Ton arrière-arrière-grand-père était Haraldr le Blond, et il descendait du dieu Frey. Cela te donne le pouvoir de commander. Tu l’as montré aujourd’hui. Le pouvoir est venu avec la Rage.
    « Est-ce vrai ? songea le jeune homme. Peut-être. Ton père était un roi issu de rois. Tu as siégé maintes fois au conseil de ton frère. Tu n’as pas peur de commander…»
    — De toute manière, reprit le jarl, je ne te le demande pas. Je l’ordonne. Ce sera mon dernier ordre : tu assumeras mes responsabilités. Je te ferai enchaîner avec les esclaves si tu désobéis… Et maintenant, apporte-moi mon coffre.
    Haraldr posa le vieux coffre de bois près du jarl. Il y avait à l’intérieur les trésors et les nécessités d’une vie entière. Des outils, des couteaux, des pièces d’or et d’argent, une défense de morse, un marteau de Thor en argent, des perles de verre, une robe de drap de Frise et une autre de soie, un ours sculpté dans du bois. Et une splendide byrnnie à maillons serrés et lourds, polis et brillants, comme neuve. Haraldr ignorait que le jarl Rognvald eût deux byrnnies, il ne portait jamais celle du coffre.
    — J’ai parlé à Gleb. Il m’a dit qu’à Cherson il y a un endroit où des sorciers de Kristr racleront la chair de mes os et mettront ceux-ci dans un autre coffre. Ensuite, j’ai prévu que mes deux coffres seraient renvoyés en Norvège. Je ne veux pas dormir dans la mer de Rus, ni sur ce maudit fleuve, ni dans la terre de Iaroslav. Je repartirai enfin au pays.
    Haraldr voulut refermer le coffre.
    — Attends. Il y a là une chose dont je n’aurai pas besoin au Walhalla. Cette chemise. Elle est à toi.
    Haraldr fouilla dans les vêtements du coffre. Quelle chemise ?
    — La chemise cousue au marteau.
    Haraldr, ébloui, posa la main sur les maillons froids, presque soyeux de la byrnnie.
    — Eh bien, mets-la. De l’acier grec, et la fabrication aussi est grecque. Mais elle est de la taille d’un homme du Nord.
    Haraldr enfila la byrnnie. Elle le moulait comme une fine tunique de laine. Elle tombait si bien que l’on remarquait à peine son poids. La chemise cousue au marteau, l’invulnérable deuxième peau des plus puissants guerriers.
    — Elle s’appelle Emma, dit le jarl Rognvald. Je l’ai achetée à Kiev pour toi quand j’ai appris que tu m’accompagnerais. Je comptais te la donner quand elle t’irait bien. Ce moment est venu.
    Haraldr devina que si le jarl Rognvald avait porté Emma au lieu de sa vieille byrnnie, la lance ne lui aurait pas percé le flanc. Il s’agenouilla et posa la tête sur l’épaule du vieil homme, soudain incapable de retenir ses sanglots.
    — Il fait froid où je vais, dit le jarl.
    Il frissonna et du sang noir coula de sa blessure.
    — Les ailes de la Walkyrie bloquent le soleil.
    Haraldr saisit de nouveau la main du jarl et sentit le dernier sursaut de la vie.
    — Il y a un proverbe, murmura le jarl. La fortune meurt, la famille meurt, l’homme même doit mourir. Mais la renommée ne meurt jamais pour qui l’a méritée.
    Le jarl toussa et se mit à trembler.
    — Je suis un vieux païen qui a servi les rois de

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