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Byzance

Byzance

Titel: Byzance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michael Ennis
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tourmentée serait finalement forcée d’affronter ses propres démons.
    Le voyage souterrain s’acheva, aussi brusquement qu’un rêve agité.
    Il s’éveilla. Des cristaux de glace dans le soleil. De la glace d’acier. Le Petchenègue portait un casque conique du Nord ; une cuirasse d’acier protégeait sa large poitrine. Haraldr leva enfin son épée, entraîné par le cyclone du monde de l’esprit. Puis l’épée tomba.
    Le bras droit du Petchenègue et la moitié de son corps disparurent. Du sang jaillissait comme si son cœur avait explosé. « Ce n’est pas la Rage, pensa très distinctement Haraldr, mais la volonté : la nécessité de se décharger comme un nuage d’orage crache du feu. » Son épée se souleva de nouveau. Ce n’était plus un objet de métal mais une force de la nature qui battait comme une aile de corbeau et griffait comme les serres d’un aigle. Les Petchenègues terrifiés reculèrent du cercle qu’elle décrivit.
    Trois Varègues étaient encore aux côtés de Haraldr, et Gleb tapi contre son dos. De la main gauche, il saisit la byrnnie du jarl Rognvald par le col. Au même instant, il vit un détachement de Rus en armure batailler sur la hauteur, à une soixantaine de coudées.
    Traînant le jarl Rognvald et creusant une percée de sang dans la masse des Petchenègues, Haraldr conduisit ce qu’il restait de son groupe vers la sécurité.
    — Donc, Alexandros n’apprécie pas la poésie…
    Les yeux bleus de Maria passèrent d’Alexandros, assis à sa droite, à Giorgios, assis à sa gauche. Sa langue s’attarda un instant sur le bord doré de son gobelet d’agate.
    — Et vous, Giorgios, que pensez-vous du Digenes Akrites ?
    Giorgios tendit légèrement son cou musclé, comme s’il trouvait trop étroit le col haut, orné de perles, de sa robe de cérémonie. Il avait des cheveux bouclés, couleur de sable ; un élégant nez grec ; et des yeux marron étrangement innocents. De la sueur perlait à son front et il lança un regard nerveux à son ami, comme s’il sollicitait un conseil. La soirée ne s’était pas passée comme ils s’y attendaient. Ils avaient entendu des ragots sur la maîtresse des robes, bien entendu, et ils avaient imaginé une soirée de turpitudes dans le genre que seules proposaient les prostituées vérolées du Stoudion, le quartier louche bien connu de Constantinople.
    Au lieu de cela, la maîtresse des robes leur avait fait subir un décorum rigide et une discussion barbante ; les anciens philosophes grecs, les hérésies religieuses qui se multipliaient dans la ville, et les possibilités économiques que représentait le commerce renouvelé avec les Barbares du Nord. Le bruit courait qu’une flotte marchande arriverait de Rus dans quelques semaines. À présent le sujet était la littérature. Le Digenes Akrites était une épopée populaire d’héroïsme et d’amour sur les confins de l’empire, du côté des califats et des émirats sarrasins.
    — Je ne pense pas que le Digenes Akrites offre un tableau exact de la vie sur la frontière de l’Est, avança Giorgios d’une voix hésitante.
    Maria avait conclu dès le début qu’elle préférait Giorgios à Alexandros, bien que dans les yeux bleus de ce dernier perçât une lascivité à peine contenue qu’elle trouvait séduisante. Mais Giorgios, en dépit de sa morgue étudiée de cavalier d’élite, avait le don précieux de douter de lui-même.
    — La vérité et le romanesque sont deux choses à part, dit-elle.
    En un mouvement de ballet, cinq eunuques en robes de soie desservirent les vastes coupes d’or contenant les fruits, versèrent du vin pur dans les gobelets d’agate et disparurent vivement. Les lourdes portes de bronze se refermèrent en silence derrière eux.
    — Si nous percevions seulement la vérité, reprit Maria, nous serions incapables d’aimer.
    — Vous pensez à l’amour physique ou à l’amour spirituel ? demanda Alexandros. L’amour spirituel est peut-être capable d’abuser les sens. Mais l’amour physique ?
    Enhardi par le vin, il laissa glisser son regard sur son hôtesse. Elle haussa légèrement ses sourcils bruns et le fixa. Il eut l’impression qu’un courant passait des yeux de la femme jusqu’à ses testicules.
    — Vous demandez de quelle manière des corps nus peuvent dissimuler la vérité ?
    Maria plissa les lèvres de dégoût.
    — Mais si un amant pouvait voir la vérité de la chair de sa partenaire, sa

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