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Byzance

Byzance

Titel: Byzance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michael Ennis
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qu’Odin m’épargnera assez longtemps pour cela.
    — Oui, dit Halldor dont la voix se brisa pour la première fois depuis qu’Ulfr le connaissait. Jamais nous ne reverrons notre camarade dans le royaume du milieu. Mais demain, nous le verrons au Walhalla. La seule joie de tout ceci, c’est que demain je viderai les coupes d’hydromel d’Odin avec Haraldr. Et je lui apporterai mille âmes en témoignage de mon amour et de mon respect, ajouta-t-il d’une voix plus ferme.
    Ulfr fit la grimace pour arrêter ses larmes et montra la piste où un détachement d’artisans s’entraînait à l’attaque à la lance.
    — Nous emmènerons de nombreuses âmes avec nous. Ton idée de former des unités selon les professions était excellente. Tous ces artisans deviennent déjà une armée valable. Et ce qui manque au peuple du Stoudion sur le plan de la tactique, il le compensera en férocité et courage.
    — Jamais je n’ai vu les Varègues si assoiffés du breuvage de l’aigle. On dirait chacun d’eux possédé par la Rage d’Odin, répondit Halldor.
    Les groupes de Varègues étaient déjà en armure pour la plupart ; ils s’apprêtaient à passer la nuit avec leur casque pour oreiller. Ils étaient en train d’affûter leurs épées ou de fabriquer des échelles de siège.
    Il remarqua soudain un Varègue vêtu d’une tunique de laine grossière ridicule, beaucoup trop petite pour lui, qui traversait en titubant les rangs d’artisans qui s’entraînaient.
    — Tous sont impatients de se battre sauf ce jean-foutre, lança Halldor en se moquant. Il doit avoir trouvé la seule auberge ouverte de toute la ville. Demain il découvrira que quelqu’un frappe à coups de hache sur son casque avant même de voir les hommes de Mar. Qui est-ce ? Erland ? demanda-t-il en plissant les yeux à la lueur vacillante des centaines de torches.
    Ulfr fit un bond en avant, comme attiré par une vision stupéfiante. Il s’arrêta au bout de quelques pas et un son incohérent monta de sa gorge. Puis il se précipita vers le Varègue titubant et faillit le renverser par l’élan de son étreinte. Il se mit à sangloter comme une femme. Le Varègue ivre releva Ulfr et dut le soutenir jusqu’à Halldor.
    Halldor sourit jusqu’aux oreilles malgré ses efforts pour rester impassible.
    — Haraldr, dit-il d’une voix neutre que démentaient les larmes qui perlaient dans ses yeux. Haraldr, je savais bien que c’était vous. Vous ressemblez vraiment à de la crotte de mouette. C’est bien normal que ces salopes de Walkyries vous aient renvoyé.
    Le silence qui planait au-dessus de la Grande Ville semblait surnaturel, troublé seulement de temps à autre par le cri d’un animal inquiet : le chant d’un coq dans le lointain ou l’aboiement d’un chien aussitôt assourdi par la brume grise qui précède l’aurore. On eût dit que les habitants humains de la ville obéissaient à la même peur collective, et qu’ils craignaient de parler et de bouger de crainte de mettre en branle la journée horrible qui les attendait.
    Dans le Gynécée impérial, Michel, empereur, autocrate et basileus de Rome, serrait convulsivement les mains de l’impératrice Zoé en une communion aussi silencieuse que la ville. Incapable d’affronter du regard les yeux hagards, cernés de noir, et la tête rasée de l’impératrice, il demeurait tête baissée, honteux. La pénombre de la chambre de Zoé dissimulait le visage de l’empereur baigné de larmes. Enfin, Zoé libéra ses mains et caressa les boucles noires de Michel.
    — Je te pardonne, mon petit garçon, chuchota-t-elle.
    Et sur ces paroles l’énorme machinerie du destin entama une nouvelle journée.
    * *
*
    Mar Hunrodarson, debout sur la passerelle au-dessus du toit de la loge impériale, semblait un Titan vivant au milieu des statues immortelles qui entouraient le niveau le plus élevé de l’Hippodrome. Les Varègues de Mar formaient un mur de protection gris terne autour de la loge. Les archers et les lanceurs de javelots de la Taghmata impériale, autre muraille d’étain clair avec leurs plaques pectorales et leurs casques d’acier, avaient pris position sur les gradins les plus élevés du côté nord de la loge et attendaient le massacre qui emplirait les dizaines de gradins vides au-dessous d’eux. Sur la piste, juste au-dessous, l’armée de sac et de corde du Stoudion s’était rassemblée. Presque tous portaient la même tunique brune ; ils étaient

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