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Byzance

Byzance

Titel: Byzance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michael Ennis
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épouvantable encore, le nouveau Tauro-Scythe avait capturé presque deux cents bateaux pirates tout au bout de la terre. Juste ce qu’il fallait pour déchaîner l’imagination dangereuse des masses.
    Dalasséna serra les poings. Quelle folie ! Son appel généreux à l’hétaïrarque prétentieux, Mar Hunrodarson, ne lui avait même pas valu un mot de réponse. Manifestement, Hunrodarson n’était pas au courant des directives de l’empereur ordonnant le renforcement de la Moyenne Hétaïrie, garde impériale moins prestigieuse, affaiblie depuis des décennies et composée en ce moment de transfuges sarrasins que l’on récompensait ainsi de leur conversion au christianisme et de leur allégeance à l’empereur. La directive impériale proposait de réorganiser la Moyenne Hétaïrie en une deuxième Garde varègue, en nombre égal à l’effectif de la Grande Hétaïrie de Mar Hunrodarson. Et cette initiative n’avait pas été prise à l’instigation de l’hétaïrarque, Dalasséna en était certain. De toute évidence, cela signifiait que le jeune Barbare à la chance insolente, Haraldr Nordbrikt, bénéficiait de l’appui d’un personnage haut placé, sans doute désireux de trouver un rival à Mar Hunrodarson. Pourquoi Hunrodarson, pourtant aussi rusé qu’ambitieux, ne voyait-il pas qu’on allait lui faire partager son os avec un autre chien aussi méchant que lui ?
    Dalasséna prit sa plume, de l’encre et une feuille de papier d’Alexandrie, et rédigea laborieusement une note au domestique des Hyknatoï –  l’un de ses subordonnés qui occupait un poste clé dans la Taghmata impériale – pour lui signifier les mesures à prendre.
    Le bruit de l’acier frappant le bronze retentit comme dans une grotte. Haraldr sentit la douleur et se demanda pourquoi il dormait avec des phoques, des phoques glissants, à la peau douce, couverte de duvet. Il en était entouré de toutes parts. Mais les phoques n’ont pas de bras et de jambes sans fourrure. Et pourtant c’était leur odeur.
    De nouveau l’écho dans la grotte, mais cette fois c’était un cri. Haraldr se débattit pour soulever son torse et des corps glissèrent de lui. Il vit la pute. Son visage fardé n’était plus qu’un masque aux taches confuses. Puis il vit la danseuse. Elles roulaient en se tirant les cheveux, elles grognaient et piaillaient. Haraldr retira ses pieds de sous un tas de chair ponctué par de gros nichons et des fesses rebondies. Il attrapa la pute et la secoua ; il fallait qu’elle s’arrête de crier. Mais elle ne criait pas. Il se leva. C’était dans sa tête que le bronze résonnait.
    La cour donnait l’impression d’un soir de bataille. Les restes de la scène d’Euthymios étaient éparpillés au milieu d’un vaste tapis d’hommes et de femmes nus, de leurs vêtements et de diverses outres vidées de leurs boissons enivrantes. Par Odin ! Les hérons de l’insouciance devaient avoir piqué tous les esprits la veille ! Haraldr sentit son estomac se soulever. Sa tête semblait près d’éclater. Ce cri !… Puis il en vit l’origine : une danseuse à la peau brune au-dessus d’un Varègue allongé sur le dos. Au début, Haraldr supposa que le cri de la danseuse provenait d’un excès de plaisir – puis il vit.
    C’était un Varègue, quand il avait encore des avant-bras, des mollets, des tripes, des testicules et une tête. Mais il était pendu à six pieds du sol avec ses propres intestins. On les avait noués autour de sa taille puis attachés au balcon de la galerie. Le cadavre mutilé tournait doucement dans l’une des arcades de plâtre blanc éclaboussé de sang. Haraldr se pencha en avant et laissa sa bile amèrement empuantie d’alcool jaillir sur le dallage. Les vomissures emplirent ses narines et il vomit une deuxième fois, à bout de souffle. Une autre femme se mit à hurler et un Varègue cria.
    Haraldr porta les mains à son crâne près d’éclater. Les cris se multiplièrent. Ulfr arriva en courant ; il était resté sobre pour garder l’or avec quelques autres Varègues, disciples dévots de Kristr qui refusaient de s’enivrer et de forniquer.
    — On nous a envoyé un message, dit Ulfr.
    Un des bras tranchés, qui gisait sur les dalles de pierre à quelques coudées du cadavre, montrait du doigt un vase de terre cuite couleur d’algue, posé à quelques pas contre le mur du portique.
    Haraldr regarda dans le vase et suffoqua. Il se raidit et glissa la

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