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Byzance

Byzance

Titel: Byzance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michael Ennis
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l’amour sans condition qu’il ressentait pour la personne sacrée. Jamais il n’avait aimé une femme, mais même la passion la plus pure n’était-elle pas profane comparée au sentiment qu’il éprouvait pour le représentant désigné du Seigneur sur la terre ? En adorant son empereur, Joannès pouvait restaurer la vie – non, pas simplement la vie, mais l’immortalité  – qui lui avait été arrachée des années auparavant. Il regarda de nouveau l’empereur Michel et, pendant un instant de feu, il emplit son cœur du rêve qui brûlait son âme.
    Il passa en revue les membres du conseil. C’étaient les pièces avec lesquelles Joannès jouait chaque jour le jeu du pouvoir, la partie d’échecs dans laquelle chacun risque son existence et gagne la vie éternelle, car son nom s’inscrit alors dans les palais de la mémoire. « Pas un seul grand joueur dans cette bande », se dit Joannès. Bardas Dalasséna, le grand domestique, n’était qu’un soldat de carrière, pas assez riche pour être admis par les dynatoï sur un pied d’égalité… Le logothète du Dromos ? Il aurait pu être redoutable, mais il était devenu si timoré qu’il n’osait plus parler en dehors de son absurde « chambre secrète ». Que dirait-il s’il savait que son valet de confiance était à la solde de Joannès ? Le préfet de la ville, frêle et déjà vieux, n’était qu’un vaurien sans envergure, un administrateur compétent mais ne songeant qu’à s’enrichir. Le questeur, gras et gâteux, était la plus haute autorité judiciaire de l’empire. On disait qu’il tenait audience dans un tel état d’ébriété qu’il avait condamné son propre secrétaire à la pendaison. Le sacellaire , eunuque voûté, au regard presque absent, était un des hommes de Joannès : il contrôlait toutes les finances de l’empire, les revenus des biens immobiliers de l’empereur et les immenses recettes fiscales. C’était lui qui fournissait à Joannès la clé de son pouvoir : il connaissait l’origine de pratiquement chaque solidus qui entrait dans le Trésor impérial, et il déterminait sa destination. Venaient ensuite plusieurs augustes sénateurs portant le titre de magister, qui représentaient bien entendu les intérêts des dynatoï. Le chef de ce troupeau de porcs n’était autre que le sénateur et magister Nicon Attaliétès. Mais qu’étaient les dynatoï, songea Joannès, sinon des enfants capricieux et têtus qui ne produisaient rien et voulaient consommer tout ? Dans les thèmes de l’Est, ils étaient en train de tresser la corde qui les étranglerait. Il faudrait alors que le gouvernement impérial intervienne et restaure l’ordre immémorial du système romain.
    La réunion commença dans l’ennui. Toujours la même querelle entre le questeur et Alexios, le patriarche de la Vraie Foi œcuménique, orthodoxe et catholique. Alexios essayait de faire attribuer aux tribunaux religieux, qui dépendaient de lui, certaines affaires jugées de tout temps par les cours civiles. Sur ce point, Joannès s’opposerait au questeur bien qu’il méprisât plus que tout autre homme ce patriarche onctueux à la langue couverte de merde. Mais quand il aurait déposé le patriarche, il avait l’intention d’augmenter le pouvoir des tribunaux ecclésiastiques.
    Ensuite, le grand domestique rendit compte du siège de la forteresse sarrasine de Berki, dans l’est de l’Asie Mineure. On s’attendait à un succès rapide… Oui, songea Joannès, parce que ton subordonné Nicolas Pégonitès a fait intervenir un contingent de plusieurs centaines de Varègues en dépit de tes objections et de tes menaces.
    Le sacellaire évoqua comme chaque fois la diminution des revenus fiscaux dans les thèmes de l’Est, bien que ses chiffres, à la demande expresse de Joannès, fussent loin de révéler toute l’ampleur du problème. Attendons que le patient soit très gravement malade, raisonnait Joannès. Il acceptera plus facilement des remèdes draconiens.
    Puis l’on en vint à la question que Joannès avait demandé au logothète de soulever.
    — Le nouveau calife d’Égypte Moustanir Billah s’avère l’image même de la coexistence pacifique entre Rome et le monde arabe, commença-t-il d’une voix humble, ses gros doigts croisés sur la poitrine à la manière d’un pénitent. Il a libéré des dizaines de milliers de chrétiens captifs dans les prisons du califat. Il a signé un traité de trente

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