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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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désavoue les radicaux qui figurent sur la liste de Jacquemont, à Arras, contre Guy Mollet. « Enlevez donc la liste socialiste contre moi à Cahors », lui a vertement répondu Maurice Faure.
    Puis déjeuner avec Roger Chinaud chez Tiburce. Il trouve que Poniatowski, qui revendique 100 députés giscardiens en 1972, est totalement déraisonnable. Car jamais (et, sur ce point, je partage son avis) il n’obtiendra sans bagarre les investitures suffisantes. Alors, de deux choses l’une : ou bien ils jouent le jeu de la majorité, et ils se soumettent aux arbitrages pompidoliens ; ou bien ils ne jouent pas ce jeu-là, reprennent leur liberté, et, dans ce cas, le risque pris par les giscardiens est multiplié par dix.

    Écouté ce soir, au Palais d’Orsay, Michel Debré parler, dans le cadre d’une réunion des jeunes gaullistes, de l’héritage du Général. Il insiste sur la V e  République, dans laquelle le président, élu au suffrage universel, détient « l’autorité qui en fait vraiment le responsable politique de la nation tout entière ». Il parle avec son intonation saccadée, son élocution psalmodique, que l’on reconnaîtrait entre mille, cette passion qui semble toujours l’animer, à laquelle l’évocation du personnage du Général confère une vibration particulière : « Lorsque l’Histoire regardera le général de Gaulle, elle dira qu’il a donné au mot République le sens qu’il lui fallait et l’aptitude à établir un État. » Il insiste sur le message social du Général : intéressement et participation, « c’est-à-dire, précise-t-il, l’effort pour que les travailleurs trouvent matériellement et intellectuellement leur participation aux fruits de leur travail, conception du progrès social qui aboutit à une transformation de la condition et aussi de l’état d’esprit des travailleurs ».
    À noter un passage sur l’ouverture en politique : « Il faut savoir s’allier, il faut savoir s’associer. Le général de Gaulle l’a montré, pendant la guerre, lorsqu’il a fait l’ouverture jusqu’aux communistes. Quand il a créé le RPF plus tard, il n’a pas demandé à ceux qui venaient à lui quelles étaient leurs conceptions passées. »
    Les limites de l’ouverture ? « Il ne faut pas y perdre son âme ou laraison de son combat. Il faut sauvegarder l’essentiel et tâcher de le réaliser. L’important n’est pas d’être dans la place, mais d’ouvrir les bras à ceux qui nous rejoignent sur l’essentiel. Là est l’habileté, mais aussi la nécessité. »
    Il fait un vrai succès dans cette salle bourrée de jeunes gens prodigues d’applaudissements rythmés, qui, revendiquant l’héritage populaire du gaullisme, ne se veulent pas de droite et applaudissent à tout rompre à tous les thèmes sociaux développés par Debré.

    8 mars
    Déjeuné avec Jacques Chirac. Il me raconte après tout le monde « son » affaire Tomasini. « Toto » parle à la presse, on s’en souvient, le mardi. Mercredi, Conseil des ministres : à la fin, juste après 13 heures, Chaban retient Debré à la sortie. Chirac les voit, se dit qu’un coup fourré se prépare, et fonce derrière Chaban et Debré qui montent vers le bureau de Pompidou. Il arrive trop tard : Pompidou, Debré et Chaban sont déjà enfermés. Chirac attend dans le bureau des aides de camp. Quelques minutes plus tard, Pompidou demande à le voir. C’est Chaban qui lui communique la décision qui vient d’être prise : Tomasini doit démissionner le jour même ; il faut réunir d’urgence le bureau exécutif de l’UDR pour entériner cette démission dans l’après-midi. Chirac, qui n’en croit pas ses oreilles, se tourne vers le président :
    « C’est cela que vous voulez ? » lui demande-t-il.
    Pompidou, l’air malheureux, dit oui.
    « Ce n’est pas possible, plaide Chirac. J’ai demain 100 démissions de l’UDR, le groupe UDR du Sénat me claque entre les mains ! L’UDR risque d’éclater !
    — C’est ce que nous avons décidé, coupe Chaban. Un point, c’est tout. »
    Accablé, Chirac laisse partir Chaban et Debré.
    Pompidou, lui, va déjeuner dans une salle à manger de l’Élysée.
    Resté seul, Chirac appelle Juillet, qui déjeune, lui, dans un bistrot. Puis Tomasini, qui déjeune dans un restaurant voisin, chez le Doyen. Tous trois se retrouvent à l’Élysée dans le bureau de Pierre Juillet vers 13 h 45. Pierre Juillet donnant

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